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J'ai deux mamans, je suis heureuse, et alors?

J'ai été élevée par deux femmes. Deux femmes magnifiques, formidables et que j'aime par-dessus tout. J'ai toujours été fière de ma famille, autant pour sa différence que pour sa normalité, et aujourd'hui elle est au cœur du débat.
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Le Tumblr Enfants d'homos laisse la parole à tous ceux qui veulent par le seul moyen du témoignage, expliquer ce qu'être un enfant d'homosexuels implique socialement.

J'ai été élevée par deux femmes. Deux femmes magnifiques, formidables et que j'aime par-dessus tout. J'ai toujours été fière de ma famille, autant pour sa différence que pour sa normalité, et aujourd'hui elle est au cœur du débat.

Ces derniers temps, j'ai lu tellement de choses, entendu tellement de discours, vu tellement de vidéos ou d'images. J'ai été touchée, choquée, déçue et souvent blessée.

J'ai essayé de comprendre et d'analyser tous ces discours haineux, tous ces écrits obscurantistes. Depuis les discours de Madame Boutin jusqu'au texte du Vatican écrit en 1992 par l'actuel Pape.

Ce texte, celui de l'église catholique, précise dans son titre III au paragraphe 7: "l'enfant [est] la partie la plus faible et sans défense". Alors en tant "qu'enfant de", j'ai décidé de parler, de me défendre, de défendre ma famille, de défendre ma vision de la société.

Il est souvent question de sauvegarder la famille. Une famille qui risquerait de disparaître avec l'accès du mariage aux personnes de même sexe. Il est étonnant que cet argument soit si souvent entendu... D'abord parce que les homosexuels veulent le droit de fonder une famille, et non celui de la détruire! Ensuite parce que l'étymologie même du mot famille (selon le Robert, le mot famille découle du latin familia qui dérive lui-même de famulus "serviteur") ne fait aucun cas des rapports génétiques mais plutôt de personnes habitant sous le même toit: la famille évolue. Et enfin parce que permettre l'égalité devant une loi n'a jamais mené à la suppression de ladite loi, au contraire.

Alors nous demandons le droit de fonder et sauvegarder notre famille face à ceux qui ne veulent pas nous l'égalité: le droit d'être connus et reconnus par la société.

Il est souvent question de défendre la nature. Une nature qui nous dirait qu'une famille se forme exclusivement grâce à l'union des deux sexes. Encore une fois il s'agit d'un argument qui tombe largement à côté du débat. La dualité humaine et l'obligation de fécondation d'un ovule par un spermatozoïde, comme seule façon de créer la vie, ne sont pas remis en cause. Ce dont il s'agit ici, c'est de faire évoluer une construction sociale: le mariage. Cette institution est une institution humaine, créée par la société et ouverte à ses membres consentants. C'est un système juridique qui créé une famille, tout comme l'adoption est un système juridique qui créé une filiation. Et ces systèmes unissent des gens qui ne sont pas liés génétiquement: cela va plus loin que la basique question du sang, c'est une volonté.

Et notre volonté est de vivre dans une société qui nous accepte telles que nous sommes sans nous juger ni nous différencier.

Il est souvent question du développement de l'enfant dans un couple de même sexe. La mixité serait essentielle pour élever sainement un enfant. Ce qui est frappant ici c'est qu'il n'est pas fait état des familles monoparentales. Ces familles sont nombreuses et pourtant personne ne reproche à un veuf de ne pas se remarier uniquement pour offrir de modèle féminin à son enfant ou à une mère célibataire de ne pas être restée dans une union qui ne la rendait pas heureuse. Car on ne peut prouver que leurs enfants seraient plus heureux. Mais on assène à tout va que deux parents du même sexe n'offriraient pas l'équilibre nécessaire à un enfant. Comme cela. Sans preuves. Pourtant il ne me semble pas que quiconque ait découvert une méthode infaillible pour bien élever les enfants...

Alors nous demandons le droit d'être comme tout le monde: réussir, échouer, se tromper, se rattraper. Vivre et grandir.

Il est souvent question d'imposer aux enfants un référent masculin ou un référent féminin. De lui permettre d'avoir une personne de chaque sexe à laquelle s'identifier. Cet argument est le plus mystérieux et dangereux à mon sens. Faut-il y voir une homophobie latente qui ferait croire aux gens que les homos vivent en autarcie, entre eux, sans famille (parents, frères, sœurs, oncles, tantes,) et sans ami-e-s? Ou faut-il y voir un sexisme profond qui classerait par "apports" les hommes et les femmes (mode ou foot, moto ou cuisine, force ou tendresse)? Dans les deux cas, il devient alors encore plus utile et urgent de faire évoluer le mariage et la famille.

Nous souhaitons le changement des lois pour qu'enfin nous soyons soutenus contre les préjugés et les discriminations.

Il est souvent question... Non. Je vais arrêter là. Les autres arguments entendus maintes et maintes fois sont tellement arrogants, outrageants et ridicules qu'il vaut mieux en rire.

"Le mariage est sacré, le Créateur l'a instauré". Oui, enfin, sacré pour ceux qui le veulent et ce seulement depuis 1215 et le concile de Latran soit moins d'un millénaire. Pas très rapide ce Créateur...

"Un père et une mère: on ne ment pas aux enfants!". Mais qui a parlé de mensonge? Les parents homosexuels ne mentent pas plus à leurs enfants que les parents hétérosexuels, c'est la technique de procréation qui change, pas le principe.

"Les enfants d'homosexuels seront forcément homosexuels". D'abord, où est le problème? Ensuite, il me semble que le plus souvent les homosexuels sont issus de familles hétéro et Pasteur a démontré depuis plus d'un siècle que les générations spontanées ce n'était pas réel...

"Mais s'il n'y a plus d'hétérosexuels, l'humanité va disparaître". Oui, alors... Si tous les humains se transformaient en dragons, il n'y aurait plus d'humains non plus... (Mais beaucoup de dragons!)

J'en oublie, mais ce n'est pas un mal!

Je m'appelle Louise, j'ai 27 ans, j'ai un travail, un appartement et des amis. Mes mamans m'ont désirée, élevée et aimée. Mon père et sa femme m'ont adorée et soutenue. Mes frères et sœurs m'ont choyée et accompagnée.

En somme, j'ai deux mamans, je suis heureuse et alors?

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