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Irak/Afghanistan: évitons la contagion du califat

Pendant que notre attention est braquée sur l'avancée de l'EIIL en Irak, les Afghans sont en train de lutter pour préserver leur démocratie, éviter une guerre civile et ainsi le retour des talibans.
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Pendant que notre attention est braquée sur l'avancée de l'EIIL en Irak, les Afghans sont en train de lutter pour préserver leur démocratie, éviter une guerre civile et ainsi le retour des taliban.

Peu de nouvelles de là-bas... Et pourtant, l'avenir de l'Afghanistan est en train de se jouer, au moment ou les forces de l'OTAN s'apprêtent à retirer leurs troupes. Un avenir qui pourrait bien se terminer comme en Irak.

Les Afghans veulent la démocratie ; ils l'ont démontré en allant massivement voter à l'élection présidentielle, malgré les menaces des talibans. Ils ont très largement voté au premier tour pour le ticket représenté par le Docteur Abdullah Abdullah... Mais le vote des Afghans a été détourné au second tour par une inimaginable fraude orchestrée au plus haut niveau de l'État et dont toutes les preuves ont été apportées. Ils ne l'admettront pas.

Abdullah Abdullah a fait preuve de bonne volonté. Après l'entremise de John Kerry, il a accepté un recomptage des voix, certain de sa victoire. Mais les soupçons de manipulations autour du recomptage du deuxième tour font craindre qu'il s'agisse encore d'éviter à tout prix la victoire d'Abdullah.

Arguant du fait qu'un Afghan non 100% pachtoune ne peut devenir président, la communauté internationale ferme les yeux sur la fraude et évite de parler de ce qui se passe à Kaboul... L'autre candidat, Ashraf Ghani, est 100% pachtoune même s'il est d'une tribu différente (Ahmadzai) de celle d'Hamid Karzai (Popalzai). Il doit gagner !

Cet aveuglement et le refus de reconnaître le processus démocratique font courir au pays le risque de tomber à nouveau dans les mains des extrémistes alors que les troupes de l'OTAN vont organiser leur départ et que l'accord bilatéral de sécurité (BSA) avec les États-Unis n'a toujours pas été signé.

Pour la première fois, les Afghans ont l'occasion de décider de leur avenir. Les rivalités d'ethnie ne sont plus à l'ordre du jour. Il faut combattre l'ennemi commun, encore et toujours l'extrémisme islamiste, représenté ici par les taliban, que les services secrets pakistanais continuent d'appuyer.

L'histoire semble recommencer...

L'exemple de l'Irak devrait faire réfléchir. Le califat s'est installé sur les décombres de la guerre civile en Syrie et en Irak, parce que nos démocraties occidentales n'ont pas choisi le moindre mal. Ils ont refusé d'aider ceux qui se battaient réellement contre les groupes jihadistes. A Kaboul en 1997 les taliban ont pris le pouvoir après l'affrontement terrible qui opposa les forces du commandant Massoud, alors ministre légitime du gouvernement afghan, à celles de Gulbuddin Hekmaktyar, armées par le Pakistan et l'Arabie Saoudite, avec la bienveillance des Américains.

L'Histoire pourrait recommencer.

Le ministre de la Défense afghan, Mohamadi Bismullah Khan, vient de tirer la sonnette d'alarme : les talibans sont en train de gagner du terrain. La bataille de Kunduz, dans le nord de l'Afghanistan, est précisément menée par un taliban qui vient de sortir des prisons de Kaboul.

Pour éviter ce scénario, le recomptage des voix doit se faire sans trucage, car les Afghans ne l'accepteront pas. Le Docteur Abdullah Abdullah est certainement le vainqueur de l'élection. Il avait accumulé une avance de 15 points au premier tour, obtenant 45% des voix. La plupart des autres candidats se sont désistés en sa faveur, sauf Ashraf Gani qui, lui, n'avait que 31% des voix...

Prétendre aujourd'hui qu'Ashraf Gani aurait 14 points d'avance au second tour sur Abdullah Abdullah est tout simplement invraisemblable. Cependant les deux hommes doivent s'entendre au plus vite pour monter un gouvernement d'union nationale afin de faire face à la recrudescence des attaques des taliban et à la terrible crise économique. C'est ce qu'ils s'étaient engagés à faire lors des deux visites à Kaboul du secrétaire d'État américain, John Kerry.

L'idée que seul un Pachtoune puisse être président n'est portée que par les lobbies pakistanais de l'ISI et des pays du Golfe. Le Qatar a déjà ouvert un bureau pour les taliban. Il les pousse à négocier avec le futur président afghan, pour peu qu'il soit 100% pachtoune. Cette perspective a été facilitée par la libération récente des 5 prisonniers talibans les plus dangereux de Guantanamo en échange de l'otage américain...

Comment continuer à faire confiance à ceux qui ont financé et armé les taliban et Al Qaeda pour qu'ils prennent le pouvoir à Kaboul en 97 ? Les mêmes qui ont financé les islamistes de l'EIIL en Irak et en Syrie ? Souvenons-nous qu'Al Bagdadi, le grand chef du nouveau califat irako/syrien était prisonnier des geôles américaines. Qui l'a fait libérer ?

L'horreur de la décapitation de James Foley tout comme celle de Daniel Pearl par Al Qaeda au Pakistan devrait nous faire prendre conscience que nous tournons en rond dans le cercle vicieux du terrorisme. Il est temps de changer de stratégie et de faire confiance à ceux qui savent lutter sur le terrain contre les forces extrémistes.

Après tout, sans les forces de l'Alliance du nord du Commandant Massoud, les talibans seraient toujours au pouvoir à Kaboul et les Afghans seraient retournés au Moyen Âge. Il est bon de le rappeler à la veille du 13e anniversaire de la mort d'Ahmad Shah Massoud.

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Avril 2018

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