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Très ingénieux et rigoureux, ils se sont finalement avérés relativement accessibles pour le spectateur.
Anton Eger, batteur du groupe Phronesis
Phronesis
Anton Eger, batteur du groupe Phronesis

Le festival international de jazz de Montréal(FIJM) proposait lundi soir un programme double de couleur britannique incluant lestupéfiant power trioPhronesis, puis le brillant pianisteGwilymSimcock. Ces deuxconcerts de la série UK Marathonétait présentés au Monument-National.

Âgé de 36 ans, le Britannique GwilymSimcock est déjà un musicien fort influent dans son pays. Il a reçu une formation pianistique en musique classique à la RoyalAcademy of Music. Cependant,le jazzest devenu son style musical de prédilection.Du moins, il a pris une place capitale dans son travail, qui mélange les deux genres. En concert, on a d'ailleurs parfois de la difficulté à départager le jazz du classique. Sa composition Royalty est un exemple parfait de ce mariage symbiotique.

Gwilym Simcock

Gwilym Simcock et Phronesis au FIJM

Sophistiqué

En l'espace de quelques morceaux livrés au Monument-National, lundi, on était en mesure de constater que son jeu sophistiqué de classico-jazz est néanmoins d'une fluidité remarquable. Ses structures harmoniques sont également très riches. À la fois contemplatif, dense et vertigineux, sontravail s'écoutequand même avec aise.

Durant l'heure de son concert, il a proposé le standard EverytimeWe Say Goodbye, un morceau non titré du pianiste et compositeur Chick Corea, une pièce de Kenny Wheeler, ainsi que quatre compositions personnelles : Royalty, la délicateExploration on Mvt II of Grieg Piano Concerto,Antics et A Kind of Red. Ce dernier morceau a été créé en collaboration avec le quatuor de saxophones appelé Delta, en hommage à la musique de King Crimson (qui jouait justement au Festival de jazz le même soir). SurA Kind of Red, on a d'ailleurs senti des influences de rock progressif. Subtiles, mais présentes dans le motif produit de la main gauche.

GwilymSimcock en était à sa seconde performance dans le cadre du FIJM, et ce n'est certainement pas la dernière. Surtout que lors de sa première participation à l'événement, il y a trois ans, il est arrivé une heure en retard à son concert en raison de vols d'avion erratiques.

Phronesis

Le groupe est formé du contrebassiste danoisJasper Hoiby, du pianiste britannique Ivo Neame et du batteur suédois Anton Eger. Ce groupe à la mixité européenne était déjà venu trois fois au FIJM. On comprend que les gars font le travail ! En Europe, le trio fait partie de la crème du jazz actuel. Il a publié sept albums, dont le respectéThe Behemoth, qui est paru cette année.

A-t-on besoin d'expliquer queUKMarathon, est un thème qui a pour but de mettre en valeur quelques-uns des meilleurs artistes jazz du Royaume-Uni au Festival de jazz 2017. En ce qui concerne Phronesis, il faut dire que Londres à une double symbolique: en plus d'être la base du band, c'est dans la capitale britannique que le trio est né. En effet, deux des trois musiciens se sont rencontrés à la Royal Academy of Music. La même école que celle du pianiste dont on vantait le travail plus haut. Tout est dans tout!

Un batteur épatant

À 19h30, les trois musiciens se sont pointés sur scène avec une attitude décontractée. Ce qui a frappé à première vue : la taille de ce grand blond danois se dressant au milieu des deux autres musiciens, qui paraissaient bien petits assis devant leur instrument respectif. Autre particularité qui a piqué notre curiosité : ils ont plus l'air de rockeurs que de jazzmen, surtout le batteur avec son look on ne peut plus branché (coupe de cheveux originale de métalleuxet vêtements archistylés) et son geste de sympathique conquérant.

Sans cérémonial, c'est d'ailleurs ce dernier qui a ouvert le bal avec un jeu extrêmement vif.Après une minute ou deux, il a envoyé une longue et convaincante rafale de coups sur ses cymbales et sur les pourtours de ses quelques caisses. Le contrebassiste et le pianiste ont suivi la cadence. Proposition dense et très énergique qui empruntait un tantinet à l'univers du rock. Cela dit, c'était essentiellement jazzistique.Forcément, le morceau s'intitule 67000 mph(issu de l'album Parallax, paru en 2016)...

Déjà, le batteur laissait sa marque.

Ensuite, la pièce Stillnessa changé complètement l'atmosphère. Les musiciens ont installé posément le morceau. Le contrebassiste a même sorti son archet pour créer une paisible atmosphère de nordicité européenne. Le batteur, lui, a sorti ses fines baguettes métalliques pour créer des sonorités claires et ondulantes. Et soudain, tout s'est emballé. Jouant avec plus de vivacité, Eger a tiré ses acolytes dans un rythme beaucoup plus rapide. Après le calme, la tempête.

À la suite de ce second morceau, le contrebassiste a dû expliquer à l'audience (100 à 150 personnes) que son copain pianiste - ne cessant d'essuyer la surface de certaines notes blanches de son piano à queue – était légèrement blessé à un doigt, ce qui laissait des petites traînées de sang sur le clavier de l'instrument! Rien pour empêcher Ivo Neamede de livrer une très bonne performance, heureusement.

Un peu plus tard, on s'est aperçu que le batteur avait de nouveau changé d'outils. Pour une pièce de jazz plus habituelle, il a utilisé un balai métallique et une baguette tambourinée pour créer toutes sortes de textures sonores : frottements, tintements, claquements... On ne pouvait que se rendre à l'évidence : bien que les trois musiciens aient une importance équivalente dans le concert, l'ingéniosité et l'hyperactivité du batteur font de lui l'attrait principal du spectacle.

Quant à Jasper Hoiby, on pourrait dire qu'il est la force tranquille de Phronesis. Sa basse sert d'ancrage au piano et à la batterie. Plus encore, il structure les grooves qui tapissent les morceaux. De temps en temps, il a même démontré le haut niveau de son calibre.

Bien que très ingénieux et rigoureux, GwilymSimcock etPhronesisse sont finalement avérés relativement accessibles pour le spectateur, en autant qu'il soit un peu familier avec le jazz.

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