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L'Égypte est-elle gouvernable?

Aujourd'hui, alors que l'incertitude persiste en Égypte, une question se pose: ce pays est-il gouvernable? Trois scénarios se présentent en réalité après l'ultimatum posé par l'armée au régime, pourtant sorti des urnes.
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Aujourd'hui, alors que l'incertitude persiste en Égypte, une question se pose: ce pays est-il gouvernable?

Trois scénarios se présentent en réalité après l'ultimatum posé par l'armée au régime, pourtant sorti des urnes. Le premier serait celui d'un compromis politique entre les Frères Musulmans et les partis d'opposition. Ce compromis signifierait le partage du pouvoir en vue de l'organisation de nouvelles élections. Le second, est celui d'une prise de contrôle directe du pouvoir par l'armée. Une forme de putsch, de coup d'État militaire suscité par la rue. Le troisième quant à lui, qui est le plus inquiétant et certainement pas le moins probable, serait celui du chaos et de la guerre civile. Aujourd'hui, il est très difficile de dire quel scénario risque de s'imposer.

Il faut considérer que ce qui est en train de se dérouler sous nos yeux constitue la troisième étape du processus révolutionnaire. La première est celle de la chute de Moubarak, poussé à quitter le pouvoir par la rue et abandonné dans sa déchéance par l'armée. Dans cette première phase, l'armée qui a géré la transition a fait preuve de son incapacité à assumer le pouvoir et de gouverner de manière efficace.

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Les manifestants sur la place Tahrir au Caire lundi 1er juillet

Les manifestants place Tahrir au Caire le 1er juillet

La deuxième étape, est celle de l'arrivée au pouvoir, dans un système électoral caractérisé par la légitimité des urnes, des Frères Musulmans. De la manière la plus légale et légitime qui soit, Mohammed Morsi est élu avec une majorité cependant faible. Il hérite dès lors d'une économie fragilisée et d'une société divisée. Pendant cette année au pouvoir, Morsi a fait preuve de son incompétence, mais surtout de son intolérance. Juste avant l'élection qui l'a menée au pouvoir, il bénéficiait de 57% d'opinions favorables. À l'aube des événements du week-end dernier, sa cote de popularité a vertigineusement chuté s'élevant alors à 28% selon les dernières enquêtes. Ainsi, le rejet est profond et regroupe des forces diverses et temporaires réunies pour dire "non" et "dégage" au régime de Morsi.

On retrouve dans cette coalition hétéroclite les libéraux et les démocrates qui ont lancé la contestation il y a deux ans et fait tomber Moubarak. Ceux-là ont alors l'impression que la Révolution qu'ils ont menée leur a été confisquée. À ceux-ci s'ajoutent les 30% de nostalgiques du dictateur déchu, anciens bourreaux ou sympathisants du pouvoir précédent, ils sont aujourd'hui mobilisés place Tahrir parce qu'ils regrettent la chute de Moubarak. Une autre force non négligeable s'est également jointe à la révolte. Situés à l'extrême droite de l'échantillonnage politique égyptien, les salafistes regrettent eux que Morsi ne soit pas assez radical et conservateur en matière de mœurs. Pour certains, l'actuel président est trop islamiste, pour les salafistes en revanche il ne va pas assez loin et ceux-ci contestent alors la manque de radicalisme de la part du représentant des Frères Musulmans.

Dans ce contexte, l'armée est, comme hier, l'acteur clé des événements en cours. L'institution militaire incarne aujourd'hui à la fois la légalité ayant permis à Morsi d'arriver au pouvoir, mais aussi une certaine légitimité populaire héritée du combat antérieur. Cette armée ne veut pas le pouvoir, car elle a appris à ses dépens qu'elle n'était pas qualifiée pour gérer le pays. Face aux risques d'une violente guerre civile (n'oublions pas que le spectre de la Syrie plane sur la contestation égyptienne) l'armée peut considérer qu'elle incarne la dernière chance de salut démocratique du peuple égyptien.

Dans le monde arabe, chaque pays présente un contexte différent. Cependant, l'Égypte peut devenir le centre névralgique de l'explosion révolutionnaire dans la mesure où le pays ce situe au cœur du monde arabe tant sur le plan démographique (il y a quatre fois plus d'habitants qu'en Syrie) que culturel marqué par la richesse de son patrimoine et de son rôle central à travers l'histoire.

Ce qui se passe en Égypte aujourd'hui sera décisif pour l'ensemble de la région et du monde islamique pour demain.

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