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Comment j’ai décidé d’oublier mes 46 ans et de me focaliser sur mes 63

Je ne voulais plus faire partie des cinquantenaires qui regrettent le passé, mais des cinquantenaires qui anticipent l’avenir.
Je choisis la pente qui monte. C’est maintenant, que je grimpe. Avant, j’avais mes enfants à porter, puis à supporter; aujourd’hui, je ne porte que moi-même. Je suis plus vieille, mais je suis plus légère. Et plus entraînée. Et je sais lire les cartes topographiques. Et j’ai prévu le ravitaillement.
Véronique Mokski
Je choisis la pente qui monte. C’est maintenant, que je grimpe. Avant, j’avais mes enfants à porter, puis à supporter; aujourd’hui, je ne porte que moi-même. Je suis plus vieille, mais je suis plus légère. Et plus entraînée. Et je sais lire les cartes topographiques. Et j’ai prévu le ravitaillement.

Récemment, enfin depuis quelques années, j’ai souvent fermé les yeux. Je contemplais ma décennie passée, et je me disais philosophiquement que j’allais remettre tout ça à jour. Faire mon grand nettoyage perso. Et rajeunir, l’air de rien. Parmi toutes ces méthodes (plus ou moins naturelles) et les «vous n’avez qu’à», j’allais bien trouver mon bonheur.

Ma référence, c’était 46 ans.

C’est top, 46 ans. Avant la ménopause. Presque avant les rides et les cheveux blancs. Les enfants qui grandissent, le boom professionnel. Des tas de choses à faire, et pas le temps de réfléchir.

Et voyez, ça n’est pas trop jeune non plus.

46 ans, mon idéal d’avant

C’est idéal, en fait: certes, on a déjà quelques kilos en trop et quelques illusions en moins, mais juste ce qu’il faut pour se convaincre que c’est réparable. Effaçable. On est dans la parfaite moitié de notre espace-temps personnel.

Et puis au bout d’un moment, je me suis réveillée. J’ai fini par me comparer, les yeux dans les yeux, aux vraies femmes de cet âge. Et là, surprise. Le verdict est sans détour. Non seulement j’ai 10 ans de plus ou presque, mais je me sens plus vieille. C’est évident. Et je me sens plus mûre. C’est indéniable. Plus simple (mais pas plus basique). Plus sûre de moi (enfin, je fais comme si).

Mais surtout: je me sens plus libre.

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Le fait est que les femmes de 46 ans, je n’arrive pas à les détecter. Elles se cachent entre deux mondes. Alors que je démasque instinctivement celles de 55. Quelle que soit leur allure. Celles qui sont très belles, et celles qui sont usées. J’ai un radar qui me dit que cette courbure des épaules, cet air détaché, ces mains trop sèches, c’est de mon âge. On est pareilles.

Et je vois parfois quelque chose qui transparait. Une lueur qui s’allume.

Elle est dans le regard, dans cet éclat plus vif, cette individualité assumée. Qui dit «je m’en balance de ce que tu penses, moi je regarde devant et je ne passe plus mon temps à me la jouer». Et puis encore «tu verras, c’est mieux quand on vieillit, tu n’as plus à te justifier, vis ta vie et point barre».

J’ai mis une croix sur ces supposés objectifs que l’on se force à accomplir avant le milieu de vie: cumuler un maximum d’expériences, élever une famille, grimper sans cesse et se la couler douce ensuite, les 4 ou 5 décennies restantes.

Pourquoi tout faire avant 50 ans et se tourner les pouces ensuite?

Alors que c’est précisément à ce moment-là que l’on se détache de ses obligations maternelles? Que l’on retrouve une liberté que l’on n’avait pas eue depuis… le jour où l’on a accouché de son premier enfant? Que l’on a acquis une expérience précieuse et réelle de la vie?

Allez, je vous rassure: si les hommes ne vous voient pas à 55 ans, ils ne vous verront pas non plus à (faussement) 46. Si vous voulez leur plaire (ou si vous voulez vous plaire à vous, même si c’est plus difficile), inutile de faire semblant d’être ce que vous n’êtes plus.

Il faut juste changer de catégorie.

Eh oui. On ne fait pas courir des champions du 100 mètres avec des marathoniens. Trouver la catégorie qui nous va, avec d’autres gens normaux, c’est-à-dire comme nous, c’est la moitié du succès.

Je ne voulais pas faire partie de la catégorie has-been, mais de celle des nouvelles femmes. Et quitter le statut de mère-désabusée-qui-ne-veut-pas-vieillir pour endosser celui de femme-d’aujourd’hui-en-perpétuel-renouvellement.

Je ne voulais plus faire partie des cinquantenaires qui regrettent le passé, mais des cinquantenaires qui anticipent l’avenir.

Alors j’ai pris une grande décision: pourquoi ne pas m’identifier à une autre tranche d’âge? Carrément? Abandonner la référence des «46» et accélérer dans le temps, comme au cinéma?

Ce sera 63 ans ma référence

Tenez, posons le jalon à 63 ans. Ou à 70, ça nous laisse le temps de nous préparer. Et répétez après moi:

«À 63 ans, je veux être la plus belle, la plus futée, la plus créative possible. Je veux être au top de moi-même».

«Et quand j’en approcherai, je regarderai en avant, de nouveau. Et encore après».

«Car à partir d’aujourd’hui, je ne vise que ce que je peux atteindre: le futur».

Je n’ai pas envie de regretter le bon vieux temps. Ce bon vieux tempsces bonnes vieilles années… elles sont là, devant moi. J’ai passé la barre de la moitié, c’est net et définitif. Et désormais, je n’ai pas l’intention de descendre la pente de mon existence en freinant de toutes mes forces. En m’épuisant à donner le change sans en avoir l’air.

Je choisis la pente qui monte. C’est maintenant que je grimpe. Avant, j’avais mes enfants à porter, puis à supporter; aujourd’hui, je ne porte que moi-même. Je suis plus vieille, mais je suis plus légère. Et plus entraînée. Et je sais lire les cartes topographiques. Et j’ai prévu le ravitaillement.

Je ne veux plus tenter tout mon possible pour 1) retourner à la case «46», 2) espérer y rester figée à tout jamais, engloutie dans un formol de ma propre composition et 3) me désintégrer sur place, à force d’ennui et de longueur du temps.

J’ai hâte à mes 63 ans

Car l’avenir proche, c’est quoi?

Exactement.

C’est 63 ans.

D’abord, j’en suis plus près que des 46. Faites le calcul.

Et puis 63 ans, je suis sûre et certaine d’y parvenir un jour, gratuitement, sans chirurgie ni collagène. C’est un objectif parfaitement atteignable, et même impossible à rater.

Alors que 46 ans… je vais devoir sacrément débourser pour y retourner.

Et en plus je vais avoir l’air d’une imbécile, c’est clair.

Est-ce que les ados de secondaire 5 veulent repartir en première année? Grand Dieu, non. Ils ont bossé comme des dingues pour atteindre le cégep, pourquoi voudraient-ils ressembler à ces petits?

Nous c’est pareil. On a atteint l’heure de notre cégep, version 55, et on se dirige à grands pas vers notre avenir. Mais cette fois, on y réfléchit bien mieux que lorsqu’on avait 18 ans. On ne suit pas ce que disent nos parents ou nos copines. On suit notre voie à nous. C’est la seule qui nous amènera à bon port; on le sait d’instinct, et on le sait d’expérience.

Cette fois, je me retrousse les manches. C’est fou, j’ai hâte d’avoir 63 ans!

Vous pouvez suivre Véronique Mokski sur son blog: Les Nouvelles Femmes.

Ce texte a été publié originalement sur le HuffPost France.

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