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Demande d'injonction contre l'installation d'une synagogue controversée à Outremont

Un groupe de citoyens allègue que l'arrondissement a bafoué son propre règlement interdisant l'ajout de lieux de culte sur l'avenue Bernard.
Photo d'archives de Juifs orthodoxes.
Philippe Lissac via Getty Images
Photo d'archives de Juifs orthodoxes.

Un groupe de citoyens montréalais s'adresse aux tribunaux pour bloquer l'installation d'une nouvelle synagogue sur l'avenue Bernard, à Outremont. Ils estiment que l'entente signée par l'arrondissement en février est illégale et bafoue à la fois la réglementation en vigueur et la volonté citoyenne exprimée par référendum.

Le projet pour installer une synagogue dans un édifice commercial de l'avenue Bernard est à l'origine d'un référendum qui a interdit les nouveaux lieux de culte sur les artères commerciales à Outremont, en novembre 2016. Or, l'arrondissement s'est entendu avec le promoteur Michael Rosenberg le mois dernier afin de permettre la construction de la synagogue moyennant certaines modifications au projet.

Le maire d'arrondissement Philipe Tomlinson affirme agir ainsi pour éviter un procès coûteux à l'issue incertaine. Il semble toutefois qu'il ne pourra s'en tirer, puisqu'un groupe de cinq citoyens a déposé une demande d'injonction pour arrêter les travaux.

Cet édifice de l'avenue Bernard, à Outremont, deviendra une synagogue à la suite d'une entente hors cour entre l'arrondissement et le propriétaire.
Capture d'écran - Google Street View
Cet édifice de l'avenue Bernard, à Outremont, deviendra une synagogue à la suite d'une entente hors cour entre l'arrondissement et le propriétaire.

Le groupe composé de Micheline Larivée, Marc Poulin, Colin Royle, Jean-Guy Trinque et Pierre Gagné demande à la cour d'annuler à la fois l'entente et les demandes de permis de M. Rosenberg.

«Gel» des permis en vigueur... ou pas?

Les citoyens allèguent que la demande de permis déposée par M. Rosenberg le 4 avril 2016 n'est pas valide, puisqu'un gel des demandes de permis était alors en vigueur. L'arrondissement avait effectivement adopté un règlement pour interdire les lieux de culte un peu plus d'un mois auparavant et prévoyait le faire approuver par référendum pour qu'il puisse entrer en vigueur.

Lorsqu'un tel règlement est adopté, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit que «aucun plan de construction ne peut être approuvé ni aucun permis ou certificat accordé pour l'exécution de travaux ou l'utilisation d'un immeuble qui, advenant l'adoption du règlement faisant l'objet de l'avis de motion, seront prohibés dans la zone concernée». Ce «gel» des permis s'applique pour les quatre mois suivant l'adoption du règlement, ou jusqu'à ce que le règlement soit approuvé par référendum.

Mais la question ne sera pas simple à trancher à cause des nombreux revirements depuis le début de l'affaire, en 2015.

Chronologie des faits

  • Le 2 novembre 2015, l'arrondissement d'Outremont a présenté pour la première fois son projet d'interdiction des nouveaux lieux de culte sur les artères commerciales, comme l'avenue Bernard.
  • Le 29 février 2016, après une consultation, le règlement est adopté et l'arrondissement se prépare à le soumettre à un référendum
  • Le 1er avril 2016, l'ordre du jour du conseil d'arrondissement indique que le règlement sera retiré à cause d'un possible vice de procédure et qu'un nouveau projet de règlement sera présenté.
  • Le 4 avril 2016, Michael Rosenberg dépose une demande d'agrandissement pour un édifice de l'avenue Bernard. Le mikvé, un bain rituel, qui s'y trouve déjà serait transformé en synagogue.
  • Le 4 avril 2016, le règlement adopté en février est retiré. Un nouveau règlement est présenté et le processus de consultation recommence.
  • Le 20 novembre 2016, les résidents d'Outremont approuvent par référendum l'interdiction des nouveaux lieux de culte sur les rues commerciales.

Le 4 avril 2016, quelques heures après le dépôt de la demande de M. Rosenberg, le conseil d'arrondissement a retiré le règlement qu'il venait d'adopter parce que certaines cartes du secteur n'avaient pas été déposées pendant le processus de consultation, ce qui risquait de rendre toute l'affaire caduque. Lors de la même séance du conseil, les élus ont déposé un nouvel avis de motion pour relancer toute l'affaire.

Selon la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, cet avis de motion provoque un nouveau «gel» des permis pour les deux mois suivants.

Entre autres choses, la Cour devra donc trancher à savoir si la période d'interdiction des permis s'est poursuivie sans interruption tout au long du processus. Elle devra aussi déterminer si le gel s'appliquait depuis l'adoption du premier règlement, même si celui-ci comprenait peut-être un vice de procédure.

«[M. Rosenberg] cherche à tirer avantage d'une simple erreur administrative pour obtenir un permis de manière à contourner l'intention clairement exprimée par l'arrondissement plusieurs mois auparavant et ainsi frustrer l'objectif légitime qu'il poursuivait, à savoir, de protéger le caractère commercial de l'avenue Bernard, lequel constitue un attrait majeur pour les résidents de l'arrondissement»- extrait de la demande d'injonction

Autre recours

Cette demande d'injonction s'ajoute à un autre recours intenté par Karim Ben Rhouma, également résident d'Outremont.

M. Ben Rhouma reproche à l'arrondissement d'aller à l'encontre du processus démocratique. Il accuse le maire Tomlinson d'avoir agi de mauvaise foi, citant une réunion du parti Projet Montréal où il aurait exprimé son intention de contourner la réglementation.

Philipe Tomlinson ne souhaite pas commenter l'affaire puisqu'elle est judiciarisée. En entrevue au HuffPost Québec au lendemain de la signature de l'entente, il déplorait le climat de méfiance et l'attitude de «mauvais voisins» dans cette affaire.

Le HuffPost Québec a aussi joint M. Rosenberg. Il ne souhaite pas commenter la demande d'injonction, ni les tensions qui existent entre la communauté juive et une partie des résidents d'Outremont.

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