Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Femmes en beauté: redorer l'extérieur pour mieux soigner l'intérieur

Beaucoup de femmes avec des problèmes de santé mentale ont des problèmes de confiance en soi, parce que la médication peut entraîner une transformation brutale de leur corps.
Pierre St-Denis

Vivre au quotidien avec de graves problèmes de santé mentale peut mener à beaucoup d’isolement. Mais en plus du regard des autres sur sa maladie, il faut parfois apprendre à vivre avec un nouveau corps, parce que la médication engendre souvent une prise de poids importante.

«L’estime de soi en prend un coup», observe Élyse Benoit, chef d’équipe de suivi intensif dans le milieu (SIM) au CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal. Le phénomène fait plus de ravages chez les femmes, puisqu’elles sont davantage soumises à des critères de beauté et de minceur importants, dans la société. C’est pour que ces femmes retrouvent confiance en elles et se sentent belles qu’Élyse Benoit a décidé mettre sur pied «Femmes en beauté», il y a cinq ans. Et depuis, l’événement qui se déroule deux fois par année n’a pas cessé de prendre de l’envergure. L’édition du printemps 2019 avait lieu aujourd’hui.

Mannequin d’un jour

Une trentaine de femmes ont pris part à l’événement. Elles participent d’abord à un essayage, choisissent ensuite un ou deux morceaux qui leur plaisent, se font maquiller puis défilent sur une musique de leur choix. Elles repartiront ensuite chez elles avec des vêtements neufs et une photo professionnelle.

«Ça me fait du bien, ça m’apporte de la fierté et des choses positives!» confie Susana, qui participait à l’événement pour la troisième année.

La femme de 37 ans vit avec un diagnostic de bipolarité depuis 10 ans. Elle a pris 60 livres depuis le début de sa médication.

Prise de poids

«On s’est beaucoup attaqué au phénomène de l’obésité morbide et de l’estime de soi, avec mon équipe, explique Élyse Benoit. Même avec des ateliers de nutrition, de mise en forme, la réduction de poids, c’est extrêmement difficile.»

Comme les méthodes traditionnelles de perte de poids ne semblaient pas fonctionner chez ses patientes, Mme Benoit s’est mise à réfléchir à des façons de les faire se sentir mieux.

«Un jour, une femme dans la cinquantaine qu’on suivait avait confié qu’elle avait commencé à se sentir mieux le jour où une coiffeuse était venue chez elle pour teindre sa repousse», se rappelle Mme Benoit.

Ç’a été pour elle une sorte de déclencheur.

Les patients que son équipe et elle suivent - environ 50, dont 30 femmes - ont des problèmes de santé mentale graves et persistants. Ce sont en majorité des personnes atteintes de schizophrénie ou de bipolarité, qui ont souvent subi beaucoup d’hospitalisations.

«Beaucoup de ces femmes ont vu leur vie complètement chambardée, explique Mme Benoit. Elles perdent leur emploi, leur mari, leur famille les rejette...»

Du positif

«Femmes en beauté» représente pour ces femmes une raison de sortir de chez elles, parce que les occasions peuvent se faire rares pour certaines d’entre elles.

«Ça permet de voir toutes sortes de femmes avec des problèmes de santé mentale, mais qui ont toutes un passé différent, réunies, confie Gladya, qui vit avec un trouble d’anxiété et un trouble schizo-affectif. Et ça donne un boost de confiance en soi!»

La femme de 39 ans a dû composer avec une importante prise de poids, d’environ 100 livres, à cause la médication.

«Pendant un bon bout de temps, je m’étais isolée, je ne voulais pas accepter ma maladie», explique-t-elle.

«[Avec Femmes en beauté,] deux fois par année, ces femmes vivent des événements extrêmement positifs, dit Élyse Benoit. Elles participent à des rassemblements qui leur permettent de se revaloriser. Et c’est déjà beaucoup pour elles, parce qu’elles sont souvent confrontées aux échecs. Elles essaient de se remettre de l’avant, de retourner aux études, mais c’est difficile.»

Gladya, elle, tente de se reprendre en main. Elle a regagné un poids santé, et participe depuis un an à un programme de réinsertion sociale. Elle espère retourner à l’université en anthropologie.

Before You Go

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.