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Monsieur Limbaugh, les salopes vous disent merci

Selon le raisonnement de Monsieur Limbaugh, si l'étudiante Sandra Fluke revendique le droit à la contraception c'est parce qu'elle «est une salope qui prend part à tellement d'activités sexuelles qu'elle a besoin d'être payée pour les entreprendre». Pour jeter de l'huile sur le feu, dans son tourbillon d'insultes étiré sur un total de trois jours, il a ajouté que si les étudiantes de l'Université Georgetown désiraient avoir un régime d'assurance couvrant la pilule contraceptive, elles devraient au moins «filmer leurs exploits» pour que lui et tous les autres citoyens américains puissent au moins « en avoir pour leur argent».
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La journée internationale de la femme est-elle encore nécessaire? Généralement, cette question lance un long débat, mais cette année, il me semble qu'on puisse y répondre très facilement.

Plusieurs ont eu vent de la dernière catastrophe du controversé commentateur radio Rush Limbaugh, à la suite d'une assemblée démocrate visant à débattre de l'importance d'une politique d'assurance emploi garantissant un accès à la contraception. Le scandale rapidement intitulé «SlutGate» qui fait présentement bien des vagues chez nos voisins du Sud est le parfait exemple d'un sexisme ancré dans une société qui prétend souvent s'en être débarrassé. Pour les chanceux qui n'ont jamais été exposé à l'idéocratie de Rush Limbaugh, cet animateur de radio d'extrême droite a une influence énorme à l'échelle des États-Unis et s'est récemment permis d'attaquer personnellement Sandra Fluke, une étudiante en droit à l'Université Georgetown, qui est apparue devant une assemblée démocrate afin de défendre l'idée que la contraception devrait faire partie du régime d'assurance offert par son institution scolaire.

Selon le raisonnement de Monsieur Limbaugh, si l'étudiante revendique le droit à la contraception c'est parce qu'elle «est une salope qui prend part à tellement d'activités sexuelles qu'elle a besoin d'être payée pour les entreprendre». Pour jeter de l'huile sur le feu, dans son tourbillon d'insultes étiré sur un total de trois jours, il a ajouté que si les étudiantes de l'Université Georgetown désiraient avoir un régime d'assurance couvrant la pilule contraceptive, elles devraient au moins «filmer leurs exploits» pour que lui et tous les autres citoyens américains puissent au moins « en avoir pour leur argent».

Au moment d'écrire ces lignes, cet homme n'a pas perdu son emploi, ni sa cote d'écoute. Bien que quarante cinq compagnies aient récemment retiré leurs publicités de l'émission, il s'est encore autorisé d'attaquer la réputation d'une autre femme lors son émission de mardi dernier, caractérisant l'auteure Tracie McMillan d'une "jeune femme blanche célibataire suréduquée et dépourvue d'intelligence". Apparemment, aux yeux de Rush, la seule chose qui est pire qu'être une femme, c'est d'être une femme éduquée.

Pire, les candidats à la présidentielle républicaine, voulant se distancer de la controverse, ne se sont pas pressés d'opposer un homme qui a cherché de manière systématique à attaquer une femme dont le seul crime fut d'exercer sa liberté d'expression. Aucun des candidats n'a expressément dénoncé l'intention misogyne derrière les paroles de l'animateur. Rien de surprenant venant d'hommes qui défendent une idéologie si nébuleuse et radicale qu'il est presque impossible de deviner quelle forme d'accès à la contraception une femme américaine aurait sous leur mandat. Rien ne porte à croire qu'ils sont en désaccord avec les arguments de Rush Limbaugh puisqu'ils sont tous opposés à une politique exigeant la présence obligatoire de contraception à l'intérieur de régimes d'assurances. Alors que 99% des femmes américaines ont déjà fait usage de contraception et que l'électorat féminin a représenté la majorité des votes lors de la dernière élection, comment se fait-il que nous nous sommes retrouvés au beau milieu d'un débat autour de cette question?

Paradoxalement, alors qu'on questionne la place de la pilule contraceptive à l'intérieur de régimes d'assurance, le Viagra est présentement garanti par la plupart des programmes d'assurances aux États-Unis. N'est-ce pas étrange que Rush n'exprime aucune résistance au fait que l'argent des citoyens soit utilisé pour une médication facilitant ces «activités récréatives» tout comme il prétend que le fait la pilule contraceptive? Non seulement Rush a été marié un total de quatre fois et n'a jamais eu d'enfants (parions que la contraception a eu un petit quelque chose avoir là-dedans) mais il a également déjà été détenu pour avoir été retrouvé en possession d'une quantité importante de Viagra dont l'origine était douteuse! Il est clair que dans la tête de Rush, il n'y a qu'un seul sexe qui mérite d'être examiné pour ses activités sexuelles et ce n'est certainement pas le sien.

Alors Rush, écoute bien, car j'ai deux choses à te dire. Premièrement, la contraception n'est pas un luxe, c'est un droit. La pilule contraceptive contribue à maintenir une santé reproductive pour des millions de femmes dans les quatre coins du monde. Elle protège contre une panoplie de conditions dangereuses comme l'endométriose, les kystes aux ovaires, le cancer de l'utérus ainsi que les grossesses non désirées. Ce sont des conditions à caractère médical et non à caractère moral. Ce qu'on pourrait caractériser d'immoral par contre, serait de refuser le droit à une santé reproductive pour des millions de femmes en raison d'une doctrine conservatrice qui traite les femmes comme des citoyennes de deuxième classe. Je tiens aussi à te rappeler que la constitution américaine t'accorde le droit de suivre l'idéologie qui te chante, mais ne te donne aucunement le droit de nous l'imposer.

Deuxièmement Rush, je tiens à te remercier. Merci de nous rappeler pourquoi la lutte est loin d'être terminée. Traiter une femme de salope parce qu'elle a le courage de défendre ses convictions ne nous encouragera pas à rester muettes. Lorsque tu as traité Sandra Fluke de salope, tu nous as toutes traitées de salopes. Merci de nous rappeler pourquoi nous devons continuer à nous battre. Merci d'avoir permis à une femme dotée d'une éloquence et d'une grâce remarquable de prendre la parole sur un sujet qui est extrêmement important et rarement soulevé. Le recul gigantesque au niveau des droits des femmes américaines dans les douze derniers mois permet d'illustrer clairement pourquoi une telle journée mérite et doit continuer d'exister. La journée internationale de la femme ne sert pas seulement à honorer les victoires du passé, mais aussi à souligner les luttes indispensables dans le présent.

Merci Rush, de montrer au monde entier la faiblesse de tes arguments et la force des nôtres. Merci de nous rappeler où nous en sommes et combien de chemin il nous reste à parcourir. En attaquant une femme, tu as attaqué toutes les femmes et tu nous as donné une raison de plus d'exiger l'égalité.

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