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«Follow the money»: le financement politique de la course à la direction du PQ sous la loupe

J'ai eu l'idée de « suivre l'argent » à mon tour, mais dans le contexte de la course à la direction du Parti québécois. Chaque semaine, j'analyserai le financement à partir d'un angle différent.
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Aux États-Unis, il y a un adage bien connu qui dit « Follow the money » (pardonnez l'anglicisme), soit littéralement « suivez l'argent ». Cette expression peut s'appliquer à plusieurs domaines, comme la finance, ou même la lutte contre le terrorisme international, pour déterminer la provenance des fonds des organisations terroristes comme l'État islamique. Dans le domaine politique, toutefois, cette maxime signifie qu'il faut regarder la provenance des fonds d'un parti ou d'un candidat pour réellement saisir son positionnement sur l'échiquier politique. Pour ceux voulant réellement comprendre la politique américaine, il s'agit d'un secret de Polichinelle. Plusieurs chercheurs, dont les politologues John Mearsheimer et Stephen Walt, ont démontré que l'argent provenant des lobbies avait une influence considérable sur la politique américaine, parfois même plus que l'opinion publique. C'est tout dire!

J'ai donc eu l'idée de « suivre l'argent » à mon tour, mais dans un contexte bien différent de la politique américaine; celui de la course à la direction du Parti québécois. Évidemment, le financement politique est beaucoup (beaucoup!) plus encadré au Québec qu'il l'est aux États-Unis. L'enjeu n'est donc pas tellement de connaître la provenance (le « Qui ») des fonds recueillis par les candidats que de connaître la répartition des fonds sur le territoire (le « Où »). En clair, il s'agit d'analyser le financement recueilli par tous les candidats sur plusieurs bases, dont la répartition géographique des donateurs, pour dégager des tendances et trouver des trucs intéressants.

Pour vous donner un exemple, prenons une « analyse » que vous retrouverez dans les grands médias : l'état du financement des candidats. Ainsi, en date du 15 février 2015, l'état du financement pour chacun des candidats est le suivant (montant arrondi à la dizaine près) :

  • Pierre Céré : 11 870 $
  • Alexandre Cloutier : 33 450 $
  • Bernard Drainville : 36 630 $
  • Jean-François Lisée * : 11 927 $
  • Martine Ouellet : 21 970 $
  • Pierre Karl Péladeau : 74 720 $

* Même si M. Lisée s'est retiré de la course, il peut encore recueillir des dons, comme il le mentionne lui-même ici.

Ce type d'analyse ne fait que nous apprendre qui est en avance dans le financement. Rien de plus. Ce que ces chiffres ne disent pas - et qu'il est beaucoup plus intéressant de savoir - c'est la provenance des fonds. Ainsi, saviez-vous que des 33 450 $ recueillis jusqu'ici par le candidat Alexandre Cloutier, près de 63 % des dons proviennent d'une seule circonscription, soit celle que représente M. Cloutier à l'Assemblée nationale? Si on élargit l'analyse à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean au complet (M. Cloutier est député de Lac-Saint-Jean), on arrive à près de 75 % du total du financement recueilli par M. Cloutier. Cette forte concentration du financement d'Alexandre Cloutier est probablement un symptôme de son manque de notoriété à l'extérieur de sa région. Il faut aussi avouer qu'il n'a pas été le ministre le plus médiatisé de l'ancien gouvernement Marois. Gageons tout de même que la course à la direction lui permettra de sortir de cet anonymat.

À titre de comparaison, à peine 12 % du financement de Bernard Drainville - le plus proche rival d'Alexandre Cloutier dans cette course au financement - provient de la circonscription de Marie-Victorin, soit celle que représente M. Drainville à l'Assemblée nationale. Cela témoigne d'un appui beaucoup plus vaste et étendu, mais en début de course comme nous le sommes, c'est probablement dû au fait que Bernard Drainville a été un ministre ostentatoire du gouvernement Marois. Il jouit donc d'une notoriété beaucoup plus forte que ses proches rivaux. Plus la course avancera, moins cette notoriété de départ fera effet. Ce sera alors la force de l'organisation (la machine, dans le jargon) qui fera la différence, mais il est encore trop tôt pour se prononcer là-dessus.

C'est donc ce que je me propose de faire tout au long de cette course. Chaque semaine, j'analyserai le financement à partir d'un angle différent. Ainsi, je serai en mesure de répondre à des questions comme:

  • De quel coin du Québec provient le financement de Bernard Drainville, de Pierre Karl Péladeau, de Martine Ouellet, etc. ?
  • Quelle région du Québec est la plus généreuse (ou avare)?
  • Quelle circonscription est la plus généreuse (ou avare)?
  • Quel candidat va chercher le plus de nouveaux donateurs (c'est-à-dire des gens qui n'ont jamais fait de don politique au niveau provincial)?
  • Etc.

Méthodologie

Les chiffres et données que je présenterai au cours de mes billets ont été produits à partir de données publiques disponibles gratuitement sur le site du DGEQ. Plusieurs heures ont été nécessaires à la compilation des données. La liste des donateurs étant mise à jour quotidiennement sur le site du DGEQ, il m'est impossible d'avoir chaque jour les derniers chiffres en main. Les analyses pourront donc porter sur une liste qui n'est plus nécessairement « à jour ». Je mettrai ma propre liste à jour aux deux semaines environ. Évidemment, pour des raisons de protection de la vie privée, je conserverai les données brutes confidentielles.

J'espère que mes analyses vous plairont. Au plaisir de discuter avec vous!

P.S. Par souci de transparence, je précise que je suis membre du Parti québécois et j'appuie ouvertement M. Pierre Karl Péladeau dans cette course à la direction. Mes analyses resteront toutefois le plus objectives possible, puisque les données ne mentent pas.

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