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La délicate question de la diversité à «Occupation Double»

Comment célébrer la diversité dans un show fondamentalement superficiel?
Julie Munger d'«Occupation Double Chez Nous»
Julie Perreault via Noovo
Julie Munger d'«Occupation Double Chez Nous»

La nouvelle saison d’Occupation Double bat son plein. Jusqu’à présent, la téléréalité tient ses promesses en offrant déjà une bonne dose de twists dignes de Capitaine Rebondissements (Jay Du Temple), mais aussi de larmes, de drames et de crises existentielles.

Comme c’est le cas chaque année, la production continue de faire sa part pour mettre en valeur la diversité à travers sa nouvelle cuvée de candidats et de candidates.

C’est du moins le cas pour ce qui est de la diversité culturelle, rayon dans lequel Occupation Double continue d’être une figure de proue au coeur d’une télé québécoise à laquelle on reproche de plus en plus d’être beaucoup trop blanche.

Pour ce qui est de la diversité corporelle ou de genre, c’est malheureusement une tout autre histoire, alors que la téléréalité semble se contenter une fois de plus de «remplir un quota».

Et cette saison plus que les précédentes, cette limitation donne lieu à des malaises télévisuels tout sauf divertissants.

À l’instar d’Alanis Desilets et de Khate Lessard dans le passé, Julie Munger est la fière représentante de la diversité corporelle d’Occupation Double Chez Nous. Et bien que sa nomination soit tout à fait louable et doive même être encouragée, elle révèle également plusieurs problèmes que la production aurait déjà dû considérer.

Là pour les bonnes raisons

Depuis quelques épisodes, nous voyons de plus en plus Julie remettre sa présence en question, perdre en confiance et ressentir beaucoup de frustration, car elle n’est pas en mesure d’avoir des rapprochements dignes de ce nom avec un des candidats masculins.

Face à cette situation, Khate et Claudie d’OD Afrique du Sud ont même pris l’initiative de jouer les entremetteuses sur les réseaux sociaux afin de trouver des dates à Julie en dehors d’Occupation Double.

Un beau geste en théorie, mais qui inspire un peu trop la pitié en pratique.

Même chose lorsque les gars disent vouloir garder Julie dans l’aventure le plus longtemps possible. Car à l’instar du public, ils adorent la personne, même s’ils ne la voient que comme une simple amie.

Le problème, c’est que Julie semble être à Occupation Double pour ce à quoi les candidats aspiraient avant l’avènement des influenceurs: tenter de trouver l’amour. Julie n’est pas là que pour incarner une belle leçon de courage et de confiance en soi en brisant quelques barrières au passage. Si Khate voulait avant tout «faire OD», Julie, de son côté, veut aussi avoir l’opportunité de «papillonner».

Entendons-nous, la production fait parfaitement les choses en mettant Julie sur le même pied d’égalité que les autres candidats. Il ne pourrait en être autrement. C’est plutôt ce que représente Occupation Double qui a tendance à lui mettre des bâtons dans les roues.

«Nous vivons dans une société axée sur la consommation rapide de tout. On n’a pas le temps d’approfondir quoi que ce soit. Dans un contexte de dating, la première chose sur laquelle tu vas baser tes décisions, c’est ce que tu vois», avait résumé Naadei, dimanche dernier, en abordant la question.

Hypothétiquement, Julie aurait déjà pu avoir des rapprochements avec l’un des candidats actuels... si on ne leur avait pas mis autre chose en tête dès le départ.

Tout ou rien

Dans le cas d’Alanis et de Khate, le problème était le même, et celles-ci ont dû quitter l’aventure beaucoup trop rapidement.

Toutes trois ont dû incarner cette idée de diversité seule à l’écran, tandis que le reste des candidats demeuraient représentatifs de ce qu’est OD depuis ses débuts: des mannequins, des fans de gym, des gars et des filles de bar. Des participants qui cherchent tous un peu la même chose dans un jeu où on vend un rêve qui, même aujourd’hui, demeure fondamentalement superficiel.

Et la production est bien au fait de cette situation. Elle ne fait visiblement pas confiance aux gars pour donner la chance à ces candidates d’entrer dans les maisons, et préfère prendre d’autres moyens pour assurer leur place. Alanis Desilets n’a pas eu à passer par l’étape du tapis rouge, tandis que Khate Lessard et Julie Munger ont obtenu leur billet d’entrée grâce au vote du public.

D’un côté, la production sait que le public va apprécier et encourager cette ouverture. De l’autre, elle ne limite celle-ci qu’à une seule candidate par saison (toujours une femme, jamais un homme, d’ailleurs).

Ce n’est pas un hasard si Alanis et Khate, même si elles sont passées en coup de vent à OD, figurent parmi les candidat(e)s ayant eu le meilleur «après-OD» en termes de contrats et de visibilité depuis que Jay Du Temple est à la barre de l’émission.

Pour que cette initiative fonctionne dans le cadre du jeu, il faudrait que la production revoit complètement sa façon de composer son casting, et permette à un plus vaste éventail d’individus de tenter leur chance, de faire le show, de rencontrer l’amour (même si ce n’est pas avec un grand A). Il faudrait mettre la personne à l’avant-plan de cette démarche, et non seulement son apparence.

Et avouons qu’après l’épisode diffusé ce jeudi 1er octobre, un peu plus de candidats étant un tant soit peu familiers avec l’oeuvre d’Yvon Deschamps, le nombre de Coupes Stanley remportées par le Canadien de Montréal, ou l’histoire du Québec en général, ça ne ferait pas de tort.

Si elle désire aller de l’avant avec cette idée, il y a définitivement plusieurs leçons qu’OD pourrait tirer de L’amour est dans le pré, par exemple, qui choisit ses participants en fonction de leurs motivations.

On ne doit évidemment pas s’attendre à ce qu’autant de couples durables se forment après coup, mais conserver l’essence du jeu tout en prenant totalement en considération les enjeux et les sensibilités d’aujourd’hui est en soi assez facile à réaliser.

L’immense potentiel de la maison mixte

Pour la première fois dans l’histoire d’Occupation Double, il y a une maison mixte. Et les candidats doivent tenter d’y accéder pour obtenir d’importants privilèges, dont l’immunité. Rien de moins.

La maison mixte rappelle d’ailleurs vaguement la fameuse chambre du patron qui avait permis au seul et unique Sébastien Tremblay d’éviter une élimination certaine durant les premières semaines de la quatrième saison de Loft Story.

Cela explique peut-être pourquoi Vincent a décidé d’imiter la légende vivante de la téléréalité québécoise en s’adressant directement aux téléspectateurs par l’entremise de la caméra de la salle de bain.

Plus encore, ce simple changement dans la dynamique des maisons pourrait potentiellement créer une petite révolution et permettre une réelle participation de candidats issus de la communauté LGBTQ+.

Imaginez une saison où un nombre égal de participants hétérosexuels et LGBTQ+ se côtoieraient dans les maisons. Tout simplement.

Non seulement OD pourrait élargir son auditoire de façon significative, mais un tel ajout représenterait également une évolution majeure dans la simple façon de jouer le jeu, de développer des stratégies et de former des alliances.

On lance l’idée comme ça, madame la productrice.

Car ce qu’il y a de formidable avec Occupation Double, c’est qu’il s’agit d’un show en constante évolution, prenant bonne note de ses failles pour les corriger ou - au pire - les contourner la saison suivante.

Nous ne sommes plus à l’époque où l’émission ne servait qu’à vendre du rêve en présentant des hommes, des femmes et des paysages sortis tout droit des pages de magazines de mode et de voyage.

Le temps n’est plus aux essais. Le public veut autre chose, et le fait savoir clairement. La balle est dans le camp de la production.

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