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En période de COVID-19, comment faire face au deuil et affronter les Fêtes de fin d'année

Pour tous ceux qui ont perdu un être cher cette année, que la cause se rapporte ou non au coronavirus, la période des Fêtes pourrait se révéler particulièrement éprouvante. Voici quelques conseils pour vous aider à surmonter votre peine.
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Pour les familles et les proches des victimes de la pandémie de COVID-19, cette période des Fêtes pourrait bien ressembler à un cauchemar.

Professeure d’art dans le New Jersey, Melissa Wherry avoue redouter la période des Fêtes qui approche. Son grand-père est décédé de la COVID-19 le 4 avril dernier, et les règles de distanciation sociale n’ont pas permis à la famille d’organiser de véritables funérailles. Ses proches ont dû se contenter d’un enterrement diffusé sur Zoom.

Melissa a perdu son père il y a trois ans, deux jours seulement après Noël. Les Fêtes étaient donc déjà une période difficile pour elle, mais cette année, elle appréhende encore plus ce moment douloureux qui approche à grands pas. Tout comme pour les funérailles de son grand-père, à Noël, les membres de sa famille ne pourront pas se réunir et se recueillir pour surmonter ce deuil ensemble. Pour Melissa, la pilule est dure à avaler.

«Je suis terrifiée à l’idée d’être en vacances, explique-t-elle. Ma mère vit seule, et je ne pourrai pas la serrer dans mes bras ni la réconforter, alors que ce sont les premières Fêtes de fin d’année qu’elle passe sans mon grand-père, à une époque qui lui rappelle déjà la mort de mon père. Ça me brise le cœur à un point qu’il m’est difficile d’expliquer.»

Si, comme Melissa, vous n’avez pas encore fait votre deuil et que la douleur est encore vive, il se peut que l’ambiance festive de Noël et la pression quasi constante d’être positif, joyeux et rayonnant se révèlent particulièrement démoralisantes.

Toutefois, comme le rappelle Amanda Darnley, psychologue à Philadelphie, ressentir du chagrin et faire son deuil pendant les Fêtes après avoir perdu un être cher, à cause de la COVID-19 ou d’un autre drame, ne fait pas de vous une personne moins positive, cela fait juste de vous un être humain.

«Je pense qu’il est important, particulièrement cette année, de reconnaître à quel point un deuil peut s’apparenter à un combat, confie-t-elle au HuffPost, et les Fêtes rendent le rendent encore plus redoutable, car la réalité de notre chagrin se confronte à la joie et au bonheur ambiant. Cet affrontement peut se révéler très brutal, surtout si c’est la première fois que vous passez Noël sans l’être aimé.»

C’est en tout cas ce que ressent Annie Helmer. Fin octobre, son père est décédé de la COVID-19. Un mois plus tard, cette directrice générale de l’industrie alimentaire résidant dans le Wisconsin en est encore aux premiers stades de son deuil. Jusqu’ici, son emploi du temps chargé ne lui a guère laissé le temps de penser à la mort de son père.

«Avec tout ce qui se passe en ce moment, j’ai tellement de choses à faire au travail que je n’ai pas vraiment eu le temps de me poser et de laisser libre cours à mes émotions», explique-t-elle.

«Il m’arrive de pleurer dans un coin pendant quelques minutes avant de me ressaisir et de me remettre au travail. Je ne sais pas si c’est une bonne chose, mais c’est malheureusement tout ce que je peux me permettre en ce moment.»

«Je me surprends à l’appeler»

Le père d’Annie adorait que ses enfants viennent passer les vacances chez lui. Depuis sa mort, sa fille s’est plusieurs fois trouvée sur le point de l’appeler pour organiser les festivités ou simplement pour discuter.

«Je me surprends à vouloir lui téléphoner, et quand je me rends compte qu’il n’y aura personne au bout du fil, je me sens au plus bas, confie-t-elle. J’ai probablement plus pleuré ces 23 derniers jours qu’au cours de tout le reste de ma vie.»

Et elle n’a pas que son deuil à gérer à l’approche des Fêtes. Il y a la colère aussi.

«Bien évidemment, le pays est divisé au sujet de la COVID-19 et de la manière de s’en protéger, ajoute-t-elle. Je ne peux pas m’arrêter de penser que si les gens et notre gouvernement avaient pris la situation au sérieux dès le départ, mon père serait peut-être encore parmi nous aujourd’hui.»

Face aux événements de l’année 2020, tristesse et colère sont le lot de nombreuses familles, même de celles qui n’ont pas perdu de proche à cause de la COVID-19, affirme Hope Edelman, coach spécialisée dans le deuil et autrice du livre «The Aftergrief» (L’après-deuil), sorti récemment.

«La tendance est forte, en période des Fêtes, à se concentrer sur ce qui nous manque, sur ce que nous avons perdu au cours de l’année qui s’est écoulée: nos proches, notre emploi, notre vie sociale, nos cours en classe, notre sentiment de pouvoir nous sentir en sécurité», explique-t-elle au HuffPost.

«En ce moment, le monde est complètement déstabilisé. Il n’est donc pas étonnant que les gens éprouvent un certain déséquilibre émotionnel.»

«Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de traverser cette épreuve, ajoute-t-elle. Le deuil est un processus différent pour chacun de nous. Il ne s’exprimera pas de la même manière pour vous et pour les membres de votre famille ou vos amis. Il est important de ne pas brimer vos émotions, quelles qu’elles soient.»

Annie Helmer apprend cette leçon au jour le jour. À Noël, elle organisera un petit souper avec son frère. «Je suis sûre que nous allons nous remémorer les Fêtes que nous avons passées avec mon père», confie-t-elle, mais ils ne veulent pas se mettre trop de pression.

«Je pense que vous devez prendre le temps de faire votre deuil à votre manière, déclare-t-elle. Il n’y a ni chronologie ni feuille de route pour ce genre de choses. Et il n’y a aucune honte non plus à demander de l’aide ou à en parler.»

Il existe d’autres moyens de vous aider à surmonter votre peine. Dans la suite de cet article, Amanda Darnley, Hope Edelman et d’autres spécialistes vous livrent des conseils pour mieux faire face à votre premier Noël sans cet être qui vous manque.

«Le deuil est déjà assez dur, ne vous réprimandez pas de ne pas l'avoir encore surmonté», a déclaré la psychologue Amanda Darnley.
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«Le deuil est déjà assez dur, ne vous réprimandez pas de ne pas l'avoir encore surmonté», a déclaré la psychologue Amanda Darnley.

Acceptez l’impact du deuil sur votre vie

Après une année aussi chaotique, si vous avez perdu un être cher, il est essentiel de prendre conscience de ce que vous ressentez: le bon, le mauvais, le monstrueux et le douloureux. Regardez vos sentiments en face, sans vous juger.

Comme l’explique Amanda Darnley, «le deuil est une épreuve suffisamment difficile en elle-même, sans avoir à se reprocher de ne pas encore avoir réussi à s’en remettre. De la même manière, inutile de vous en vouloir si la joie ou l’exaltation viennent émailler votre chagrin en cette période des Fêtes. Faites preuve d’indulgence envers vous-même et laissez vos émotions s’exprimer. Rappelez-vous qu’il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réactions.»

Rendez hommage au défunt

Ayez de petites attentions propres à Noël pour la personne qui vous a quitté. Votre père aimait le magret de canard au miel? Pourquoi ne pas en préparer cette année, au lieu de la traditionnelle dinde? Votre grand-mère avait des goûts un peu particuliers en matière d’arbres de Noël, préférant une version rose fluo en plastique? Honorez sa mémoire en décorant votre intérieur d’un faux sapin… rose, si le cœur vous en dit.

Comme l’explique Hope Edelman, en cette période de partage, ces petites attentions vous aideront à vous focaliser sur ce qu’il vous reste de cet être cher plutôt que sur son absence.

«En cette année si particulière, où les traditions familiales vont parfois devoir être annulées ou reportées, où un être cher va peut-être nous manquer pour préparer ou célébrer les fêtes, il peut être très réconfortant de créer un nouveau rituel unique, explique-t-elle. Si c’est un succès, songez à recommencer l’année suivante.»

Dans les moments particulièrement éprouvants, portez votre attention sur autre chose

Lorsque la charge émotionnelle se fait trop lourde ou que vous devez faire face à des difficultés particulières, essayez des exercices de pleine conscience, en pratiquant la «méditation zoom-dézoom». En quoi cela consiste exactement?

«L’attention sélective (zoom) consiste à focaliser son attention sur “un objet précis à un moment déterminé” l’odeur de café qui emplit la pièce le matin ou la tasse qui est en train de vous réchauffer les mains, par exemple, explique Amanda Darnley. Ces moments vous donneront un peu de répit et vous permettront de penser à autre chose.»

L’attention élargie (dézoom) consiste au contraire à envisager le moment présent au regard de votre vie dans son ensemble, voire de «l’humanité ou même de l’univers dans son ensemble», ajoute-t-elle.

«Ça ne rendra pas votre situation moins pénible, mais cela pourrait vous aider à vous rappeler que la vie ne se résume pas au moment difficile que vous êtes en train de vivre», précise la psychologue.

Pensez à ce que le défunt souhaiterait pour vous

En cette saison si particulière, vous devez laisser vos émotions s’exprimer, mais vous devez aussi vous concentrer sur le positif. C’est certainement ce que le défunt aurait voulu, déclare Allen Klein, auteur du livre «Embracing Life After Loss: A Gentle Guide for Growing Through Grief» (Reprendre goût à la vie après un deuil: un guide tout en douceur pour faire face à la douleur).

«Demandez-vous ce que la personne que vous avez perdue aurait voulu pour vous. Quand on leur pose la question, la plupart des gens répondent qu’elle souhaiterait qu’ils aillent de l’avant, qu’ils soient joyeux et qu’ils profitent de la vie plutôt que de ressasser leur chagrin pour toujours», souligne-t-il.

Pour se mettre dans cet état d’esprit, Allen Klein suggère de considérer tout ce pour quoi nous pouvons être reconnaissants: le toit que nous avons au-dessus de la tête, notre famille, nos enfants, notre conjoint, nos amis, même si, pour la plupart d’entre eux, nous devons nous contenter de discussions sur Zoom cette année.

«Vouloir ce qui vous manque, c’est gaspiller ce que vous avez», conclut-il.

Prenez soin de vous

Prenez soin de votre corps pendant ces vacances. Comme l’explique Hope Edelman, le deuil a des répercussions sur notre système somatique et la fatigue physique peut se traduire par un épuisement émotionnel et mental.

«Reposez-vous davantage, buvez beaucoup d’eau et sortez vous promener pour garder votre corps en mouvement, conseille-t-elle. Si vous pouvez faire des exercices cardio, c’est encore mieux. Les endorphines sont des alliées contre la tristesse.»

Si le cœur vous en dit, faites appel à un thérapeute

Les Fêtes peuvent être particulièrement éprouvantes. C’est peut-être donc le bon moment d’envisager une thérapie à distance pour vous aider à apaiser votre douleur, qu’elle soit récente ou restée en sommeil pendant des années.

«Je sais à quel point il peut être difficile de se lancer dans une thérapie en cette saison agitée, où les gens sont souvent déjà débordés, mais ça peut être tellement bénéfique, explique Amanda Darnley. Il n’est pas inhabituel de devoir “essayer” plusieurs thérapeutes avant de trouver “le bon”, c’est donc le moment idéal pour entamer vos recherches et trouver la personne qu’il vous faut avant le rush des vacances.»

«Si vous avez perdu quelqu’un, une thérapie engagée au bon moment peut vraiment vous aider à garder la tête hors de l’eau, surtout en cette période particulièrement stressante», conclut Amanda Darnley.

Cet article, publié sur le HuffPost États-Unis, a été traduit de l’anglais par le HuffPost France.

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