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COP26: le Canada doit légiférer sur les objectifs climatiques pour éviter l’embarras

En tant que société ayant historiquement bénéficié de l'industrie pétrolière et gazière, forte en carbone, nous devons au monde et à nous-mêmes d'utiliser notre richesse et notre ingéniosité pour accélérer notre transition vers un avenir énergétique propre.
Alex Potemkin via Getty Images

Depuis un quart de siècle, chaque fin d’automne marque le début des négociations climatiques de l’ONU. Si 2020 était une année comme les autres, des milliers de négociateurs, de journalistes, de militants, de représentants des Peuples autochtones et d’élus seraient réunis à Glasgow pour la 26e Conférence des Parties (COP26) pour discuter avec soin des politiques à adopter pour nous mener vers un avenir sans danger pour le climat.

2020 devait être l’année de l’ambition, où tous les signataires de l’Accord historique de Paris seraient de retour à l’ONU avec des engagements plus ambitieux. Mais bien sûr, 2020 n’est pas une année comme les autres.

La COP26 aurait constitué une tribune permettant aux pays de présenter les progrès accomplis dans la réalisation de leurs objectifs climatiques et leurs ambitions «à la hausse», en établissant de nouveaux objectifs à atteindre. Bien que tout cela soit encore prévu, le calendrier a été repoussé d’un an à novembre 2021.

Les médias des quatre coins du monde suivent ces négociations. Si la COP26 avait lieu ce mois-ci, comme prévu, on lirait à la une de tous les médias nationaux: «Le Canada n’est pas en voie d’atteindre l’objectif de réduction des émissions convenu à Paris».

Le Canada: l’absence d’imputabilité mène à une performance honteuse

Le Canada continue d’envoyer des messages contradictoires sur les changements climatiques en affirmant qu’il donne la priorité à l’action climatique tout en continuant à subventionner l’industrie des fossiles à la hauteur de 600 millions de dollars par année. Pendant ce temps, d’autres pays comme le Danemark, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni s’en sortent beaucoup mieux. Le progrès de ces États peut largement être attribué à leurs cadres législatifs de responsabilité climatique.

Prenons l’exemple du Royaume-Uni, un pays qui a mis en œuvre une législation sur la responsabilité par le biais de son Climate Change Act de 2008. En rendant ses objectifs climatiques à long terme et ses budgets carbone juridiquement contraignants, les émissions de carbone du Royaume-Uni ont diminué de 38% depuis 1990, alors que celles du Canada ont augmenté de 20,9% sur la même période.

Les éléments clés pour une bonne loi sur le climat canadienne

Le gouvernement libéral a pris un engagement positif en faveur d’une législation sur la cible de zéro émission nette. Nous avons toutefois besoin d’une loi qui indique clairement qui est responsable de quels éléments de l’action climatique, qui rende les acteurs redevables de leurs actions et décisions, et qui est applicable, c’est-à-dire qui prévoie des conséquences en cas de non-respect des engagements.

Qu’est-ce que cela signifie pour le Canada? Tout d’abord, que nous ne fixions pas seulement des objectifs à long terme dans la loi (zéro émission nette d’ici 2050 et un objectif plus ambitieux pour 2030), mais aussi un calendrier d’objectifs à court terme. Des budgets carbone quinquennaux permettront d’établir un calendrier de réduction des émissions de GES, tandis que des rapports d’impact quinquennaux indiqueront comment nous devons nous adapter au changement climatique en tant que pays.

Deuxièmement, nous devons mettre en place un cycle de planification, de compte-rendu et d’évaluation clair et axé sur les résultats, ciblé sur l’atteinte des budgets carbone et les rapports d’impact.

Troisièmement, nous avons besoin d’un système de surveillance par des experts indépendants, sous la forme d’un comité représentant les meilleurs esprits scientifiques et techniques, qui fournira des conseils sur tout - objectifs, budgets, plans - et fera rapport de manière indépendante sur nos progrès.

Une législation qui impose des devoirs explicites aux acteurs responsables pour atteindre ces trois éléments clés rendrait ce gouvernement et les gouvernements futurs redevables de nos objectifs climatiques à court et à long terme. L’établissement d’un processus de conception de plans et de budgets carbone permettant d’atteindre nos cibles de réduction de gaz à effet de serre est la solution pour ne plus jamais manquer un autre de nos objectifs.

L’échec n’est pas une option

Nous ne sommes maintenant qu’à quelques semaines de 2021. Il nous reste ainsi moins d’une décennie pour atteindre et dépasser notre objectif de réduction pour 2030 et pour faire notre part afin d’éviter les conséquences les plus désastreuses et irréversibles de la crise climatique.

Le respect international dont jouit le Canada en tant que leader dans le domaine du climat s’amenuise déjà, car nous continuons à ne pas respecter les objectifs que nous nous fixons. En tant que société ayant historiquement bénéficié de l’industrie pétrolière et gazière, forte en carbone, nous devons au monde et à nous-mêmes d’utiliser notre richesse et notre ingéniosité pour accélérer notre transition vers un avenir énergétique propre. Ce que fait le Canada est important. Et l’échec n’est pas une option.

2020 nous a démontré à quel point notre environnement est profondément lié à notre bien-être physique et sociologique. Nous ne pouvons pas nous permettre de mettre de côté nos engagements en matière de climat pour nous concentrer uniquement sur les mesures de lutte contre la pandémie - il est déjà trop tard et les crises sont trop étroitement liées.

Bien que la COP26 n’ait pas lieu avant un an, nous ne pouvons pas remettre à plus tard des actions drastiques pour réduire nos émissions dans l’intervalle, et nous ne pouvons certainement pas attendre de nous rendre responsables de nos actions.

Signataires

Catherine Abreu, directrice générale chez Réseau Action Climat Canada

Julia Croome, avocate chez Ecojustice

Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales chez Équiterre

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