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J’espère de tout cœur que mes élèves pourront se rattraper au secondaire et que leurs difficultés ne seront que bénignes.
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J’ai écrit, il y a quelques semaines, à propos du délestage d’élèves que doivent faire les enseignants chaque année à cause du manque de ressources spécialisées. Beaucoup de mes collègues s’y sont reconnus.

La semaine dernière se tenait la deuxième rencontre annuelle de parents: mon pire moment de l’année! J’ai 10 élèves sur 18 qui sont en situation d’échec ou à risque d’échec. Pandémie ou pas, c’est à peu près toujours la moyenne que j’ai chaque année, même si je garde mes élèves pendant deux ans.

Mais qu’est-ce qui fait que ça ne s’améliore pas, après plusieurs rencontres du comité d’intervention composé de la direction, de différents intervenants spécialisés et de moi-même?

Nous avons analysé et décidé des objectifs ainsi que des moyens pour atteindre la réussite de ces élèves. Qu’est-ce qui achoppe? On a une très bonne idée des raisons: le manque de spécialistes en adaptation scolaire pour rééduquer les enfants est la première en lice.

On compte aussi l’intégration d’un trop grand nombre d’élèves en difficulté dans les classes régulières sans les services adéquats, les tonnes de dossiers que je dois monter pour prouver que mon élève a besoin de soutien particulier - sans les services suffisants et sans évaluations -, le manque de classes spéciales pour élèves en trouble d’apprentissage ou de comportement, l’approche comptable de notre gouvernement qui fait qu’un budget dans le fonds X de 17 000 $ ne peut être utilisé pour engager une ressource supplémentaire qui fait partie du budget Y qui, lui, est vidé, etc.

Surtout, grâce à mon expertise d’enseignante, je devrais pouvoir moi-même diriger les enfants vers les bonnes ressources. Mais on n’écoute pas mes recommandations. Les décisions sont prises en haut de nous.

“Au Québec, nos enfants n’ont pas tous les mêmes chances…”

Il y a quelques années, mon médecin de famille m’a envoyée voir un médecin spécialiste pour un petit problème de santé. Ce problème s’est réglé grâce à un traitement approprié. Sans ce traitement, cela aurait pu se transformer en cancer précoce. Est-ce que c’est cela qui attend mes élèves?

Comme chaque année, je passe une terrible soirée lors de ces rencontres, ayant devant moi des parents angoissés, en colère et démunis, n’ayant les moyens ni de faire évaluer leur enfant ni de payer pour les services d’un spécialiste.

Je n’en dors pas de la nuit, car même si je suis leur spécialiste dans la classe, je suis aussi une maman. J’espère de tout cœur que mes élèves pourront se rattraper au secondaire et que leurs difficultés ne seront que bénignes.

Malheureusement, les chiffres parlent d’eux-mêmes et démontrent que beaucoup de nos enfants perdent leur combat et décrochent, car pour persévérer, il faut avoir des chances de réussir. Mais au Québec, nos enfants n’ont pas tous les mêmes chances…

Ce cancer n’est pas incurable. L’antidote est connu. Le traitement aussi, s’il est appliqué à temps. Ne laissons pas ce cancer de l’éducation se transformer en métastase. Stoppons le délestage dans les écoles avant qu’il ne soit trop tard.

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