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Politique québécoise de la jeunesse: quelle place pour les jeunes?

Le gouvernement se convainc qu'il sait ce qui est bon pour la jeunesse, et considère que les jeunes ne le savent pas, eux.
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En campagne électorale, Philippe Couillard avait donné le ton, en promettant de gouverner en «bon père de famille». Je n'avais pas saisi alors qu'on ferait face à un premier ministre, ministre responsable des dossiers jeunesse, d'un tel paternalisme.

Le gouvernement se convainc qu'il sait ce qui est bon pour la jeunesse, et considère que les jeunes ne le savent pas, eux.

Annoncée en catimini la semaine dernière (mais où étaient tous les groupes jeunes, partenaires de l'État dans l'intervention jeunesse?), la consultation en vue de la prochaine Politique jeunesse ne prévoit pas une grande place aux jeunes eux-mêmes. Derrière des portes closes, le gouvernement tendra l'oreille pour écouter les «experts» de la jeunesse, niant que les jeunes sont les plus grands experts quand il s'agit de parler de leur réalité.

Ce même gouvernement se targue pourtant d'être un précurseur en matière de politiques jeunesse et s'apprête à exporter son savoir-faire auprès des pays de l'Organisation internationale de la Francophonie. Que restera-t-il de l'expertise québécoise, maintenant que le seul réseau gouverné par des jeunes et implanté dans toutes les régions du Québec, les forums jeunesse régionaux du Québec, s'est fait couper les ailes? Qu'a maintenant à mettre de l'avant le Québec auprès de la communauté internationale, hormis sa démonstration que les dirigeants ne font pas confiance aux jeunes?

S'il veut réellement se positionner à l'avant-garde des questions jeunesse, le gouvernement doit sans tarder s'engager en faveur de mesures claires, qui témoigneraient d'un réel souci de la jeunesse et de sa place dans la société québécoise:

Une clause d'impact jeunesse transparente

Le gouvernement doit s'obliger à mesurer l'impact sur les jeunes des lois et politiques qu'il met de l'avant, tout comme il le fait pour l'environnement et le développement durable. C'est un engagement fort qu'il a déjà pris au début des années 2000 avec la création d'une clause d'impact jeunesse devant être rédigée dans le cadre des projets de loi soumis au Conseil des ministres. Cette clause a placé le Québec à l'avant-garde dans la considération accordée à sa jeunesse. Dans un contexte de gouvernement ouvert et dans un esprit de transparence, ces clauses devraient dorénavant être rendues publiques et construites à l'aide de l'expertise des partenaires de l'État en matière de jeunesse.

Co-construction avec les jeunes

Les jeunes doivent être placés au coeur de la prise de décision en regard des questions qui les touchent. Le gouvernement devrait être guidé par l'adage nihil de nobis, sine nobis: rien qui ne nous concerne sans nous. Ainsi, les jeunes de toutes les régions devraient avoir accès aux lieux de pouvoir les concernant: construction des politiques publiques, investissements des fonds les ciblant et gouvernance des organisations s'adressant à eux.

Pour la prochaine politique de la jeunesse, cela veut dire: redonner le contrôle de leviers financiers aux jeunes, engagement de l'État à faire une place aux jeunes dans l'analyse menant aux clauses d'impact jeunesse, et engagement à maintenir un dialogue concernant les grands enjeux avec les jeunes.

Je termine mon mandat à la présidence de la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec cette semaine. C'est la fin pour moi de neuf ans d'engagement bénévole dans les forums jeunesse, à contribuer à un réseau qui croit en l'intelligence collective et qui s'active à en démontrer toute la portée. À coup de petites contributions, çà et là, neuf ans à participer à l'édifice collectif avec comme seule aspiration de changer graduellement les choses pour faire une réelle place aux jeunes. Dans le plaidoyer pour une plus grande place pour les jeunes se reflètent tous les autres plaidoyers, que ce soit pour une plus grande place pour les femmes, les aînés, les premiers peuples, les personnes handicapées, issues de l'immigration, ou démunies, etc.

Cette grande idée (pourtant si simple!) d'une démocratie représentative qui le soit vraiment, représentative, le réseau des forums jeunesse en aura été non seulement un fantastique porteur, mais également une démonstration vivante.

Une page se tourne, une autre s'écrira. N'en déplaise au gouvernement, les jeunes n'ont pas dit leur dernier mot. Malgré la fin de leur financement, plusieurs forums jeunesse se mobilisent pour sauver les meubles et poursuivre une partie de leurs activités, avec le désir de porter la voix des jeunes de leur région et de contribuer au développement de leur communauté.

Je resterai convaincue que la fin du financement des forums jeunesse régionaux du Québec était une grossière erreur trahissant un manque de vision impardonnable. Mais je n'abandonne pas l'espoir. Mon espoir, il me vient d'une ressource hautement renouvelable: la jeunesse, avec toute sa créativité, son intelligence citoyenne et son audace. Heureusement pour l'avenir de notre société, il est indéniable qu'elle refusera de se contenter de se faire dire ce qui est bon pour elle, et saura trouver le moyen de contribuer, à la hauteur de ses capacités, à la définition du monde dans lequel elle vivra.

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