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J’ai choisi d’avoir un enfant seule et c’est la meilleure décision de ma vie

C'est moi qui mène la barque et qui gère ma famille.
Maria Pia Chávez et son fils Tristan Andrés
Courtoisie/Maria Pia Chávez
Maria Pia Chávez et son fils Tristan Andrés

Les propos de ce témoignage ont été recueillis par le HuffPost Québec et retranscrits à la première personne.

Plus jeune, je voulais avoir cinq enfants. J’appartiens à la communauté LGBTQ et lorsque j’étais rendue dans la trentaine, célibataire, je me suis dit qu’il fallait que je fasse un choix. Mon désir d’être maman était très grand. Je n’aurais pas pu faire de compromis sur ce projet-là.

J’ai envisagé l’adoption. Mais l’adoption internationale, pour une femme de la communauté LGBTQ, ce n’est pas accessible. Il y avait seulement deux pays qui acceptaient les femmes célibataires. Ça impliquait beaucoup de démarches et c’était très cher. Et au final, je voulais vraiment être enceinte. Je voulais avoir mon enfant, pas l’adopter. C’était mon premier choix.

La première étape a donc été d’essayer de trouver un donneur connu autour de moi. J’avais ciblé deux hommes que je connaissais. Un avait dit oui, mais à la dernière minute, il a changé d’idée parce qu’il voulait être davantage impliqué dans la vie de mon enfant que ce que j’aurais pu lui promettre. J’ai finalement décidé de passer par la banque d’insémination.

J’ai pris rendez-vous à la clinique de fertilité. On a vérifié mes motivations pour voir si mon projet était sérieux et si j’étais prête à avoir un enfant. J’ai par exemple rencontré un psychologue qui m’a posé toutes sortes de questions.

Une fois cette étape-là passée, j’ai rencontré un médecin. J’ai passé plusieurs tests pour vérifier que j’étais en bonne santé et que ma réserve ovarienne était bonne. Quand ils ont constaté que tout était beau, ils ont pu procéder. En tout et partout, ça représentait entre 600 et 700 dollars par mois, pour chaque essai. J’ai réussi à tomber enceinte au dixième essai, à 40 ans.

“Ma grossesse, c’était incroyable. Ç'a été une belle étape, probablement le meilleur moment de ma vie.”

Avoir un bébé qui pousse dans son ventre, c’est déjà un miracle. Mais moi, en plus, à cause de mon âge, je n’avais pas beaucoup de chances de tomber enceinte. Tristan Andrés est vraiment un miracle.

Ma grossesse, c’était incroyable. Ç‘a été une belle étape, probablement le meilleur moment de ma vie. J’ai arrêté de travailler quand j’étais enceinte, parce que j’étais en retrait préventif.

Ç‘a été une très, très belle grossesse. J’étais très heureuse d’être enceinte. Je n’ai pas eu de symptômes dérangeants et j’ai continué à faire du sport jusqu’au mois de mars cette année-là; mon fils est né au mois de mai.

Quand je parlais de mon projet autour de moi, les réactions étaient assez positives. On m’encourageait. Mes amis me disaient que j’étais faite pour ça. J’adore les enfants, je travaille avec eux dans les écoles depuis 25 ans. La plus grande critique que j’ai eue, malheureusement, est venue de mon père. Au début, il ne trouvait pas ça normal que mon fils n’ait pas de père.

Et ça, c’est sûr que j’y ai pensé. Je me disais que j’allais payer un jour pour l’absence de père dans la vie de mon fils. J’aimerais qu’il puisse le connaître, mais il faut attendre à 18 ans, et le père doit accepter. J’ai toujours eu peur qu’à l’adolescence, il m’en veuille et me trouve égoïste.

“Quand tu es monoparentale, tu fais le travail pour deux. J’ai l’impression que parfois, les gens ne réalisent pas toutes les responsabilités que ça implique.”

Pour pallier l’absence de figure paternelle dans la vie de Tristan Andrés, je me suis assurée qu’il ait dans sa vie des figures masculines. Par exemple, il est entouré de quelques oncles et j’ai aussi un demi-frère dans la trentaine avec qui il a un bon lien. Depuis plus d’un an, mon fils a aussi un Grand Frère de l’organisme Grands Frères Grandes Soeurs. Tous ces hommes jouent un bon rôle dans sa vie.

En élevant un enfant seule, surtout les premières années, je n’ai pas eu le temps d’aller cruiser! J’ai eu deux partenaires à travers les années, mais ce n’est pas tout le monde qui veut entrer dans une famille où il y a déjà des enfants. Cet aspect-là de ma vie est plus difficile. Quand tu es monoparentale, tu fais le travail pour deux. J’ai l’impression que parfois, les gens ne réalisent pas toutes les responsabilités que ça implique.

J’ai toujours suivi le rythme de mon fils, sa routine et son heure de coucher. Tristan Andrés a maintenant 11 ans et je commence à avoir un petit peu plus d’espace et de flexibilité, mais il a encore beaucoup besoin de moi.

Mes parents n’ont pas été très présents quand je suis devenue mère. Ils n’ont pas passé beaucoup de temps avec mon fils. Quand j’entends mes amies qui ont des enfants dire que leur mère est passée les voir quelques heures pour cuisiner ou nettoyer le plancher, je leur dis à quel point elles sont chanceuses. Moi, je n’ai pas connu ça. J’ai dû faire mon deuil.

Mais il y a beaucoup d’avantages à être une mère monoparentale! C’est moi qui mène la barque, qui gère la famille. J’ai toute la liberté de pouvoir décider seule. Et par ricochet, il n’y a pas de chicanes de couple.

Je suis très sociable, donc ça m’a poussée encore plus à me faire d’autres amis, dont certains sont dans la même situation que moi. Ça me permet de me stimuler à faire autre chose, à sortir de la maison, à élargir mon cercle d’amis. Ça me permet de faire de belles découvertes et on s’entraide. Si ça n’avait pas été du soutien de mes amis, tout aurait été beaucoup plus difficile pour moi.

Ça fait longtemps que Tristan Andrés me pose des questions sur son père. Il sait que je suis allée en clinique de fertilité et que son père biologique peut avoir plusieurs enfants. C’est sûr qu’il aimerait le rencontrer, mais il sait que ce ne sera peut-être pas facile.

Il apprend à naviguer là-dedans. Les jeunes ne rient pas de lui, à ce que je sache. Des fois, il va y avoir des commentaires spontanés. Les jeunes vont demander où est son père parce qu’ils remarquent que je suis toujours seule à la maison. Il leur répond et, si je suis là, je l’aide.

Maria Pia Chávez et son fils Tristan Andrés
Courtoisie/Maria Pia Chávez
Maria Pia Chávez et son fils Tristan Andrés

J’ai expliqué à mon fils que je l’ai vraiment voulu et que je l’adore. Nous sommes très proches, tous les deux. Depuis toujours, on fait régulièrement du sport et du plein air ensemble. Plusieurs fois par jour, il me dit qu’il m’aime.

Je suis très, très contente d’être maman. C’est ce qui me rend le plus heureuse. Je n’ai pas nécessairement eu une vie facile, tant dans mon enfance que dans ma vie adulte. Ma réalité peut être très exigeante, mais ça demeure quand même la plus belle expérience de ma vie.

La section Perspectives propose des textes personnels qui reflètent l’opinion de leurs auteurs et pas nécessairement celle du HuffPost Québec.

Propos recueillis par Florence Breton.

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