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Le bureau des usagers: pourquoi et surtout quand?

En mettant sur pied le Bureau des usagers, l'État identifierait un messager précis qui pourra parler d'une seule voix au nom de tous les patients et de toutes ces associations en faveur du patient.
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Pourquoi un autre organisme comme le bureau des usagers? En réalité, il y a deux raisons fondamentales: le message et le messager.
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Pourquoi un autre organisme comme le bureau des usagers? En réalité, il y a deux raisons fondamentales: le message et le messager.

Combien de fois m'est-il arrivé, au cours de mes humbles 40 années en communication scientifique, de parler de la place ou devrais-je dire de la non-place du patient dans notre système de santé? Sans compter les deux livres que j'ai signés, l'un avec le regretté Dr Augustin Roy (Permettez-moi de vous dire, Éditions du Méridien, 2001) et l'autre avec la collaboration des docteurs Alban Perrier et Robert Ouellet (Révolutionner les soins de santé, c'est possible, Les Éditions Trois-Pistoles, 2014), ce sont plusieurs dizaines d'articles que j'ai publiés sur ce sujet. Et pourtant...

Le patient, celui qu'on a tant voulu mettre au cœur du système, y demeure le grand oublié. Il faut avouer que le MSSSQ a bien d'autres chats à fouetter. Être aux commandes de ce titanesque vaisseau qu'est le ministère de la Santé, c'est tout un défi. C'est un peu comme piloter un paquebot au milieu des icebergs.

Entre les négociations avec les divers ordres professionnels, les associations professionnelles, les CHSLD, les urgences qui refusent de cesser de déborder et la panoplie d'autres aléas auxquels est confronté le ministère, le temps se fait de plus en plus rare pour penser aux patients.

À ce stade-ci, il serait important de se souvenir que le terme «patient» en médecine ne veut pas dire celui qui a de la patience, mais, étymologiquement, vient du mot grec pathos, et signifie donc celui qui souffre. Il m'arrive souvent de poser cette colle tant aux médecins qu'aux infirmières que je rencontre, et, croyez-moi, bien peu savent que patient signifie. Pourtant la perspective est d'importance: on peut toujours demander à un malade de patienter, mais peut-on sérieusement lui demander de souffrir en attendant? Ce ne devrait pas être de sa patience dont il est question, mais de sa souffrance.

Cela peut sembler amusant, mais on a tellement voulu oublier le vrai sens du mot patient qu'on le changea d'abord pour le terme bénéficiaire, puis par le mot usager. Personnellement, je préférais le terme patient, car au moins il décrivait une réalité. Je vois assez mal de quoi on bénéficie quand on est malade et je suis un usager du système de transport en commun, un usager des postes, etc. Mais, enfin c'est le terme convenu. Alors, parlons des usagers.

Pourquoi un bureau des usagers?

Il existe déjà plus d'une vingtaine d'organisations qui prennent la défense des usagers. On a qu'à penser au Comité de protection des malades, aux comités d'usagers d'établissement, du Regroupement provincial des comités d'usagers, à l'association médecin-patients pour la santé, etc., etc.

Alors pourquoi un autre organisme comme le bureau des usagers? En réalité, il y a deux raisons fondamentales: le message et le messager.

Le bureau des usagers: le message

En créant le Bureau des usagers, notre ministre enverrait un message clair et fort sur la place du patient (oh, mes excuses, de l'usager!) dans notre système de santé. Il n'est plus à un vague endroit (d'ailleurs où est-il cet endroit?) qu'on a longtemps appelé le cœur du système. Il se situe désormais à la tête du système, au même endroit où siègent nos ministres de la santé et les hauts fonctionnaires qui dirigent le ministère.

Le bureau des usagers devient ainsi une plateforme d'échanges entre les projets du ministère et les besoins des usagers. Le ministère pourra l'utiliser tant pour annoncer ces politiques, que pour augmenter le niveau de littératie en santé de l'ensemble des usagers. On définit la littératie en santé comme étant l'ensemble des compétences qui permet l'accès, la compréhension et l'utilisation d'information pour une meilleure santé.

Au Canada, on évalue que plus de six adultes sur 10 n'ont pas ces compétences et le pourcentage est encore plus élevé chez les personnes de plus de 70 ans. Ce serait l'un des mandats du Bureau des usagers que de rendre accessibles ces informations.

L'autre mandat serait en sens opposé: ce sera celui des usagers et des divers groupes qui les défendent de se servir du bureau des usagers pour acheminer leurs demandes au ministère.

Le bureau des usagers: le messager

Si dans une grosse entreprise, chacun des employés se présentait aux patrons avec sa liste de litiges et de demandes, bientôt, l'entreprise devrait fermer ses portes. Le temps que chacun des employés ait rencontré le patron, la productivité serait nulle. C'est pourquoi on a conçu des syndicats. Un employé qui en représente des milliers d'autres s'adresse aux patrons quand c'est nécessaire.

Ici, c'est semblable, quand une vingtaine de groupes de soutien et plus doit frapper à la porte du ministère, l'exercice se transforme en véritable tour de Babel et les demandes, plaintes ou suggestions des usagers se perdent dans ce grand concert cacophonique.

Je sais qu'il existe déjà certains organismes qui veulent regrouper les autres pour faire front commun, mais l'entreprise risque bien de ne jamais aboutir, les organismes en cause veulent toutes conserver leur suprématie et il est difficile de les convaincre de se réunir sous la coupole de l'un d'entre eux.

Pourquoi ce ne serait pas le Comité des malades qui deviendrait l'organisme phare plutôt que l'Association médecins-patient ou le Regroupement provincial des comités d'usagers? C'est pourquoi, en mettant sur pied le Bureau des usagers, l'État identifierait un messager précis qui pourra parler d'une seule voix au nom de tous les patients et de toutes ces associations en faveur du patient.

Patience et longueur de temps

Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage, disait le fabuliste Jean De La Fontaine.

Mais à force de toujours reléguer la réflexion sur le rôle du patient dans le système de santé et d'y écrire des mémoires dont personnes ne semblent être même au courant (voir ce document produit par le ministère qui est paru en février 2018: Cadre de référence de l'approche de partenariat entre les usagers, leurs proches et les acteurs en santé et en services sociaux, et qui est passé sous le plus grand silence.

Nous sommes en droit de nous demander jusqu'où étirera-t-on cette patience. Pour ma part, cela fait près de 20 ans que j'en parle! Et vous patients, usagers ou bénéficiaires, que pensez-vous d'un bureau des usagers?

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