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L'autisme et les vacances

Comment préparer un enfant autiste à voyager? Des semaines avant le départ il faut tout lui expliquer, lui montrer des photos de l'endroit où l'on va, préparer des pictogrammes qui expliquent qu'il n'y aura pas de Ipad dans l'avion...
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Il n'y a pas de vacances de l'autisme. Cela ponctue nos vies et nous force à constamment nous réajuster. Même si pour tous la fin de l'année scolaire signifie vacances, liberté, plaisir, pour nous l'été sera certainement plein d'embûches. Il faudra dire adieu aux quelques personnes dévouées qui se sont occupées de notre enfant. Il faudra accepter que notre école n'organise pas de fête de fin d'année pour nos petits TSA qui sont si différents.

Il faudra contacter sans cesse le camp d'été non spécialisé (les camps spécialisés étant tous complets dès février) pour que les personnes responsables acceptent de préparer notre enfant à une quasi rentrée scolaire tant ce sera de nouveauté et de stress pour lui.

Il faudra une bonne dose d'abnégation pour accepter qu'on ne peut pas le changer d'école, car il y reçoit des «services» aussi minimes soient-ils, suite à une bataille sans fin avec la Commission scolaire de Montréal. Il ne faudra pas être triste qu'il n'ait pas d'amis. On renoncera aux invitations à des fêtes d'enfants faute d'y être invités. On se fera aussi à l'idée qu'on devra organiser nous-mêmes nos propres activités à trois.

Prendre l'avion avec un enfant autiste, le grand saut!

Cette année par contre, nous avons décidé d'affronter notre plus grande peur: celle de prendre l'avion avec notre fils. Trois heures et demie d'incertitude et surtout d'anxiété. Pour lui, mais pour nous aussi. Le but ultime: voir la mer. Faire découvrir au petit ce qu'est l'océan, le bruit des vagues, l'odeur de la plage, le sel sur sa peau et le sable sous ses pieds. Après 6 ans à ne pas trop s'éloigner de Montréal, le jeu en valait la chandelle.

Mais comment préparer un enfant autiste à voyager? Et bien cela prend une bonne dose de détermination et de courage. Des semaines avant le départ il faut tout lui expliquer, lui montrer des photos de l'endroit où l'on va, préparer des pictogrammes qui expliquent qu'il n'y aura pas de Ipad dans l'avion, qu'il faudra rester assis de longues heures, qu'on ne peut pas crier ou balancer ses jambes dans le siège de devant...

Le seul avantage que j'ai trouvé à voyager avec un enfant autiste a été de ne pas attendre en ligne.

Ensuite, il faut penser à tout: à ce qu'il pourra manger dans l'avion (considérant ses rigidités alimentaires), où il sera assis pour ne pas déranger les autres passagers au cas où il y ferait une crise, amener tout ce qui le rassure (toutou, pâte à modeler, couverture, mini lecteur DVD avec 200 films au cas où... , des snacks, etc, etc). Un vrai déménagement qui nécessite de voyager avec de grosses valises qu'on enregistre à l'embarquement et que l'on attend après un vol forcément trop long pour notre petit qui n'a pas l'habitude d'autant de changement dans sa routine. Puis, il faut penser aux imprévus (une contradiction en soi) : l'avion sera-t-il à l'heure, les passagers conciliants, les agentes de bord tolérantes? À ma grande surprise, les écueils n'ont pas été ceux que j'avais prévus. Des personnes amicales se sont présentées sur notre chemin chaque fois que l'on s'y attendait le moins. Je pense ici au douanier qui a négocié avec les autres douaniers pour qu'on puisse amener avec nous notre sauce tomate dans l'avion; au gardien de sécurité de la piscine qui nous souriait tout le temps même quand notre enfant pleurait haut et fort; à ma cousine américaine qui a conduit presque une heure pour m'amener ce qui nous manquait sur place!

Le seul avantage que j'ai trouvé à voyager avec un enfant autiste a été de ne pas attendre en ligne. Dès l'arrivée à l'aéroport, j'ai décidé de me diriger vers la file des personnes handicapées. Évidemment, une fois que j'ai expliqué, non pas une, mais 10 fois à chaque personne rencontrée que mon fils était autiste, nous avons pu procéder à un pré-embarquement sans plus attendre. Inutile de dire les regards outrés de passagers frustrés qui pensent qu'aucun de nous n'est «handicapé». Même chose au retour des États-Unis où dès que l'on s'adresse au comptoir «Special needs», on nous regarde avec des yeux écarquillés. «You are in the wrong lane, Mam

Explications à nouveau, conversations inaudibles entre agentes de bord, l'une d'elles soupire. On prend notre mal en patience et finalement on peut passer avec la dame en chaise roulante. Au retour, j'ai eu l'intelligence de réserver les derniers sièges de l'avion. Question de ne pas déranger de potentiels passagers assis derrière nous. À l'allée, ayant bien appelé la compagnie aérienne deux fois plutôt qu'une, on m'a bien expliqué qu'il n'était pas possible de réserver des sièges à l'avant de l'avion, car le vol était surbooké. Ceci même après que j'ai expliqué que nous avions des «besoins spéciaux». Le message est clair: vous voyagez à vos risques et périls. Ainsi, nous nous sommes rendus en Floride. Départ à midi de Montréal et avec retard de l'avion (car notre pilote et son équipage étaient retardés par un autre vol), nous sommes arrivés à bon port à 21h, la nuit était déjà tombée sur Hollywood Beach et on ne voyait pas la mer de notre chambre d'hôtel...

Le lendemain matin, dès le lever, mon fils a demandé la plage. Lui qui parle peu, a dit clairement: «je veux la plage». Direction plage, il a couru vers la mer et n'a plus voulu en sortir pendant plus de 3 heures. Après tant de peine pour s'y rendre, quel bonheur de le voir jouer dans l'eau et se coucher dans le sable comme s'il avait toujours fait ça! Bien que les transitions entre la plage, la piscine et la chambre d'hôtel ont toutes été pénibles - et ont demandé de réels talents de négociation de ma part - notre fils a pleinement profité de tout ce qui était à sa disposition. Il a même voulu prendre le petit tramway qui allait au centre-ville et fait du vélo à trois avec nous en demandant que l'on s'arrête pour jouer dans un joli parc avec des jeux d'eau. Quoi qu'on en pense, le bonheur est le même pour tous. La mer fait du bien à l'âme et le soleil rénove même les cœurs les plus meurtris.

De retour à Montréal, l'été s'annonce long, mais je sais que mon fils est capable d'essayer de nouvelles choses. L'autre jour, je lui ai acheté sa première petite valise orange. Depuis, il se promène dans la maison et demande à prendre l'avion. Mais il nous faut un peu de temps pour recharger nos piles... J'espère aussi que dans un avenir proche, les aéroports (et autres lieux publics) vont repenser aux signalisations qu'ils utilisent. Le logo d'une chaise roulante ou le fait de ne proposer que l'option malentendant ou aveugle aux passagers quand on s'enregistre en ligne pour un vol me désolent. Il me semble qu'il serait si simple d'écrire «Besoins spéciaux» dans les allées réservées comme on le fait déjà aux États-Unis. Certains disent que les mentalités ont évolué, mais il reste tant de chemin à faire! Pour inclure nos enfants et adultes différents, il va falloir plus que des nouvelles pancartes. Il faudra que tous se mettent à considérer, lorsqu'un enfant pleure en se lançant par terre dans un avion ou ailleurs, que peut-être il n'est pas capricieux... il est juste autiste. Sachez que ses parents vous en seront reconnaissants.

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