Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le long processus de sortie de coma: patience...

Aline vient d'avoir un accident de voiture, un accident grave. Un camion vient de lui rentrer dedans au détour d'une rue. Lorsque l'ambulance arrive, Aline est en arrêt cardiaque. Les électrochocs arrivent à faire repartir son cœur. Elle ne peut cependant pas ouvrir ses yeux lorsqu'on lui parle et ne montre que peu de réactions. Seules ses pupilles réagissent à la lumière. Elle est dans le «coma».
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Aline s'était levée ce matin, en pensant à la longue journée qui l'attendait. Elle était en retard comme d'habitude, avala un petit déjeuner en vitesse, et embrassa son mari et ses enfants. Hugo conduirait les enfants à l'école aujourd'hui. Léa lui dit au revoir distraitement sur le bas de la porte, tandis que Théo lui fit une grimace qui la fit éclater de rire.

Aline démarra la voiture et prit un raccourci. Elle était très en retard. Son téléphone sonna. Il était dans ce satané sac qui n'a pas de fond! Elle le chercha, le trouva et, lorsqu'elle se redressa, s'apprêtant à répondre, elle vit quelque chose en métal gris, quelque chose d'immense devant ses yeux puis... plus rien.

Aline vient d'avoir un accident de voiture, un accident grave. Un camion vient de lui rentrer dedans au détour d'une rue. Lorsque l'ambulance arrive, Aline est en arrêt cardiaque. Les électrochocs arrivent à faire repartir son cœur.

Elle ne peut cependant pas ouvrir ses yeux lorsqu'on lui parle et ne montre que peu de réactions. Seules ses pupilles réagissent à la lumière. Elle est dans le «coma». Aline est transportée d'urgence à l'hôpital le plus proche. La première chose à faire est de maintenir ses paramètres vitaux : son cœur doit continuer de battre, elle doit continuer à respirer, l'hémorragie doit stopper.

L'équipe réussit. Elle est pour le moment stabilisée et admise aux soins intensifs. Elle va y rester sans doute une à deux semaines pour être sûr que son état est bien stabilisé. La première semaine, les médecins ont plongé Aline dans un «coma artificiel». Sédatifs et analgésiques coulent maintenant dans ses veines.

Si elle se réveillait, Aline souffrirait trop. Elle a de multiples fractures aux jambes et aux bras mais, surtout, d'importantes lésions à la tête. Elle a d'ailleurs dû être opérée d'urgence car le sang s'accumulant dans son crâne faisait pression sur son fragile cerveau. Maintenant, il faut attendre.

Apràs deux semaines, les médecins ont décidé de lever la sédation mais, comme ils l'ont annoncé à Hugo, ils ne savent pas si Aline se réveillera. «Ça peut prendre du temps», dit-on à un Hugo anéanti par toutes ces longues heures d'attente à l'hôpital.

Les premiers jours, pas de réponse. Elle garde les yeux fermés et ne bouge que très peu. Hugo l'avait pourtant vue bouger lorsque l'infirmière était venue et avait exercé une forte pression sur son doigt. Lentement, elle avait écarté ses mains. Hugo s'était levé surpris et plein d'espoir mais l'infirmière lui avait expliqué que ce n'était qu'un réflexe, une «flexion stéréotypée».

Théo avait demandé: «dis papa, maman, elle dort?» Hugo avait alors pensé au film d'Almodovar, «Parle avec elle». Aline n'était pas comme dans le film. Elle n'était pas une beauté dormante. Son crane était rasé par la chirurgie qu'elle avait dû subir et arborait plusieurs cicatrices. Elle avait des tubes dans le nez pour la nourrir, dans la bouche pour la faire respirer et une poche sur le côté du lit pour recueillir son urine.

Non, ce n'était vraiment pas comme dans les films. Sa femme était méconnaissable mais toujours vivante et, pour lui, c'est ça qui comptait.

Trois semaines après l'accident, Aline ouvrit les yeux. Hugo était extatique. Il sortit appeler une infirmière qui lui expliqua que c'était un progrès mais qu'elle n'était toujours pas consciente. «Toujours pas consciente mais enfin elle bouge quand vous la stimulez, elle ouvre les yeux; mais qu'est-ce qu'il vous faut bon sang?», et puis que dire aux enfants, maman n'a plus l'air de dormir, maintenant. Léa était trop petite pour comprendre mais Théo ...

L'infirmière fit venir le médecin. «Votre épouse est en état végétatif, dit-il. Je comprends que c'est difficile à concevoir mais, malgré ses yeux ouverts, elle n'est pas consciente. C'est un progrès néanmoins. Cela signifie que ses fonctions autonomes sont relativement préservées. Elle peut maintenant respirer par elle-même. Nous allons donc retirer le tube qu'elle a dans la bouche et faire ce que l'on appelle, une trachéotomie, c'est-à-dire un trou dans la gorge pour qu'elle puisse respirer plus facilement».

Pendant que le médecin parlait de faire des trous dans la gorge de son épouse, Hugo se pencha au-dessous de son visage, au-dessus de ses beaux yeux bruns. «C'est vrai qu'elle a l'air absente», pensa-t-il. Il lui sourit, aucune réaction. Elle gardait ses yeux fixés au plafond.

«Comment saurais-je si elle reprend conscience, docteur?» «Bien, si votre épouse vous suit du regard, qu'elle vous serre la main lorsque vous le lui demandez ou qu'elle sourit a une plaisanterie, par exemple.» «Combien de temps va-t-elle rester dans cet état?» «Ça, difficile de savoir, des jours, des semaines, des mois, des années...» «Des années ?», répéta Hugo. Il avait la tête vide, tellement vide.

Pendant un mois, Hugo et les enfants vinrent voir Aline presque tous les jours. Hugo lui lisait le journal, tandis que les enfants jouaient dans un coin de la pièce. Puis, un jour, alors qu'ils étaient sur le point de partir, Théo commença à faire des grimaces à Aline. Hugo n'en croyait pas ses yeux lorsqu'il vit un sourire s'afficher sur le visage d'Aline. Il se précipita au bord du lit et commença à lui faire des grimaces également. Théo et Léa rirent et se joignirent à leur père. Tout le monde grimaçait à présent, sauf Aline qui sourit encore une fois.

Cette histoire est romancée, bien sûr. Elle est néanmoins proche de la dure réalité que vivent les familles. Au contraire du message souvent véhiculé par les médias, les patients qui récupèrent du coma ne sont pas des «beautés dormantes».

Le coma ne dure pas non plus des mois ou des années. La majorité des patients évolue vers un état végétatif après deux à quatre semaines. Et, après une lésion cérébrale grave (similaire à celle de Michael Schumacher), les patients peuvent rester un long moment dans cet état avant de montrer des signes de conscience.

Même dans ce cas de figure, tout n'est pas gagné. Le patient est alors en état de conscience minimale, un état ou le patient montre des signes très ténus de conscience, et cela de manière reproductible mais fluctuante.

Ces patients ont toujours un long parcours de récupération qui les attend (souvent plus d'un an). Finalement, même s'il récupère et ne présente plus de désordres de la conscience, le patient n'est plus le même. Les changements de personnalité observés ne sont pas dus à un traumatisme psychologique mais aux lésions cérébrales subies. Les familles doivent alors littéralement refaire connaissance avec leur proche. Voici la vérité toute nue. Rien ne sera plus comme avant. Ce n'est pas un mal ou un bien. Ce sera juste différent.

À voir aussi sur Le HuffPost:

 Une banderole de 21 mètres devant l'hôpital

Les fans et la famille de Schumacher le jour de ses 45 ans

Damon Hill

Les pilotes soutiennent Schumacher après son accident

Retrouvez les articles du HuffPost Art de vivre sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.