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Plus que jamais, j'ai envie de redoubler d'effort pour m'adresser à la société dans son ensemble, et que chacun se reconnaisse dans le terme «à risque d'exclusion».
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À quelques jours d'une nouvelle vague de violence qui a secoué le monde, et dont un des rocs sur lesquels elle a déferlé - Paris - me remue particulièrement, on se sent traversé par bien des sentiments, des réflexions parfois contradictoires. Les réseaux sociaux, saturés d'informations, font vivre à leurs internautes vertige, tristesse, nausée. Après les coups de tonnerre, la pluie. On ferme l'écran, on va marcher, prendre l'air, sentir cette pluie sur la peau et la laisser, tranquillement, nettoyer le pavé.

Parmi ces promenades solitaires, au détour d'une rue, je me surprends avec cette réflexion: «malheureusement, longue vie à Exeko...»

Pourquoi «malheureusement»? Pourquoi souhaiter l'inverse à son employeur? Depuis mon arrivée à Exeko, plusieurs fois j'ai entendu ses deux cofondateurs dire qu'ultimement, l'objectif d'Exeko serait de ne plus exister. On rêve collectivement d'un monde ou le citoyen est outillé pour mieux comprendre la société dans laquelle il évolue et pour agir positivement, rendre plus inclusive cette société. Tellement outillé qu'il n'a plus besoin d'un organisme comme Exeko, qui vise à développer la pensée critique ou l'analyse sociale, à briser les préjugés. On rêve que chacun chausse ses lunettes de l'esprit critique, et que les verres en soient assez propres pour qu'avec clairvoyance, il fasse des choix libres et éclairés, détecte les sophismes (manipulation du discours ), navigue en contrôle parmi ses congénères. On souhaite de ne plus exister parce que le besoin n'est plus là.

Mais à quelques jours seulement de ces événements tragiques, qui en ravivent d'autres tout aussi tragiques partout sur la planète, j'en doute. Je doute devant cette marée naissante d'info - intox, de répression violente, de réactions impulsives, paradoxales, anti-inclusives, devant des raisonnements logiques qui flanchent, et surtout devant le constat qu'aujourd'hui certains décident d'enlever la vie à des êtres humains parce qu'ils se réunissent pour célébrer l'amitié, la culture, la jeunesse, la mixité, parce qu'ils jouissent de leur liberté.

Et c'est à cette étape de mon raisonnement que, plus que jamais, je crois que l'avenir ne se passera pas de cet entraînement à l'émancipation intellectuelle. Que plus que jamais, je crois en la cause pour laquelle je travaille. Que plus que jamais les mots que j'entends tous les jours depuis 4 ans prennent tout leur sens. Exeko l'opticienne a encore quelques années devant elle. Bien des paires d'yeux ne voient pas, ou plus clair. Et les verres s'encrassent si l'on ne les entretient pas. Plus que jamais, j'ai envie de redoubler d'effort pour m'adresser à la société dans son ensemble, et que chacun se reconnaisse dans le terme «à risque d'exclusion».

Dans mes rêveries un brin délavées de ces derniers jours, je me suis plusieurs fois surprise à regarder le ciel. Ce ciel universel, qu'on a tous au dessus de la tête. Ses parfaits dégradés, la poésie au crépuscule de la lumière qui perce une dernière fois à travers les nuages... La beauté de ce ciel là vaut la peine que l'on se batte pour chaque matin voir le soleil se lever, chaque soir, se coucher. Sur tous les continents.

La bonne nouvelle, c'est que le citoyen est porteur d'un tel potentiel, est capable de tellement d'amour, a encore tant de ressources dans le coffre, tellement de hargne à vivre... Cette flamme, cette volonté de conserver ce pourquoi on se bat ou s'est battu, cette conscience, ce bouillonnement d'intelligence, cette soif et cette capacité d'apprendre, de savoir, de comprendre, est la preuve que l'obscurantisme n'a pas sa place dans notre société, qu'il doit rester dans les manuels scolaires au chapitre Moyen Âge.

Un petit petit garçon anishinaabe a dit à l'une de mes collègues un jour: «Moi, dans ma tête il n'y a rien.. à part un cerveau». En plein dans le mille.

Alors oui, aux armes, citoyens, mais aux bonnes, s'il-vous-plaît. Aux seules qu'on devrait être autorisés à porter. Chaussez vos lunettes, enclenchez les engrenages logiques de vos cerveaux. Usez de l'autodéfense intellectuelle à tour de bras, kickez les sophismes, déconstruisez les amalgames, écoutez, regardez, osez, savourez, essayez, cherchez, démystifiez, partagez, pensez, soyez, vivez, aimez! Pour l'amour du ciel.

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