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Charlevoix, centre du monde: le choix entre courage et esquive

On ne peut laisser le Sommet du G7 se tenir dans le Parc marin Saguenay-Saint-Laurent en passant sous silence la présence offensante de Donald Trump, président des États-Unis sur ce territoire.
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À l'occasion du Sommet du G7, nos élus locaux doivent exprimer à Donald Trump, directement et sans faux-fuyant, leur profond désaccord avec ses politiques honteuses d'agression de la planète.
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À l'occasion du Sommet du G7, nos élus locaux doivent exprimer à Donald Trump, directement et sans faux-fuyant, leur profond désaccord avec ses politiques honteuses d'agression de la planète.

Il n'y a pas de mal à se faire du bien. J'écoutais le 3 janvier dernier des intervenants économiques et politiques de Charlevoix commenter la poussée de croissance économique de la région, la mienne par adoption, Club Med au Massif et G7 en prime. Il y avait de l'élan dans l'air, de l'optimisme, un brin qu'inquiétude concernant le manque de main-d'oeuvre, mais somme toute une bonne dose de satisfaction devant des lendemains qui chantent. Et avec raison. Cette bouffée de développement est l'aboutissement des efforts consentis sur la durée par les gens d'affaires et les élus de la région pour en faire un pôle de tourisme et de développement économique qui viendrait à bout des cycles saisonniers de fébrilité et de déprime successifs.

Le Sommet du G7 s'installera donc dans Charlevoix les 8 et 9 juin prochains, sur les bords du Saint-Laurent, dans le Parc marin Saguenay-Saint-Laurent. Charlevoix deviendra pour deux jours le centre du monde. La région profitera d'une formidable vitrine internationale à laquelle il est bien difficile de renoncer. Et avec cette vitrine se présente aussi une occasion unique : celle de démontrer à la face du monde que l'on peut accueillir les puissants de ce monde non pas dans un mode lèche-bottes, mais dans un mode d'affirmation de notre identité, de notre attachement profond au Saint-Laurent et aux milliers d'espèces y vivent ou qui en dépendent et de notre volonté de protéger notre environnement et notre planète.

Le Québec s'est développé sur les côtes du Saint-Laurent. Ce fleuve, grandiose, mais fragile, fait partie de notre identité.

Le Québec s'est développé sur les côtes du Saint-Laurent. Ce fleuve, grandiose, mais fragile, fait partie de notre identité. Il la forge, il nous forge depuis des siècles. Il est le symbole à la fois de la force de la nature et de son extrême fragilité comme il est aussi l'emblème de la résilience et de la vulnérabilité du peuple québécois. Après des décennies d'insouciance à son égard, la population du Québec a clairement manifesté la nécessité d'assainir son fleuve, de le protéger. Elle y a investi des sommes colossales et une énergie parfois chancelante, mais tout de même exemplaire. Alertée par la fragilité de l'écosystème marin du Saint-Laurent, témoin de l'érosion de ses côtes, de la contamination de ses sédiments, de la rapide disparition de ses bélugas, la population du Québec s'est récemment opposé à des projets comme celui de Rabaska près de Lévis, de Cacouna près de Rivière-du-Loup ou encore celui de l'exploitation des hydrocarbures sur l'Île d'Anticosti. Elle s'est massivement prononcée, avec ses élus locaux, contre le projet de pipeline Énergie Est. Elle a aussi maintes fois manifesté son désaccord avec l'exploitation du gisement de Old Harry dans le golfe du Saint-Laurent.

On ne peut laisser le Sommet du G7 se tenir dans le Parc marin Saguenay-Saint-Laurent en passant sous silence la présence offensante de Donald Trump, président des États-Unis sur ce territoire. Créationniste et négationniste, pour Donald Trump le réchauffement climatique serait une invention destinée à freiner le développement économique des États-Unis. Il s'est donné comme mission de discréditer le mouvement environnemental et d'ouvrir toutes grandes les portes à l'industrie gazière et pétrolière. Donald Trump a retiré les É.-U. de l'Accord de Paris, a relancé l'exploitation du charbon aux États-Unis, un des combustibles les plus nocifs pour la planète. Il a également annoncé un plan d'exploration et d'exploitation pétrolière et gazière sur les côtes américaines des océans Pacifique, Arctique et Atlantique jusqu'à maintenant largement protégées. Ce plan met à risque l'environnement de centaines de milliers d'oiseaux et de mammifères marins dont plusieurs espèces de cétacés qui fréquentent le golfe et l'estuaire du Saint-Laurent. La politique irresponsable de l'administration Trump met en péril une biodiversité déjà trop lourdement fragilisée par l'avidité humaine. Elle contrevient sans vergogne à tous les efforts internationaux de lutte contre les GES.

Le maire Couturier de La Malbaie, commentant au micro de Medium Large cette nouvelle ère économique dont la région bénéficie, disait: «Ça nous fait voir plus grand...on a une lourde responsabilité de protéger ce territoire et de bien le développer». Au-delà de cette déclaration clairvoyante, il y a les gestes lourds de sens et plus grands que les stratégies de développement local que l'on peut poser en tant qu'hôtes et qui témoignent de cette responsabilité. À l'occasion du Sommet du G7, nos élus locaux doivent exprimer à Donald Trump, directement et sans faux-fuyant, leur profond désaccord avec ses politiques honteuses d'agression de la planète. Justin Trudeau, au premier chef, doit rappeler le président des États-Unis à l'ordre s'il arrive lui-même à concilier son discours pro-environnemental avec ses politiques de développement de l'industrie des sables bitumineux. Le premier ministre du Québec doit aussi exprimer clairement son désaccord vis-à-vis des politiques de destruction massive de la planète adoptées par Trump.

Nos élus ont le devoir de demander aux dirigeants du G7 de jeter un regard attentif et responsable sur la nature qui les entoure, sur les eaux de ce magnifique fleuve, de s'informer de la vie qui s'y développe et qui nourrit une partie de la Terre.

Nos élus ont le devoir de demander aux dirigeants du G7 de jeter un regard attentif et responsable sur la nature qui les entoure, sur les eaux de ce magnifique fleuve, de s'informer de la vie qui s'y développe et qui nourrit une partie de la Terre. Ils ont une occasion unique de leur proposer de s'inspirer de la beauté de ce fleuve, de sa force, de sa grandeur, dans l'élaboration et la mise en place de politiques de développement économique respectueuses de tous ces endroits sur Terre qui donnent, hébergent, abritent et nourrissent la vie. Et nos élus doivent interpeler Donald Trump: ils ont le choix entre le courage et l'esquive.

Avril 2018

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