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«L'après»: l'autrice Emilie Ouellette crée un rendez-vous quotidien pour les adolescents

«Les ados, c’est une tranche d’âge que j’ai toujours appréciée et aimée. Je trouve qu’on ne les entend pas assez. On les juge beaucoup.»
Emilie Ouellette
Crédit photo: Andréanne Gauthier
Emilie Ouellette

Pensez roman-feuilleton nouveau genre: chaque jour, à la même heure, l’autrice Emilie Ouellette publie en ligne un nouveau chapitre de son roman «L’après», destiné aux adolescents - et ce, de façon tout à fait gratuite.

Le contexte de l’histoire n’est pas étranger à la situation inhabituelle dans laquelle nous nous trouvons actuellement. En fait, celle qui est également humoriste et conférencière y a puisé beaucoup d’inspiration; «L’après» se déroule après une pandémie mondiale, qui a décimé tous les adultes de la planète, laissant les jeunes à eux-mêmes. Le HuffPost Québec a discuté avec l’autrice de ce roman, dont la publication quotidienne se veut rassembleuse en temps de pandémie.

Comment le projet d’écriture de «L’après» a-t-il démarré?

EO: Il a débuté il y a quelques semaines. J’ai quatre enfants; ma plus vieille a 11 ans. On prenait une marche dehors à la mi-mars, une journée pendant laquelle il faisait beau. À ce moment-là, ça n’allait vraiment pas bien en Italie. En même temps, ils n’arrêtaient pas de dire que ça ne semblait pas affecter les enfants.

En parlant avec ma fille, je me suis rendue compte qu’elle ressentait un stress par rapport à ça. Son stress, c’était (de se dire): «Et si tous les adultes mouraient demain?» Étant la plus vieille de la famille, elle était en train de se préparer: «Si jamais vous mourez, qu’il n’y a plus d’adultes, c’est moi qui deviens responsable de mon frère et de mes soeurs.» J’ai fait: «Woh! On va se calmer.»

On en a parlé beaucoup, on a remis les choses en place. Mais après ça, c’est une idée qui est restée dans ma tête et à laquelle j’ai continué à réfléchir.

Pourquoi as-tu décidé de viser les ados en particulier?

EO: Je me suis dit que si ma fille de 11 ans avait ces peurs-là, c’était probablement la même chose pour les ados. En plus, ils vivent un stress parce qu’ils sont séparés de leurs amis.

Aussi, j’ai eu plusieurs vies; j’ai déjà été intervenante en maison de jeunes il y a vraiment longtemps. Après ça, j’ai été happée par la maternité, puis j’étais plus dans la réalité des jeunes enfants de 0 à 5 ans.

Mais les ados, c’est une tranche d’âge que j’ai toujours appréciée et aimée. Je trouve qu’on ne les entend pas assez. On les juge beaucoup.

Quand j’ai vu que mon histoire sortait de manière sombre parce que je ne m’étais pas censurée, je me suis dit que c’était plus pour les 13-17 (ans).

C’était important pour toi que ton projet soit vraiment un rendez-vous quotidien?
EO: Oui! Pour moi, oui il y a l’histoire et le livre, mais ça allait de pair avec le concept de se créer une communauté, de jaser, d’avoir rendez-vous tous les jours. C’est important pour moi.

À tous les jours, à 16h15, sur le compte Instagram du livre, je suis en direct. Il y a de plus en plus de jeunes. Ils sont super interactifs. Ils posent des questions. On échange sur le chapitre de la veille. Ça fait un rendez-vous à tous les jours où on discute.

Mais il faut les trouver, les jeunes, parce qu’ils ne sont pas sur Facebook, et moi je ne suis pas sur Snapchat. Le lundi et le mardi (NDLR: de la semaine dernière), j’avais quelques centaines de jeunes qui avaient commencé à lire. Mais je me disais: il me semble qu’il y a une place où je pourrais aller les chercher plus rapidement. Je suis allée sur TikTok.

DisobeyArt via Getty Images

C’est ma surprise de cette semaine; ça n’a aucun bon sens. À date, je pense que j’ai plus de 80 000 vues de la vidéo dans laquelle j’ai présenté le projet aux jeunes. Le compte Instagram du livre que j’ai mis sur pied est passé de 60 abonnés à 2400 abonnés. J’ai plus de 5000 téléchargements du livre.

J’ai des centaines de commentaires. J’ai des jeunes qui m’écrivent, non seulement parce qu’ils embarquent dans l’histoire, qu’ils tripent, mais aussi accessoirement, (ils me disent qu’)ils sont stressés, qu’ils n’ont pas d’école jusqu’en septembre.

J’ai l’impression qu’ils sont dans une craque en quelque part… Puis ça doit être rushant d’être confiné à la maison, adolescent, avec ses parents; même si les parents font de leur mieux, quand tu es ado, tu es à cette étape de ta vie où tu veux un peu te distancier d’eux parce que tu veux t’affirmer, tu veux être avec tes amis.

Justement, y a-t-il certaines préoccupations qui sont ressorties des commentaires reçus de la part des ados?

EO: Il y a une chose commune qui ressort, c’est qu’ils se sentent seuls, stressés et incompris. C’est quelque chose qu’ils m’ont beaucoup dit.

Je pense qu’ultimement, s’ils se promènent dans la rue et qu’ils vont voir leurs amis, même s’ils sont à 2 m de distance, parce qu’ils sont peut-être un peu plus nombreux, je pense qu’ils se font plus juger. J’imagine qu’ils se font plus juger que quand moi, je me promène avec mes quatre enfants de 11 ans et moins pour marcher et prendre du soleil.

Sinon, dans les témoignage que j’ai reçus, autant qu’il y a des jeunes qui sont tristes et stressés de ne pas voir leurs amis, autant que le fait d’être à la maison a aussi, chez certains, enlevé la pression de de voir fitter dans un moule.

Quand tu es à l’école, il y a le paraître qui est important… Ils ont aussi la chance de découvrir vraiment qui ils sont, dans le fait d’être tout le temps à la maison.

Pendant combien de temps vas-tu poursuivre la publication de tes chapitres?

EO: J’ai 21 chapitres. Peut-être que je vais faire un épilogue après, que je n’ai pas écrit encore. Je suis en train de réfléchir.

Grosso modo, ça va être un deux semaines et demi à trois semaines de rendez-vous avec les jeunes, (pendant lequel) je continue à alimenter le compte TikTok. J’ai continué à faire des vidéos. Je sens que je suis vraiment entrée en relation avec eux et ça, c’est trippant aussi.

On a un pont pour se parler, à travers une histoire qui vient les toucher, parce que ça touche une des peurs qu’ils ont - ou en tous cas qu’ils ont peut-être inconsciemment. Qui touche le stress par rapport à cette pandémie-là.

On commence à entendre parler du déconfinement; quel sera le plus gros défi des ados selon toi dans ce contexte-là?

EO: En ce moment, je pense qu’il y a des directions contradictoires; on ouvre le primaire, mais pas le secondaire. Pour les ados, je pense que leur plus gros défi, ça va être d’essayer de comprendre l’information.

Au début, c’était toujours clair: tout est fermé, vous restez chez vous… Depuis les dernières semaines, on commence à parler de déconfinement, on revient. C’est comme si l’information passait par plusieurs filtres et quand ça t’arrive, tu sais pas trop quoi en faire.

Les sept premiers chapitres de «L’après» sont disponibles en ligne. Pour lire la suite, rendez-vous sur le site web de l’autrice Emilie Ouellette, ou sur sa page Facebook.

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