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Coderre et le BIG: éliminons les parasites de l'intégrité

Saviez-vous qu'en une seule journée le BIG (Bureau de l'inspecteur général) a annulé plus de 37,5 millions de dollars de contrats à des entrepreneurs à l'éthique douteuse?
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Saviez-vous qu'en une seule journée le BIG (Bureau de l'inspecteur général) a annulé plus de 37,5 millions de dollars de contrats à des entrepreneurs à l'éthique douteuse? Saviez-vous qu'une équipe de 32 personnes pluridisciplinaire et de grande expérience veille chaque jour sur l'argent des citoyens montréalais? Saviez-vous que le BIG a reçu plus de 1000 signalements d'employés, citoyens et entrepreneurs? Saviez-vous que Montréal est la seule ville canadienne à compter sur un BIG alors qu'il en existe plus de 250 aux États-Unis? Saviez-vous que les sonneurs d'alarme sont généralement ceux qui subissent le plus de conséquences négatives après avoir osé dénoncer?

Probablement pas puisque l'auditoire lors du premier symposium intitulé «Un inspecteur général, une valeur ajoutée» qui s'est tenu la semaine dernière à Montréal, était majoritairement composé de membres des forces de l'ordre, d'autorités réglementaires et de vérificateurs œuvrant dans le secteur public.

C'est pourquoi je me permets de vous en parler aujourd'hui brièvement. Je vous invite à consulter le site du BIG. Je tiens personnellement à féliciter le maire Denis Coderre d'avoir importé cette pratique du BIG qui nous provient de nos voisins du sud. J'ai adoré le légendaire franc parlé de monsieur Coderre lorsqu'il a présenté Me Denis Gallant et qu'il a dit qu'il était là «to kick some ass!»

Mais la grande question à nous poser est celle de savoir si nous détenons aujourd'hui les outils adéquats pour contrer la collusion sur le court, moyen et long terme. Sommes-nous capables d'éliminer les parasites de l'intégrité?

Le BIG est certainement une mesure d'encadrement très intéressante. Elle est une mesure permanente qui dissuade un peu plus les escrocs téméraires et permet d'identifier certains stratagèmes plus opaques.

Cependant, je m'inquiète de notre tendance à tout miser sur la conformité, l'encadrement et la répression. Depuis quelques années nous entendons parler de l'UPAC, du Bureau de la concurrence, de l'AMF, de la RBQ, du BIG, des tonnes d'encadrements vendus par les firmes comptables et juridiques, etc. Nous sommes en train de devenir une société de conformiteux! Certes, le bâton est nécessaire, mais la carotte aussi!

Saviez-vous qu'il existe 16 ingrédients à la confiance et que la conformité arrive au 12e rang dans cinq pays (sondage réalisé par l'ICO et la firme Léger auprès de 1500 participants)? Saviez-vous que moins de 30 % des employés considèrent le mot «éthique» comme étant positif? Saviez-vous que moins de 20 % des employés lisent leur code d'éthique? Saviez-vous que les enquêtes de l'UPAC auprès de plusieurs entreprises de construction prennent près de deux ans et en placent plusieurs sur le bord de la faillite? Saviez-vous que plus de 50 % des entreprises interdisent à leurs employés d'aller dîner ou d'assister à des événements avec leurs clients et partenaires d'affaires? Saviez-vous qu'à force de rechercher à tout prix le plus bas prix nous obtenons des projets de construction et de génie civil de piètre qualité et que les entrepreneurs généraux usent d'imagination pour regagner d'une manière ou d'une autre une plus grande marge de profit?

C'est pour dire à quel point la conformité n'est pas la pierre philosophale qui transformera notre société et éliminera les parasites de l'intégrité. Il est important de miser également sur la culture de nos organisations et de notre société.

Osons agir avec courage en mettant en place des mesures non seulement de répression, mais en adoptant des mesures qui auront des impacts réels sur le long terme. Il ne faut pas tout miser sur des mesures qui freineront, du moins temporairement, les élans des escrocs, lesquels trouveront des moyens de se réinventer.

Par exemple, le rapport de la Commission Charbonneau recommandait de remettre en question la règle du plus bas soumissionnaire conforme. Les Québécois devraient arrêter de jouer à l'autruche et accepter de payer plus cher pour des travaux de construction. Il n'est pas anormal qu'une entreprise de construction réalise seulement 5 à 10 % de marge de profit alors que les banques enregistrent 40 % de profits et les Google de ce monde plus de 50 %! Cantonner les entreprises de construction à 5 % de marge de profit n'est pas logique et même dangereux. Aucune personne du milieu des affaires ne veut prendre ce risque surtout quand les organismes publics prennent de 6 à 12 mois pour payer. Même aujourd'hui le vice est en train de se réinstaller plus hypocritement et insidieusement. Plusieurs grands entrepreneurs généraux, qui ont obtenu leur accréditation de contracter avec l'État, acceptent de gagner des contrats avec 5 % de marge ou même 0 %. Pourquoi? Elles vont en faire 20 % en fin de compte, car elles vont «squeezer» leurs sous-contractants qui, à leur tour, vont fournir moins de main-d'œuvre, moins de matériaux de qualité et moins de sécurité. Mais il faudrait du courage de la part de nos politiciens pour prendre ce pari.

Une autre approche intéressante serait de prendre le temps et de mettre les efforts pour choisir des dirigeants qui ne sont pas seulement des performants, bons vendeurs ou bons financiers. De choisir des gens avec un «quotient émotionnel» et des aptitudes humaines plus développées. Des chefs d'orchestre dont le modus operandi ne sera pas conditionné à 90 % par leur propre salaire et par le profit généré à court terme par leur organisation.

Mais à la source, il faudrait que les parents montrent l'exemple à leurs enfants en inculquant de vraies valeurs. Ne pas mettre trop l'accent sur le matériel, ne pas banaliser les paradis fiscaux, ne pas les pousser à toujours gagner, etc. Ne pas banaliser la fraude de Lionel Messi parce qu'il est un dieu du soccer...

Bravo à plusieurs initiatives en matière de conformité, mais n'oublions pas de miser sur la culture de nos organisations et de notre société.

Longue vie au BIG!

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Mai 2017

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