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Les autistes sont-ils des monstres sanguinaires?

L'auteur de la fusillade de Santa Barbara, Elliot Rodger, avait peut-être le syndrome d'Asperger. Mais ce n'est pas cette particularité qui a selon moi déclenché son acte meurtrier. C'était un mal intérieur qui lui était propre.
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J'étais chez moi, bien peinarde, veillant sur mes petites affaires quotidiennes et je ne demandais rien à personne. Mais comme à chaque jour que le calendrier grégorien nous apporte, les actualités viennent nous colporter mille et trois histoires à faire dresser tout son chignon sur la tête. La dernière nouvelle en liste allait m'interpeller outrageusement d'une manière toute personnelle : l'auteur du massacre de Santa Barbara, Elliott Rodger, avait le syndrome d'Asperger. La belle affaire. L'autisme, et plus encore l'autiste, allait porter une fois de plus en bandoulière l'odieux d'une situation orpheline et plutôt rare. Les mots « autisme » et « asperger » allaient revenir hanter les médias et déranger le commun des mortels pour d'abominables raisons.

Soyons bien lucides. Des crimes, il y en a qui sont commis à chaque jour que la luminosité solaire nous amène. Ce qui me terrifie toujours dans un cas comme celui de vendredi dernier, et qui me laisse sans voix, c'est ce terme appuyé sur les gros titres gras et noirs. « Le tueur était autiste ». « Elliot Rodger avait le syndrome d'Asperger ». Tout ceci laissant planer un immense nuage obscur : l'autiste est un être dangereux et un tueur sanguinaire. Fermez volets, châssis doubles et portes cochères à triple tour. Surtout, n'ouvrez à personne si on frappe avec frénésie à vos carreaux.

Bien évidemment, on remettra sur la place publique, par ignorance, la notoire agressivité autistique, sans réaliser que cette dernière est avant tout une réponse défensive sur un trop plein d'anxiété de l'autiste, devant un monde qui lui est étrangement inquiétant. L'autiste en lui-même, n'est pas un être violent par définition. Sous la pression, l'autiste réagit, mais le plus souvent contre lui-même. Je ne crois pas que l'autisme d'Elliot Rodger soit responsable de son acte de violence de vendredi dernier. Pas plus que celui présumé d'Adam Lanza à Sandy Hook. Le père de Lanza lui-même n'y croyait pas. D'ailleurs, tous les jeunes et adultes autistes que je connais détestent la violence gratuite et l'injustice. Ils ne sont donc pas intrinsèquement enclins à perpétrer des crimes violents.

Les réactions ont été nombreuses suite à l'événement dramatique de Santa Barbara. Le père d'une des victimes de la tragédie a condamné en premier lieu les armes en vente libre. La féministe Jessica Valenti a écrit dans The Gardian que c'est « une maladie culturelle », qui a poussé Elliot Rodger à considérer les femmes comme des objets à posséder, et que dans sa vidéo, Rodger clamait son droit en tant que mâle alpha d'avoir une femme à lui. Il aurait également dit « l'université représentait un espoir pour moi », paraphrasant la promesse véhiculée par les films d'adolescents, soit un succès facile auprès des filles dans un utopique et libertin milieu universitaire. La pression sociale d'être charismatique, populaire et sexy n'a jamais été aussi obligatoire qu'en ces temps de médias sociaux et de paradis superficiels.

L'autisme ne met pas à l'abri non plus d'autres pathologies psychiatriques associées, comme pour toute personne non-autiste. Mais l'autisme en lui-même, pris seul, n'est pas un trouble psychiatrique ou une maladie mentale. Il n'y a pas dans l'autisme de voix intérieure infernale ni de possession démoniaque. Et il est également admis que les autistes s'avèrent habituellement peu portés à enfreindre les lois et les règlements connus. Elliot Rodger avait peut-être le syndrome d'Asperger. Mais ce n'est pas cette particularité qui a selon moi déclenché son acte meurtrier. C'était un mal intérieur qui lui était propre. C'est le crime du désaxé Elliot Rodger, pas celui d'un autiste asperger, tout simplement...

Découvrez d'autres textes de Marie Josée Cordeau sur son blogue 52 semaines avec une autiste asperger

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