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Séminaire des Pères Maristes: les défis du quotidien des milléniaux

Sans vouloir défendre ces jeunes et sans vouloir excuser les «milléniaux», je pense pouvoir dire qu’être un jeune en 2018… n’est simplement pas facile…
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Il me semble que de prendre six jeunes du secondaire et d’en faire des parias qu’il faut châtier n’est en aucun cas la solution.
FatCamera via Getty Images
Il me semble que de prendre six jeunes du secondaire et d’en faire des parias qu’il faut châtier n’est en aucun cas la solution.

Dans les dernières semaines, on a pu voir plusieurs personnes donner leurs opinions par rapport aux différents événements récemment arrivés au Séminaire des Pères Maristes. Aussi controversée que la nature de l'événement puisse être, je pense que certaines leçons sont à retenir de cette situation.

Je déplore tout d'abord le traitement de la situation par les médias. Il faut le dire, cette intervention du monde médiatique a mené six jeunes de 13 et 14 ans devant un tribunal médiatique et sans pitié, qui a dépeint ces enfants comme des parias qu'il faut absolument punir.

Personne, qui soit saint d'esprit du moins, ne considère l'action de ces jeunes comme bonne et intelligente.

Ce genre d'intervention médiatique, cette volonté du «jugement à tout prix» entraîne des raccourcis sans prendre en considération tous les partis, dans le but de trouver un fameux coupable à chaque situation. Les jugements sont donc ainsi faciles et variés, mais non, personne est contre la vertu... Personne, qui soit saint d'esprit du moins, ne considère l'action de ces jeunes comme bonne et intelligente. Il n'est pas avisé, en mon sens, que les médias s'emparent ainsi d'une situation qui aurait eu avantage à être gérée à l'interne.

Il me semble que de prendre six jeunes du secondaire et d'en faire des parias qu'il faut châtier n'est en aucun cas la solution.

On commence, selon moi, à tomber dans les «excès» du mouvement #MeToo. Notez que je ne réduis en rien la force et l'importance de ce mouvement pour le progrès social, des valeurs et des réalités de notre société, mais il me semble que de prendre six jeunes du secondaire et d'en faire des parias qu'il faut châtier n'est en aucun cas la solution.

Je suis aussi d'avis que la pression populaire, accentuée par les médias, a poussé les Pères Maristes à manquer à sa mission première, qu'est celle d'éduquer. Les solutions mentionnées dans le journal ou dans les radios voulaient à tout prix châtier les six jeunes, sans pour autant leur faire comprendre la gravité de leurs actes et du mal qu'ils ont pu créer autour d'eux.

On a vraiment manqué une opportunité d'éduquer dans cette situation et je trouve que le tout est plutôt symptomatique des conflits de 2018: on partage une opinion via le tribunal populaire propulsé par les médias, sans pour autant essayer de trouver des solutions pour régler la situation auprès des différents belligérants. À la place de cela, on fait des pétitions qui mettent une pression sur le gouvernement et un établissement scolaire...

À mon sens, amener cette affaire en cour fut une bonne décision.

À mon sens, amener cette affaire en cour fut une bonne décision. Le pouvoir judiciaire, le vrai tribunal, a tranché la question, car on a réussi à couper l'herbe sur le pied du quatrième pouvoir que représentent les médias. Il me semble qu'en tant que citoyens, il est de notre devoir de respecter le jugement du pouvoir judiciaire. On peut être en désaccord avec ledit jugement, mais on se doit de reconnaître son autorité pour ne pas tomber dans un modèle de société où la justice sociale, laquelle est véhiculée par les médias et les «radios d'opinion», prévalent sur l'autorité du pouvoir judiciaire.

Je trouve les paroles du juge Dumais très justes lorsqu'il parle de la direction du Séminaire qui s'opposait à la réintégration des garçons en disant: «[qu'] il lui appartient d'assumer son rôle et de prendre les choses en main, plutôt que d'abdiquer et de capituler devant les objections des groupes de pression».

La décision de la cour a pour objectif d'éduquer ces jeunes sur leurs choix et sur leurs actions. Je comprends ainsi totalement le juge lorsqu'il mentionne que les garçons pourront être réintégrés dans la mesure où ceux-ci n'abordent pas une attitude «triomphante» lors de leur retour à l'école. On cherche simplement réintégrer et éduquer ces jeunes au lieu de les lyncher sur la place publique, pour que cette situation serve au moins à quelque chose. Pour qu'un apprentissage collectif se fasse.

Sans vouloir défendre ces jeunes et sans vouloir excuser les «milléniaux», je pense pouvoir dire qu'être un jeune en 2018... n'est simplement pas facile... Combien de gens de 40 ans m'ont dit «mon Dieu que je n'aimerais pas être à votre place... Chaque chose qu'on peut dire par texto peut être prise et récupérée contre nous en tout temps. On ne peut plus agir comme avant».

Nouveaux outils, nouvelles moeurs?

Si ces nouveaux outils permettent de supprimer les comportements indécents, tant mieux. Mais il me semble qu'il y a maintenant une hyper vigilance des paroles que l'on énonce. C'est normal, car toutes nos paroles peuvent être reprises en tout temps, «contre» nous. Malgré la liberté d'expression, on ne peut pas tout dire ni tout faire. Car oui, la liberté de l'un se termine là où celle de l'autre débute. C'est vrai. L'art de la séduction est devenu un vrai calvaire. Qu'est-ce qu'on peut dire, qu'est-ce qu'on ne peut pas dire? Est-ce acceptable? Comment va réagir la personne? Devions-nous vraiment réfléchir à tout cela il y a 30 ans, quand on voulait séduire au bar? Non. Aussi difficile et complexe soit-elle, cette réalité est celle des jeunes adultes en 2018.

Imaginez un monde dans lequel les interactions entre les individus sont écrites et archivées, où chaque mot peut être sorti de son contexte pour vous nuire.

Chose certaine, nous tous avons été jeunes, nous avons tous déjà dit des choses qu'on a regrettées. Mais généralement, la situation s'arrête là. Imaginez un monde dans lequel les interactions entre les individus sont écrites et archivées, où chaque mot peut être sorti de son contexte pour vous nuire. C'est lourd... Comme dans beaucoup de situations, il va falloir adapter nos comportements, les enseignements et les discussions que nous avons avec nos jeunes. Un compte Facebook, Instagram, un téléphone portable implique certaines responsabilités, une maturité et le fait que «tous mes amis en ont un» n'est peut-être pas une bonne raison pour procurer ce genre de chose à son enfant.

Oui, avec les médias sociaux, les gens ont de moins en moins tendance à se dire les choses en face. Une chose reste certaine: les paroles s'envolent, les écrits restent; les photos et les captures d'écran, elles, «fessent». Comme dans toute situation, «l'hyperconnectivité» a ses avantages et ses inconvenants. Jamais dans l'histoire du monde les distances géographiques ont été considérées comme si peu importantes.

Les individus doivent se prendre en main et faire attention, mais on doit aussi adapter les enseignements.

Les individus doivent se prendre en main et faire attention, mais on doit aussi adapter les enseignements. Serait-ce un bon prétexte pour réformer le fameux cours «d'éthique et culture religieuse», considérant que tous n'ont pas le gros bon sens nécessaire pour savoir ce qu'on peut dire ou non. Ce cours serait peut-être un bon prétexte pour ouvrir la discussion sur ce genre de problématique très actuelle, au lieu de passer des heures à surligner les 15 pages qui portent sur les obstacles au dialogue (bien qu'elles soient intéressantes).

Je tiens vraiment à dire que je trouve très dommage que certaines des jeunes filles impliquées dans la situation aient dû quitter l'école. Encore une fois, je pense qu'on a manqué une opportunité d'éduquer. Il faut d'ailleurs se pencher sur la question des jeunes filles. La décision de se prendre nu en photo n'est effectivement pas à prendre à la légère, mais je comprends leur affolement lorsqu'elles s'imaginent que leurs photos circulent. La question de la «sexualité ouverte» est de plus en plus présente sur les médias sociaux et les jeunes y sont de plus en plus exposés... Comment savoir ce qui est convenable ou ne l'est pas?

Les valeurs Maristes du vivre ensemble, du pardon et surtout de l'apprentissage auraient pu soutenir et faire évoluer les centaines de jeunes qui fréquentent mon ancienne école secondaire, dans laquelle j'ai passé cinq merveilleuses années. Je suis conscient que je ne connais peut-être pas tous les détails de cette situation, j'ai basé mon analyse et mon opinion sur les informations ayant été rendues publiques. Le but de ce texte était simplement d'essayer de conscientiser et de verbaliser les défis des jeunes en 2018, dont je fais partie, avec mes 19 ans.

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