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Juste un mot: algorithme

On nous avait prévenus: si vous continuez à faire n'importe quoi, vous autres journalistes, on vous remplacera par des algorithmes qui produiront des contenus d'actualité. Sans faire d'histoire.
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On nous avait prévenus: si vous continuez à faire n'importe quoi, vous autres journalistes, on vous remplacera par des algorithmes qui produiront des contenus d'actualité. Sans faire d'histoire. Et sans états d'âme, eux, sans mélanger l'info et le commentaire. On nous avait prévenus. Si vous n'êtes pas sages. De même, dans un ouvrage visionnaire sinon prophétique, l'excellent romancier Philippe Vasset avait en 2002 imaginé des logiciels de data-mining et d'intelligence artificielle capables de produire des best-sellers à la chaîne sans passer par la pénible case auteur (les écrivains aussi sont si compliqués, avec leurs histoires d'inspiration, de pannes, etc.). C'était dans Exemplaire de démonstration (ed Fayard).

Aujourd'hui, nous y sommes presque. La société Short Edition travaille à la mise en oeuvre d'un outil fondé sur la technologie du Machine Learning qui serait capable, dans un premier temps d'aider la maison d'édition à sélectionner les textes qu'elle reçoit en les comparant à une base de données géante de textes (jugés) de qualité. On élimine ainsi les manuscrits pleins de fautes, de ponctuation excessive ou de langage parlé trop appuyé, explique le fondateur de la maison au site ActuaLitté le 21 juillet dernier. Sans commentaire. Gageons que Céline ou Bukowski auraient eu un peu de mal avec ce concept.

D'un autre côté, une start-up de Caroline du Nord, Automated Insights, en collaboration avec la base de données Zacks Investment Research va fournir à Associated Press, la grande agence de presse américaine des dépêches et articles pour son fil financier international. Une entreprise de Chicago a déjà essayé ça avec les commentaires des résultats sportifs, articles souvent basés sur des statistiques de performances, il est vrai. Au centre de ces deux exemples, nos chers amis les algorithmes. Vous les nourrissez en données bien sagement ordonnées (chiffres ou romans) et ils vous fournissent des papiers d'actu ou des appréciations littéraires. Elle n'est pas belle la vie?

Au fait, d'où vient-il ce mot bizarre, algorithme, auquel on est souvent tenté de glisser un y à la place du i? Ça vient d'Ouzbékistan, plus exactement de la ville de Khwarezm ou Huwarizm (Khiva aujourd'hui). C'est là que naquit en 780 un grand mathématicien nommé Abu Ja'far Mohammed Ben Mussa dit Al-Khwarizmi, ou Al Huwarizmi. Ce génie, qui fixa les principes de la numérotation décimale et fonda l'algèbre, vécut jusqu'en 850 à Bagdad à la cour du calife Al-Maamoun. Son traité fut traduit en latin par Gérard de Crémone sous le titre "Dixit Algorismi". Le mot passa à l'espagnol (alguarismo) et au français augorisme au début du XIIe siècle pour désigner l'arithmétique arabe.

Pourtant, ce vieux mot nous semble à nous terriblement moderne, lorsqu'il est utilisé dans le sens de mécanique logique réglant le fonctionnement d'une intelligence artificielle. On voit des algorithmes partout sur Internet. Ils associent, mettent en avant, font ressortir, classent, produisent du sens, bref ils sont devenus indispensables. Et si en plus, ils peuvent remplacer les journalistes, profession dont je rappelle qu'elle est classée dans les échelles de confiance des sondages tout en bas, avec les agents immobiliers, ils vont commencer à avoir vraiment bonne presse auprès des habituels contempteurs des médias. Jusqu'au jour où l'on verra ces adeptes du media-bashing dénoncer leur toute-puissance et organiser la résistance contre les robots. Ce sera drôle.

En effet, il faut quand même rappeler que les robots sont nourris de l'existant, des données historiques, de ce qui était là avant... Dans ce sens, ils seront parfaits pour défendre l'ordre établi! Si vous avez aimé haïr les «chiens de garde» de la «pensée unique», vous adorerez détester les robots de l'information calibrée.

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