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C'est parce que je suis féministe que ma lingerie l'est aussi

Je n'ai pas envie de jouer les rabat-joie mais j'ai déjà évoqué les problèmes que j'avais avec la définition du féminisme, et je ne supporte pas de voir ce mot servir d'argument marketing pour vendre un produit intime.
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J'adore les pubs pour la lingerie Neon Moon. Ça fait du bien de voir des femmes comme moi, avec des poils, des plis et de la cellulite. Des femmes qui me ressemblent et n'ont pas l'air d'avoir passé une demi-journée à se maquiller et à se coiffer. Mais le réalisme de ces pubs ne s'arrête pas là. Les attitudes des mannequins sont naturelles: conversation entre amies, lecture... C'est vrai que la personne qui me voit le plus souvent en sous-vêtements, c'est ma coloc, quand je farfouille dans notre appart à la recherche d'un T-shirt ou que je me déhanche sur du Billy Joel. Bien joué, Neon Moon.

J'approuve aussi le message de Hayat Rachi, la fondatrice de la marque, qui juge "vraiment important que les femmes cessent de s'identifier à des idéaux de 'beauté' inaccessibles". Les pubs de Neon Moon font passer le message. Jusque-là, on est d'accord.

Mais qu'est-ce que c'est que cette connerie de "lingerie féministe"? Parce que c'est l'adjectif dont la marque qualifie ses sous-vêtements, et je ne comprends pas ce que ça veut dire. Que la fibre de bambou, si douce au toucher, va revaloriser mon salaire de 20%, à l'égal de mes collègues masculins ? Non. Apparemment, c'est une histoire de confort et d'adaptation aux mouvements du corps des femmes. Comme n'importe quel sous-vêtement à la bonne taille, quoi.

Je n'ai pas envie de jouer les rabat-joie mais j'ai déjà évoqué les problèmes que j'avais avec la définition du féminisme, et je ne supporte pas de voir ce mot servir d'argument marketing pour vendre un produit intime. En matière de lingerie, je suis plutôt du genre à me contenter des lots de cinq shortys stretch en promo chez Marks & Spencer. Ils sont teeellement sexy. Mais si je choisissais de porter un push-up et un string confectionnés uniquement avec des diamants et des capotes, ma tenue serait quand même féministe, parce que je le suis moi-même.

Les soutiens-gorge confortables et sans armatures, ça n'a rien de nouveau. Les qualifier de féministes équivaut, au mieux, à porter un jugement implicite sur les femmes qui se sentent mieux dans leur peau avec un push-up (ou qui sont plus à l'aise avec des baleines). Au pire, c'est une invention marketing dont on se passerait bien. "Vous êtes féministe? C'est cette culotte qu'il vous faut!" Et après? Des tampons féministes?

D'ailleurs, pourquoi se limiter aux produits féminins? Qui est partant pour une bouteille d'eau féministe ? Dans son spectacle, A Bic For Her ("Un Bic pour elle"), Bridget Christie parlait de ces articles qui nous sont soi-disant réservés, parce qu'ils se vendent mieux comme ça. Taxer un objet de féminisme est tout aussi ridicule. Au passage, si vous faites plus que du 44, pas question de vous émanciper: les articles féministes à votre taille n'existent pas. Certes, Neon Moon dit avoir l'intention d'étoffer sa gamme, mais elle exclut actuellement une grande partie des femmes!

Les pubs non retouchées de Neon Moon sont géniales. Elles nous donnent une bonne image de notre corps. Mais il faut arrêter de décliner le féminisme à toutes les sauces. Il en devient un vague synonyme de tout ce qui est "bon pour les femmes". Appliqué au marketing, il perd son sens et devient un instrument de division: entre celles qui achètent et celles qui n'achètent pas, celles qui peuvent acheter et celles qui ne le peuvent pas. Ce concept de "lingerie féministe" a beau marquer les esprits, il n'en reste pas moins une combine marketing. Une combine qui donne l'impression à celles qui ne souhaitent, ou ne peuvent, pas acheter ces sous-vêtements qu'elles sont moins féministes. A oublier, donc.

Ce blog, publié à l'origine sur Le Huffington Post (Royaume-Uni), a été traduit de l'anglais par Maëlle Gouret pour Fast for Word.

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