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Les perovskites: un matériau de génie pour le photovoltaïque et l'éclairage?

C'est la première fois dans l'histoire du photovoltaïque qu'une telle croissance du rendement en si peu de temps a pu être obtenue.
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Les cellules photovoltaïques nous sont familières: c'est maintenant monnaie courante de voir de grands panneaux sur les toits des maisons ou d'admirer des panneaux solaires dans l'espace: de la station spatiale internationale jusqu'aux robots qui explorent la planète Mars, l'énergie solaire est très présente.

Abondant et illimité, son usage généralisé nécessite encore de nombreux développements technologiques. En effet étant impossible à transporter ou à stocker, il faut la convertir, principalement en électricité, si nécessaire à notre civilisation technologique actuelle.

Les panneaux solaires réalisent cette conversion mais celle-ci est imparfaite: seule une fraction de l'énergie solaire se retrouve sous forme électrique. Cette fraction est le rendement, objet de toutes les attentions des chercheurs.

Aujourd'hui, les meilleurs dispositifs de coût raisonnable plafonnent à un rendement d'environ 25%, ce sont des dispositifs à base de silicium. L'enjeu est de faire mieux sans faire exploser le budget des acheteurs.

photovoltaicOn voit sur la partie haute de la figure, la photographie de 4 pastilles d'alliage (C6H5-C2H4-NH3)2PbI4(1-x)Br4x avec, de la gauche vers la droite, x= 0, x = 1/3, x = 2/3 et x = 1. Sur la partie basse de la figure, on voit l'émission de ces mêmes pastilles sous un éclairage ultra-violet.

Recherche de matériaux prometteurs

Dans cet objectif, les recherches internationales sur le photovoltaïque se concentrent sur une meilleure compréhension des mécanismes fondamentaux responsables de la conversion de lumière en électricité ainsi que sur la recherche de matériaux nouveaux prometteurs.

En 2012, des nouveaux matériaux ont fait officiellement leur entrée dans le monde du photovoltaïque: les pérovskites hybrides, avec une première cellule homologuée présentant un rendement de 12%.

Depuis, le rendement des cellules à base de pérovskite hybride a crû très rapidement pour atteindre fin 2014 la valeur clé de 20%, qui égale le rendement des cellules à base de silicium monocristallin (filière "inorganique") et qui est bien supérieur au rendement des cellules organiques (filière organique avec molécules carbonées pour réaliser la conversion lumière-électricité).

C'est la première fois dans l'histoire du photovoltaïque qu'une telle croissance du rendement en si peu de temps a pu être obtenue. Un véritable engouement de la recherche sur les matériaux pérovskites hybrides a lieu actuellement et dépasse le cadre des applications photovoltaïques traditionnelles pour s'étendre aussi au cadre de l'émission de lumière, qui concerne des applications telles que l'éclairage (les diodes électroluminescentes).

De plus, les pérovskites hybrides étant des cristaux de molécules formés d'une partie organique et d'une partie inorganique, on s'attend à ce qu'elles puissent cumuler les avantages des semiconducteurs organiques (designs multiples possibles, par exemple substrats souples et transparents) et des semiconducteurs inorganiques (rendement élevé), même s'il reste encore la question de la durabilité à résoudre pour l'instant.

Alliage de molécules par l'ENS Cachan

Dans les deux cas d'utilisation prometteuse des pérovskites hybrides (photovoltaïque et éclairage), il est important de pouvoir moduler les propriétés optiques du matériau:

  • Pour le photovoltaïque, capacité d'absorber toute l'étendue du spectre solaire (du domaine de l'infrarouge au domaine ultra-violet),
  • Pour les diodes électroluminescentes, modulation de la couleur d'émission sur tout le spectre visible, du rouge au bleu.

C'est dans cet objectif qu'avec nos collègues de l'ENS Cachan, nous avons développé des cristaux constitués d'un mélange de deux pérovskites hybrides différentes: une à base d'iode et une à base de brome. Les domaines du spectre solaire se trouvant dans l'infra-rouge et dans l'ultra-violet ne sont pas accessibles à la vision de l'œil humain et demandent des moyens de détection sophistiqués. C'est pourquoi, pour explorer plus facilement les propriétés optiques de notre mélange, nous avons choisi de travailler sur une sous-famille de pérovskites qui absorbent efficacement et émettent une forte lumière dans le domaine visible. Nous les avons conditionnées sous forme de poudres solides ayant la forme de pastilles. On obtient alors la photographie suivante, qui montre que les pastilles changent de couleur suivant la composition en iode et en brome du mélange. Ainsi, on montre que, en jouant simplement sur la composition du mélange, on peut fournir une molécule qui émet ou qui absorbe suivant le souhait précis du demandeur. Cette démonstration de concept peut s'étendre à tout le spectre visible, de l'infrarouge à l'ultra-violet.

Cette découverte permettra, par des méthodes simples et peu coûteuses de synthèse chimique, de mélanger dans le même dispositif opto-électronique plusieurs pérovskites hybrides opérant chacune une fonction précise (par exemple, absorber telle couleur, émettre telle autre couleur) et d'obtenir ainsi des dispositifs multi-fonctions efficaces.

La question de la durabilité de ces matériaux étant centrale, nous allons mobiliser nos forces pour attaquer plusieurs chantiers : la résistance du matériau à l'humidité, la stabilité dans le temps des propriétés optiques, le remplacement des atomes de plomb par des atomes plus compatibles avec l'environnement.

Ces nouveaux matériaux pérovskites sont promis à un bel avenir dans beaucoup d'applications liées à notre vie quotidienne liées à la production d'énergie (cellules solaires) ou à l'éclairage (diodes électroluminescentes, écrans) car ils vont permettre la production d'équipements à un coût modéré présentant une efficacité renforcée, avec des designs multiples. En effet, les cristaux de pérovskites se déposant sous forme de couches très minces ou de petites particules de taille de l'ordre du nanométre, on pourra intégrer ces matériaux dans les objets de la vie courante : tissus, vitrages, revêtements. La multiplicité de designs possibles permettant l'intégration de nouvelles fonctionnalités aux objets courants nous aidera dans la nécessaire transition vers un monde basé sur des énergies durables et propres.

Ce billet est publié dans le cadre de l'opération Têtes Chercheuses lancée par le HuffPost France. Elle permet à des étudiants ou chercheurs de grandes écoles, d'universités ou de centres de recherche partenaires de promouvoir des projets innovants en les rendant accessibles, et ainsi participer au débat public.

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