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Ce dessin va droit au coeur de tous les parents en télétravail

«Cela me rend triste», écrit l'enfant de six ans au haut de la feuille. 😥

En début de cette soirée de mi-décembre, Priya Amin travaille à la maison, comme elle le fait depuis le début de la pandémie, au printemps. Son fils Kirin, alors âgé de six ans, lui demande si elle a terminé. Amin, pdg de la société virtuelle de garde d’enfants Flexable, lui répond qu’elle a encore du travail à faire.

Une dizaine de minutes plus tard, il revient dans la pièce et lui tend un dessin avec deux personnages. Elle le félicite, puis regarde de plus près. Elle y trouve une reproduction de la scène qui vient de se passer, où l’enfant demande: «Maman, tu as fini?»

La maman répond «non», les yeux fixés sur l’écran, les mains tendues comme si elle tapait sur un ordinateur. En haut, l’enfant a écrit: «Ça me rend triste !!!!!!»

«Ça m’a fait comme un coup de poing à l’estomac», raconte Amin au HuffPost Canada.

Le fils de Priya Amin, Kirin, a dessiné sa mère travaillant de la maison.
Courtesy of Priya Amin
Le fils de Priya Amin, Kirin, a dessiné sa mère travaillant de la maison.

Ce genre de scénario se déroulant régulièrement chez elle, elle a été envahie d’un sentiment de culpabilité.

Son mari travaillait alors en même temps, et leurs responsabilités professionnelles les empêchaient de passer autant de temps de qualité qu’ils l’auraient souhaité avec leurs deux enfants. Mais ils n’avaient pas le choix - comme les parents du monde entier, ils doivent travailler, s’occuper des parents, enseigner, cuisiner, nettoyer et gérer le stress associé à ce qui se passe dans le monde. Le tout depuis la maison, et sans interruption.

Pour les deux parents, le travail à distance signifie que les courriels et les messages après les heures de travail grugent le temps en famille. C’est un poids lourd à porter.

«Cela me rend un peu triste, parce que j’ai l’impression que nous tous, en particulier les parents qui travaillent, sentons que nous devons assumer cela seuls», souligne Amin.

Elle a partagé le dessin de Kirin dans un groupe où elle et ses collègues discutent de choses qui ne sont pas liées au travail, simplement pour maintenir un lien humain. Plusieurs ont été touchés, et ils l’ont encouragée à écrire à ce sujet. L’article qu’elle a publié sur LinkedIn est rapidement devenu viral.

Depuis lors, Amin a reçu des commentaires de parents du monde entier qui s’identifient aux difficultés reliées au fait d’être parents pendant une pandémie.

«Je voulais vraiment leur offrir ce réconfort: “Hé, nous nous sentons tous vraiment merdiques à ce sujet en ce moment”» lance-t-elle.

Le dessin l’a également amenée à réfléchir à l’impact de la pandémie sur les enfants. «C’est aussi une vision de la santé mentale de nos enfants», dit-elle. «Une grande partie de leurs communications et de leurs interactions, en particulier à cet âge doux et tendre de 5, 6, 7 ans, passe par les images.»

Pour ses enfants, «chaque jour est un jour différent». Il y a des jours où la pandémie est difficile pour eux, et «il y a des jours où j’ai l’impression qu’ils s’épanouissent et se portent bien». Selon elle, les bons jours sont ceux où elle prend plus de pauses et leur parle plus souvent - même si cela signifie moins de productivité au travail. Un compromis constant.

“«J'ai l'impression que nous tous, en particulier les parents qui travaillent, nous sentons que nous devons assumer cela seuls.»”

- Priya Amin

«Je pense que nous demandons à nos enfants d’être autonomes beaucoup plus tôt que ce avec quoi nous sommes à l’aise et plus tôt qu’ils n’en sont capables», dit-elle. Cette culpabilité de ne pas être productif au travail ou de ne pas être un parent assez attentif ne disparaîtra jamais vraiment. Mais pour Amin le moyen le plus efficace pour y faire face a été de se faire entendre.

«C’est peut-être juste moi, mais je veux simplement le diffuser autant que possible», explique-t-elle. «Être honnête par rapport à ce que vous ressentez est, du moins de mon point de vue, la chose la plus saine que vous puissiez faire. Intérioriser cette culpabilité ou la garder pour soi ou se sentir comme “j’ai besoin de l’absorber, j’ai besoin d’être plus fort” - ce n’est pas la bonne façon d’aborder cela.»

Elle suggère à d’autres parents de communiquer entre eux pour obtenir du soutien et, surtout, de parler à leur employeur de leurs défis.

Elle s’inquiète des effets durables de la pandémie sur les femmes sur le lieu de travail. La participation canadienne à la population active a chuté de près de 5% entre février et mai, principalement parce que ce sont les femmes qui ont quitté leur emploi pour s’occuper des enfants. Et les femmes racisées font face à des taux de chômage encore plus élevés que les femmes blanches.

«S’il y a un cri de ralliement collectif autour du besoin de soutien, d’offrir plus d’aide pour la garde d’enfants, d’en faire plus pour la santé mentale et pour le bien-être, cela va atténuer cette culpabilité», croit-elle.

«Cette culpabilité est entretenue par la société.»

Ce texte initialement publié sur le HuffPost Canada a été traduit de l’anglais.

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