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La fois où la maman que je suis a voulu se remettre en forme

Surprise: gérer deux enfants de trois ans et moins, quand on est en béquilles, ce n'est pas si évident.
Une combinaison gagnante.
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Une combinaison gagnante.

Quand ma plus jeune fille a eu un peu plus d’un an, j’ai eu envie de me remettre à la balle-molle. Je dis «remettre», comme si j’étais une joueuse étoile, mais en fait (si on ne compte pas ma saison alors que j’avais six ans et que j’haïssais ça, mais que mon père m’avait forcée à terminer parce que je l’avais commencée), j’avais seulement joué à la balle-molle pendant une demi-saison, il y a quatre ans. J’avais arrêté après avoir découvert que j’étais enceinte. Et les trois années suivantes, j’étais soit trop occupée avec mon premier bébé, soit enceinte du deuxième.

Mais l’été dernier, je me sentais d’attaque. J’avais envie de me «remettre en forme». De bouger. Quoi de mieux que cette ligue amicale avec des comparses d’improvisation?

La dernière fois que j’avais fait du sport, c’était presque deux deux ans auparavant. Un peu dans le même esprit, j’avais voulu me remettre en forme après ma première grossesse et je m’étais mise (pendant quelques mois) au crossfit. Ç’avait fait rire mes amis, que je me mette au crossfit (et je les comprends).

J’aimerais sincèrement que les mamans qui trouvent le temps de s’entraîner trois fois par semaine me disent comment elles font.

Après le retour au travail, quand la routine du va-reconduire-les-enfants-à-la-garderie-métro-boulot-va-chercher-les-enfants-à-la-garderie-pus-de-dodo embarque, personnellement, je ne trouve pas le temps/l’énergie/la motivation pour aller m’entraîner. Et même si toutes les fit moms de ce monde essaient chaque jour de me prouver sur les réseaux sociaux qu’avoir eu un enfant, ce n’est pas une raison pour avoir le ventre un peu flasque et fatigué... ben moi, j’ai le goût de continuer à penser que oui, c’est une bonne raison.

En mai dernier, donc, je suis tout excitée de recommencer à «faire du sport» (c’est-à-dire sprinter deux-trois fois par match et aller attendre une balle dans un champ). Je me dis: «heille, je ne vais pas remettre mes vieux souliers de course tellement usés que la semelle est complètement lisse». Je vais donc m’acheter des souliers à crampons, POUR NE PAS GLISSER ET ME BLESSER. Parce que, tsé, ça serait vraiment bête de me blesser, avec deux jeunes enfants à la maison. Je me souviens de m’être dit ça.

Mais il s’avère que je n’ai jamais porté ça, moi, des souliers à crampons. Jamais. Je les ai un peu oubliés. Et quand je me suis retournée, dans le champ, pour relancer une balle, mes crampons sont restés pris dans le gazon. Et mon genou et moi, on a continué.

Je me rappelle être assise sur le banc. Les larmes coulent sur mes joues, pendant que je me demande: comment je vais m’occuper de mes enfants? La plus petite ne marche pas encore! Comment je vais faire?

Étant déjà passée par là dans une autre vie (alors que j’étais une basketteuse étoile), je me doutais qu’il s’agissait de mon ligament croisé antérieur. C’était effectivement le cas.

Une blessure de sportif

«Vous êtes une grande sportive, hein?» C’est la phrase que j’ai le plus entendue pendant mon long parcours dans les méandres hospitaliers, depuis ma blessure.

«Le ligament croisé antérieur déchiré, c’est une blessure de sportif!»

Comment je te dirais ben ça... Ouin, non. J’ai juste voulu jouer à la balle-molle, et je me suis blessée au premier match de la saison.

Le médecin m’a expliqué que je devrais me faire opérer, mais que la rémission serait longue (petite angoisse, ici). Et que je devrais prendre mon temps, ne pas reprendre mes activités trop vite pour laisser à mon genou le temps de bien guérir.

«C’est l’erreur que font souvent ceux qui subissent cette opération-là. Ils recommencent le sport trop vite.»

Je hoche la tête d’un air résigné: ok, je ne recommencerai pas tous mes sports extrêmes trop rapidement, promis!

La princesse au genou enflé

Je me suis finalement fait opérer il y a trois semaines. Et c’est là qu’a recommencé ma vie de maman ingrate (six mois après ma blessure), en béquilles, qui ne peut pas s’occuper de ses enfants.

Premier constat: c’est dur pour l’orgueil. Pendant les premiers jours suivant mon opération, j’étais comme une princesse, mais sans couronne, sans robe, sans grâce et avec un genou enflé. Mes dévoués beaux-parents sont venus quelques jours à la maison pour nous donner un coup de main (et je les remercie du fond du cœur). Pendant que je restais évachée dans mon lit, ma belle-mère préparait les repas, faisait du lavage, du ménage et pliait mes bobettes.

Deuxième constat: se remettre d’une opération quand tu as deux jeunes enfants, ce n’est pas évident. Je voulais passer un minimum de temps avec mes filles le soir et la fin de semaine, même si j’étais un peu embrouillée par les antidouleurs. Mais la liste d’activités que je pouvais faire avec elles était assez réduite (et l’est toujours d’ailleurs).

On a lu des livres en masse. Mais il arrivait que pendant que je lisais un livre avec ma plus vieille, la plus jeune (dont le principal loisir, maintenant qu’elle marche, est de courir partout avec sa poussette-jouet) vienne nous rejoindre et essaie d’embarquer sur mon genou libre (mais, accessoirement, incapable de supporter un bon 26 livres bien tassées).

Avez-vous déjà essayé d’expliquer à un enfant d’un an et demi qui veut se coller sur vous que vous ne pouvez pas le prendre? Moi, en tout cas, ça me brisait le cœur. Surtout que mon autre fille, du haut de ses trois ans et demi, tentait de raisonner sa soeur: «Mais non, maman peut pas te prendre, elle a mal à son genou! Est-ce que c’est celui-là que tu as mal, maman?»

D’autres fois, la petite ne croyait pas nécessaire d’arrêter sa course folle (avec sa poussette-jouet, dois-je le préciser?) même si ma jambe était étendue dans le chemin. Avez-vous déjà essayé de vous retenir de lâcher un bon juron libérateur parce que votre progéniture vous a fait très mal, mais qu’elle ne s’en est pas rendue compte et que vous ne voulez pas la traumatiser? Moi, en tout cas, j’ai un vague souvenir d’une fois où je n’ai pas réussi ce tour de force et que j’ai finalement dû faire fi de ma douleur pour consoler ma fille en pleurs.

Dernièrement, disons que j’ai eu plusieurs pensées pour les mères monoparentales (je ne sais pas comment j’aurais fait, sérieusement!) et celles qui ont des limitations physiques. Et j’ai réalisé, une fois de plus, à quel point j’avais de la chance d’être bien entourée (surtout par mon chum, qui s’occupe de pas mal TOUTES les tâches ménagères, ces temps-ci). Bon, je vous laisse, je dois filer à mon tournoi de roller derby.

«Il était une fois une mère correcte» est une chronique qui témoigne des hauts et des bas de la vie de parent. Parce qu’avoir des enfants, ça veut dire raconter des histoires avant l’heure du dodo, mais ça nous place aussi dans des situations inconnues, absurdes ou de vulnérabilité... qui font de très bonnes histoires à raconter!

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