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La Chine atteint Mars pour la première fois, le début d'une longue course face à la NASA

La course à l’exploration de Mars est désormais ouverte.
Image d'artiste de la mission Tianwen-1.
Crédits: CNSA
Image d'artiste de la mission Tianwen-1.

C’est au tour de la Chine de se joindre à la danse des engins spatiaux à destination de Mars. Vingt-quatre heures après la sonde Hope des Émirats arabes unis, c’est Tianwen-1 qui réalise ce mercredi 10 février sa mise en orbite autour de la planète rouge, une semaine avant l’arrivée du rover Perseverance de la NASA prévue le 18 février.

La course à l’exploration de Mars est désormais ouverte, notamment entre la Chine et les États-Unis. Avec l’ambition pour les autorités chinoises de surpasser les Américains d’ici 10 ans en étant le premier pays à parvenir à rapporter sur Terre des échantillons martiens.

Pour l’heure, Tianwen-1 va rester en orbite pendant 3 mois. La sonde est composée d’un orbiteur, d’un atterrisseur et d’un rover. La mission de l’orbiteur sera de “vérifier le site d’atterrissage” du rover explique au Huffpost Athena Coustenis, astrophysicienne et directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) en France.

Il s’agit pour Tianwen-1 de cartographier Mars à l’aide de ses instruments de mesure, un radar pouvant analyser les sols et des caméras haute résolution. De superbes images de la planète ont déjà été prises pendant la phase d’approche de la sonde.

Photo de Mars prise de la sonde Tianwen-1.
CNSA/PEC (Planetary Exploration of China))
Photo de Mars prise de la sonde Tianwen-1.

Trouver la vie sur Mars

Une fois le lieu d’arrivée déterminé, la mission principale de Tianwen-1, le déploiement du rover sur le sol martien, pourra commencer. À condition bien sûr que l’atterrissage se déroule comme prévu. “Le taux d’échec des missions martiennes monte à 50%”, prévient la docteure Athena Coustenis. En 2012, la Chine avait déjà tenté d’envoyer sans succès la sonde Yinghuo-1 vers Mars.

Un site possible d’atterrissage pour Tianwen-1 pourrait être la plaine d’Utopia Planitia, déjà visitée par la sonde américaine Viking 2 en 1976. La région est géologiquement intéressante, car elle contiendrait des quantités importantes de glace souterraine. Certains scientifiques se demandent même si la poussière d’Utopia Planitia ne pourrait pas contenir des traces de vies.

“Trouver des preuves de vie sur Mars”, explique Athena Coustenis, constitue un objectif important pour Tianwen-1. En outre, la mission chinoise visera aussi à recueillir des données sur l’atmosphère et la géologie qui permettront d’améliorer la connaissance que nous avons de la planète.

Reste que les retombées scientifiques de la mission chinoise pourraient être incertaines. S’exprimant auprès du Huffpost, Francis Rocard, responsable du programme d’exploration du système solaire au CNES, révèle que les instruments scientifiques embarqués par Tianwen-1 ne sont “pas aussi performants” que ceux utilisés lors des missions américaines.

La Chine rattrape technologiquement l’Occident

Les objectifs de la mission Tianwen-1 n’en sont pas moins “très ambitieux” explique Athena Coustenis. C’est que la Chine, explique l’astrophysicienne, veut se positionner en “challenger” et jouer dans la cour des grands de l’espace que sont “les États-Unis, la Russie et l’Europe” en rattrapant en une seule mission tout son retard sur les autres nations.

Pékin a “tout conçu, tout fabriqué elle-même”, pointe Athena Coustenis. Le programme spatial chinois se targue en effet d’être autonome d’un point de vue technologique. Même si, en arrivant sur Mars 40 ans après les Américains et les Russes, la Chine a pu bénéficier “des connaissances des programmes spatiaux des autres pays”, tempère la directrice du CNRS.

C’est que la question de l’espace est supervisée de près par le gouvernement chinois. Le constructeur des engins spatiaux chinois, la China Aerospace Science and Technology Corporation (CASC), n’est pas piloté par un comité scientifique comme c’est le cas pour les autres pays souligne Athena Coutenis, mais directement par l’État qui veut être “prêt à mettre les moyens qu’il faut”, indique la professeure.

Ce contrôle politique des questions spatiales se fait parfois au détriment de la collaboration scientifique. “Il existe des lourdeurs et des lenteurs dans les échanges avec les scientifiques qui doivent faire valider leurs communications”, déplore Athena Coutenis.

La mission Tianwen-1 a été lancée le 23 juillet du centre spatial de Wenchang situé à Hainan en Chine.
Carlos Garcia Rawlins / Reuters
La mission Tianwen-1 a été lancée le 23 juillet du centre spatial de Wenchang situé à Hainan en Chine.

Retourner sur Terre des échantillons de Mars

Si le gouvernement chinois s’implique à ce point dans la direction de son programme spatial, c’est qu’il existe une “compétition saine” entre grandes puissances de l’espace explique Athena Coustenis, ”à l’image de ce qui s’est passé durant la guerre froide”.

Cette fois-ci, l’objet de la compétition semble être de réussir à rapatrier sur Terre des échantillons martiens. L’ESA et la NASA prévoient une mission commune dans ce sens à l’horizon 2031, de même que la Chine pour 2030.

La mission Tianwen-1 constitue une étape clé pour une prochaine mission visant à un retour d’échantillons. Un des objectifs de l’orbiteur de la sonde chinoise est d’ailleurs de repérer un site susceptible de convenir à une telle mission.

La Chine peut également compter sur l’expérience acquise lors de ses missions lunaires Chang’e pendant lesquelles les scientifiques chinois ont réussi à rapatrier des roches de la Lune sur Terre.

Mais le succès chinois est encore hypothétique et rattraper en une décennie l’avance prise par la NASA sur les missions de renvoi d’échantillons ne sera pas aisé. “C’est un projet ambitieux que les Américains ont mis 40 ans à mettre en oeuvre” rappelle le docteur Francis Rocard.

Il faudra déjà que la mission Tianwen-1 se déroule parfaitement. Puis que la Chine réussisse à développer sa nouvelle gamme de lanceurs interplanétaires Longue Marche 9, explique le site d’astronomie planetary.org. Pouvoir envoyer sur Mars des sondes pouvant extraire et renvoyer des échantillons sur Terre nécessite en effet des fusées beaucoup plus puissantes que celles utilisées actuellement. “Les lanceurs que la Chine prévoit d’utiliser pour envoyer des taïkonautes sur la Lune” pourraient être utilisés à cette fin explique Francis Rocard.

Les lanceurs envisagés mesureront 100 mètres de haut pour 10 mètres de large. Une technologie qui ne pourra être testée qu’en 2030 selon le site spacenews, soit tout juste à temps pour respecter le calendrier prévu pour une mission avec retour d’échantillons martiens. La course vers Mars ne fait que commencer et sera constellée d’obstacles.

Ce texte a été publié originalement sur le HuffPost France.

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