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J'ai eu le coronavirus et aujourd'hui, je vais mieux

Je vais de mieux en mieux, la fatigue me quitte, mais il me reste une grande interrogation: suis-je encore positive?
Je vais assez bien, toujours très fatiguée et une toux persistante mais ça va. Mon mari et ma fille n’ont aucun signe, l’ont-ils? On ne saura pas même si on pense que la promiscuité de la première semaine laisse peu de chance au doute
Boy_Anupong via Getty Images
Je vais assez bien, toujours très fatiguée et une toux persistante mais ça va. Mon mari et ma fille n’ont aucun signe, l’ont-ils? On ne saura pas même si on pense que la promiscuité de la première semaine laisse peu de chance au doute

Nous sommes le jeudi 27 février, belle journée d’hiver et je suis en vacances. Je vais exceptionnellement retrouver des collègues au travail pour un verre de départ et à ce moment-là, rien ne laisse présager que ma vie et nos vies vont être bouleversées.

Bien sûr que je m’intéresse à l’actualité sur le nouveau coronavirus, la Chine me préoccupe et nos voisins italiens également, mais ça semble peut-être encore un peu abstrait, loin. On rit, on mange et trinque une belle soirée de partage en quelque sorte. Le mot partage prendra un tout autre sens quelques jours après.

Premiers symptômes

Dimanche 1er mars, je commence à ne pas me sentir très bien, grosse fatigue, mal à la gorge et surtout plein de frissons. Mon mari me taquine: «Tu n’as pas envie de reprendre le boulot demain!»

Lundi 2 mars, je ne vais vraiment pas bien, je me sens incapable d’aller au travail mais depuis quelques jours, on préconise de se renseigner au téléphone en cas de symptômes avant de se rendre chez le médecin. J’appelle donc, après un bref questionnement du médecin régulateur, je peux aller voir mon docteur directement. Rendez-vous pris et je ressortirai sereine avec un arrêt pour une grippe saisonnière.

Ma semaine se passe, lentement, au rythme de mes endormissements et assoupissements, du lit au canapé. Sans rien pouvoir faire d’autre, je commence à tousser, puis un peu de problèmes intestinaux se greffent, bref je patiente, la fièvre fait le yoyo, aidée par le paracétamol.

Le vendredi 6 mars, je vois dans les informations locales qu’un 1 cas est détecté dans notre département, et la personne est en réanimation. Je tique un peu car on se dit que c’est tout proche mais rien d’alarmant, il y a un cas, point.

L’appel aux urgences

17 heures, ma collègue et amie me contacte en urgence. La personne hospitalisée, c’est un de nos collègues, il n’était pas à ce fameux verre de départ, mais il a côtoyé plusieurs personnes qui y étaient. J’appelle donc, par prudence.

Et de là tout s’enchaîne rapidement. On me conseille de venir le lendemain, samedi 7 mars à midi, pour le test au coronavirus. (Test pas agréable mais supportable avec goupillon dans une narine). J’avoue être perplexe, ma fille a une soirée avec 18 camarades, et la décision qu’elle puisse y aller est suspendue au résultat du test bien évidemment.

Pendant quelques heures, c’est de la culpabilité qui s’empare de moi, puis je me raisonne, non je n’ai sûrement qu’une simple grippe, faut pas psychoter!

Le résultat positif

18 heures: le résultat tombe, un médecin me contacte, je suis positive et l’hôpital m’attend pour une hospitalisation dès 19h30. Là, tout se chamboule, mon mari et ma fille sont asymptomatiques, mais ils doivent rester confinés et moi je me retrouve à l’isolement dans cette chambre d’hôpital! Je dois préciser que c’est surtout dû à mon obésité que je suis en observation car c’est un facteur aggravant.

J’y resterai trois jours, trois longs jours où vos seuls interlocuteurs directs sont super équipés et ne vous approchent que peu. Trois jours à cogiter, à avoir peur de mal respirer d’un coup, mais les constantes sont rassurantes, ouf!

Bien sûr, j’ai beaucoup de nouvelles de mon entourage inquiet, puis d’autres de mes collègues sont dans le même cas que moi d’ailleurs, enfermés dans une autre chambre à côté de moi sans le savoir. Le plus dur sera de voir que la direction de mon boulot ne prendra aucune nouvelle directe, pas un courriel, pas un texto, pas un appel! Mais bon, on garde le moral.

Sortie de l’hôpital et confinement de la famille

Nous sommes le mardi 10 mars et je peux sortir, car il va falloir laisser des lits et c’est tout à fait normal. Je ne me sens pas en danger. Donc nous voici confinés avec un arrêt jusqu’au 25 mars pour toute la famille. L’hôpital, au départ, me contacte chaque jour, matin et soir, et dès jeudi, j’ai une application Web qui me suit. Je prends mes constantes (pouls, respiration, température) et elles sont analysées en temps réel.

Je vais assez bien, toujours très fatiguée et une toux persistante, mais ça va. Mon mari et ma fille n’ont aucun signe, l’ont-ils? On ne saura pas, même si on pense que la promiscuité de la première semaine laisse peu de chance au doute. Et les cas s’enchaînent partout, les recommandations fusent, le ton se durcit, oui il faut rester confiné! Mais c’est rien, ça sauve des vies, c’est à notre portée!

Suis-je encore positive?

Je vais de mieux en mieux, la fatigue me quitte, il me reste une grande interrogation: suis-je encore positive? Et là, je n’ai pas de réponse car je ne referai pas de test. Ils n’ont ni les moyens, ni le temps à l’hôpital et je le comprends aisément.

Comme tout un chacun, je vais rester chez moi pour protéger au plus possible les autres, mais dans mon confinement, ce n’est plus la maladie qui hante mes pensées, c’est demain. Comment va t-on se relever, moralement, physiquement, économiquement?

“Mes seules certitudes sont qu’il faut se recentrer sur l’essentiel: la solidarité, la bienveillance, le respect des autres et l’amour des siens, c’est le plus important.”

Dans quel état d’esprit vais-je retourner au travail après m’être sentie «abandonnée»? Je n’ai pas les réponses. Mes seules certitudes sont qu’il faut se recentrer sur l’essentiel: la solidarité, la bienveillance, le respect des autres et l’amour des siens, c’est le plus important.

Je ne peux m’empêcher de penser à ceux qui sont sur le front, je pense sans cesse à leur épuisement et je sais que la seule chose qui puisse les aider là, maintenant, c’est que chacun reste chez soi!

Ce texte a initialement été publié sur le site du HuffPost France.

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