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Pourquoi Lysandre Nadeau vend des photos de son corps nu sur OnlyFans?

Elle a empoché plus de 20 000$ en moins de 10 heures.
Lysandre Nadeau/Instagram

«30 000$ par mois, je veux dire, je rentre dans mon argent avec les tets [les seins] que je me suis payée», dit d’emblée Lysandre Nadeau, l’une des personnalités du Web les plus connues au Québec, pour expliquer pourquoi elle a entrepris de vendre des clichés de son corps nu sur la plate-forme de contenu exclusif payant OnlyFans.

La belle blonde au franc-parler a surpris ses quelque 339 000 abonnés sur Instagram cette semaine en annonçant l’ouverture de son compte coquin sur OnlyFans, prisé des influenceurs et surtout des acteurs de l’industrie du X.

Capture d'écran

En moins de dix heures, elle a attiré 1000 abonnés et touché 17 000$ US, soit l’équivalent de 22 500$ canadiens, à coup de 20$ par abonnement mensuel, un montant qui se situe dans les moyennes des autres utilisateurs du réseau.

C’est quoi OnlyFans?

Créé à Londres en 2016, le réseau social OnlyFans propose un service d’abonnement payant à des chaînes proposant du contenu exclusif.

Pourquoi payer? Parce qu’on y propose des publications, photos et vidéos sans censure, aucune. Ainsi, on peut y trouver des seins nus, contrairement à Instagram qui les bannit systématiquement, de la porno, mais aussi des vidéos d’entraînement ultra performants.

Prix minimum par abonnement: 4,99$ par mois, mais la moyenne des utilisateurs chargent entre 12$ et 20$ par mois. 80% des revenus vont au créateur de contenu et 20% à OnlyFans. On peut également laisser du pourboire.

Rejointe par le HuffPost Québec, Lysandre Nadeau a préféré ne pas commenter la situation. Elle a cependant détaillé sa démarche en stories sur Instagram.

«Je me dis que tout le monde a déjà vu ça des filles toutes nues. Moi, je pourrais en profiter pis faire plein d’argent. […] J’ai l’impression qu’une porte s’est ouverte à moi que je gardais fermée par peur de provoquer», explique la jeune femme de 24 ans avant de dire qu’elle aimerait se payer un voyage en Europe, puis des chaussures Louboutin avec ses profits.

Elle affirme aussi vouloir mettre en valeur son corps dans lequel elle a investi «tellement d’argent» en procédures esthétiques. Augmentation mammaire, injections dans les fesses et les lèvres, tatouages et piercings dans les mamelons.

«Je mets tellement d’argent dans mon corps, faut que je le rentabilise, dit-elle à la blague. Après je vais pouvoir être la sugar mama de plein de petits cutes. J’ai l’impression que je viens de trouver mon purpose [NDLR : mon but dans la vie]»

Elle a d’ailleurs reçu l’appui de plusieurs autres influenceurs connus, félicitant son audace, puis le fait qu’elle utilise son corps comme elle l’entend. «On peut bien utiliser son corps comme on veut et à notre avantage POUR UNE FOIS qu’on peut contrôler le narratif de sa sexualité», a écrit Jessica Prudencio du compte Toutes dans mes fesses. Cassandra Bouchard (101 000 abonnés), WTFKeV (33 7000 abonnés) et Sabrina Gagné Lussier (13 800 abonnés) l’ont aussi défendue.

De gauche à droite : Cassandra Bouchard, Jessica Prudencio, Sabrina Gagné Lussier et WTFKeV.
Montage HuffPost/Captures d'écran Instagram
De gauche à droite : Cassandra Bouchard, Jessica Prudencio, Sabrina Gagné Lussier et WTFKeV.

Sain ou malsain?

Ce qui est pour Lysandre une «expérience sociale» qu’elle compte documenter sur sa chaîne YouTube peut cependant s’avérer un couteau à double tranchant, selon la sexologue Véronique Jodoin, qui travaille notamment en milieu scolaire auprès d’adolescents.

«Je suis bien mitigée. D’un côté ce n’est pas de l’exploitation sexuelle parce que c’est un choix personnel et consentant, mais de l’autre on peut se questionner sur les répercussions que ça aura sur elle après, et sur les jeunes qui la suivent. Ce n’est pas une actrice porno, c’est une personnalité publique. Elle a un auditoire différent, affirme la professionnelle. Ça risque de banaliser la chose. Les gens et les jeunes voient que c’est de l’argent facile. C’est sûr que ça a un effet entraînant. C’est fulgurant son affaire.»

Alors que l’actrice et activiste Cynthia Nixon a publié cette semaine la très médiatisée vidéo «Be a Lady They Said», vantant l’émancipation des femmes et revendiquant leur droit d’être «tentatrices» et «provocatrices», la décision de Lysandre d’ouvrir un compte au contenu croustillant suscite d’autant plus de divergences.

«Oui, c’est un choix personnel et c’est une prise de contrôle de son corps en tant que femme. Et tant mieux si elle assume sa nudité, mais il y a quelque chose dans le fait de s’exposer publiquement sans limites qui est plus malsain. On n’est plus dans le plaisir sexuel épanouissant, mais plutôt dans la recherche de valorisation et la validation sociale par son corps», soulève Véronique Jodoin.

Le danger en lien avec l’idée qu’on «peut faire ce qu’on veut de notre corps», dont le monétiser, c’est qu’on a tendance à l’objectiver, pointe par ailleurs la psychologue spécialisée en image corporelle et professeure à l’Université du Québec en Outaouais, Annie Aimé.

« L’objectivation du corps tend à maintenir ou à accentuer l’insatisfaction corporelle et la tendance à le juger, trop souvent négativement, note-t-elle. Le fait d’exhiber son corps, cet objet qui nous appartient, peut donc accentuer nos préoccupations à son endroit et notre insatisfaction. Cela peut aussi susciter bien de l’insatisfaction corporelle et de la détresse psychologique chez les gens qui nous suivent et qui s’inspirent de nous. Et, le “prestige“ d’influencer les autres vient avec la responsabilité de ne pas leur causer de tords.»

«Le courant de l’image corporelle positive veut que nous « habitions » notre corps, que nous le traitions avec respect et considération. Le fait de montrer son corps et de le monnayer correspond-t-il à un traitement respectueux? Cette réponse est bien personnelle, poursuit-elle. Certains diront que oui et d’autres que non. Tout est une question de valeurs ici, d’éducation, de croyances»

Lysandre Nadeau a cependant une réponse à ses détracteurs. «Les gens me disent : “t’as des jeunes qui te suivent“. Ben écoute, c’est aux parents de checker [NDLR : vérifier] ce que leurs jeunes regardent. Moi, je vais pas me censurer sur ma page, mes décisions pis toute parce qu’il y a des jeunes. Moi, je fais mes affaires. […] Les jeunes n’ont pas de carte de crédit, donc, ah, c’est réglé.»

Au Québec, les mineurs ne peuvent effectivement pas être détenteurs d’une carte de crédit, donc ne peuvent payer les frais d’abonnement aux chaînes OnlyFans, qui ne se règlent que par crédit.

«Et pour le monde qui s’inquiète que le monde aille faire des screenshots [NDLR : captures d’écran] pis toute, je m’en sacre. J’ai envoyé tellement de nudes [NDLR : photos nues] dans ma vie. Je suis tellement surprise que ça n’ait jamais leak [NDLR : que ça n’ait jamais été publicisé]. Je m’en torche. Mon corps, tu veux le voir? Tiens, affirme Lysandre en vidéo sur Instagram en levant son chandail. J’allais le faire, mais Instagram ne veut pas.»

OnlyFans au Québec avant Lysandre

Le phénomène OnlyFans n’en est qu’à ses balbutiements au Québec. Contrairement à nos voisins du Sud, peu de personnalités connues d’ici y sont inscrites pour l’instant. La plus connue, après Lysandre, est l’instagrammeuse Jade Lavoie.

Au moment d’écrire ces lignes, elle n’avait pas encore répondu à notre requête d’entrevue, mais elle a affirmé sur Instagram qu’elle croulait sous les demandes d’informations concernant Lysandre. «Je suis contente pour elle, mais c’est frustrant parce qu’elle fait ce que je fais en un mois en une journée», constate-t-elle.

«En même temps, je n’ai pas son fanbase [sa base d’abonnés] qui l’aime autant. Moi je suis détestée. [...] J’ai tellement été bashée [insultée] quand j’ai commencé à faire des photos nues sur OnlyFans. [...] Au moins, ça va déboucher les esprits.»

L’automne dernier, Jade avait par ailleurs levé le voile sur les raisons expliquant son implication sur le réseau social à l’émission Dans les médias diffusée à Télé-Québec. «À cause de la censure [sur Instagram], ça donne envie de s’ouvrir un compte extérieur où on peut vraiment se sentir libre. La différence, c’est le fait qu’on peut être payé pour nos photos et vidéos. On n’a pas besoin de passer par des compagnies. Ce qui arrive avec les compagnies, c’est qu’on va promouvoir un vêtement, un produit, qu’on n’utilise pas, qu’on n’aime même pas.»

Le HuffPost Québec a joint d’autres utilisateurs québécois d’OnlyFans qui préféraient garder l’anonymat.

ONLYFANS EN CHIFFRES :

  • 8 000 000 d’abonnés
  • 70 000 créateurs de contenu
  • 150 millions de dollars de revenu

L’influenceuse australienne Jem Wolfie est l’utilisatrice qui a le plus d’abonnés sur le réseau.

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