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Sexualité et cancer du sein, la difficile équation

Une autre difficulté liée à l'ablation du sein, c'est la perte totale de sensation physique sur la zone concernée. Les caresses ne vous font plus rien, le mamelon et la zone avoisinante deviennent insensibles. Selon mon chirurgien esthétique, certaines femmes finissent par retrouver des sensations mais ça ne m'est jamais arrivé.
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Aux États-Unis, une octogénaire sur huit a eu, dans sa vie, un cancer du sein. Le taux de mortalité de ces cancers est de près de 19%. Si vous êtes une femme de plus de 40 ans, je vous conseille vivement d'aller faire une mammographie. Il y a 13 ans, j'ai appris que j'avais un cancer du sein et je ne suis en vie que parce que j'en ai fait une. J'avais un cancer de type CCIS (carcinome canalaire in situ), ce qui veut dire qu'il était principalement confiné aux canaux galactophores. Quand ce cancer est diagnostiqué à temps, le pronostic est excellent et si, comme moi, vous avez de la chance, les ganglions lymphatiques ne sont pas affectés. Seule une mammographie permet de détecter les cancers de ce type, car aucune tumeur n'est décelable au toucher.

Même si je vais bien, et que je n'ai plus de cancer du sein, je dois avouer que cet épisode a changé ma vie. Je n'aurais jamais pensé être victime d'un cancer. Après tout, je n'avais aucun antécédent familial quand, à 47 ans, alors que j'étais la maman de trois merveilleux enfants et que je venais de fêter mes 25 ans de mariage, les médecins ont considéré que ma mammographie annuelle présentait des « anomalies ».

Ils m'ont laissé le choix entre une excision radicale de la zone touchée - qui me laisserait avec un sein difforme et nécessiterait une radiothérapie - et une mammectomie, suivie d'une reconstruction chirurgicale. Après m'être renseignée et en avoir parlé à d'autres femmes, j'ai opté pour la seconde option. L'opération et la guérison immédiate ont été un succès, mais ils ont dû prélever une partie de mon muscle grand dorsal pour la reconstruction et je souffre depuis d'une faiblesse neuromusculaire sur tout le côté droit, ce qui me rappelle constamment ce qui m'est arrivé.

Un autre rappel concerne la difformité relative que cela a entraîné, et la gêne qu'elle a occasionné dans ma vie sexuelle. J'ai de la chance d'avoir un mari compréhensif et une famille qui se rend compte que je suis la même qu'avant, avec des cicatrices en plus. Dans les jours qui ont suivi l'opération, je me souviens que je ne me trouvais pas séduisante, mais le chirurgien et mon mari ont eu des mots encourageants et n'ont pas arrêté de me répéter que j'étais belle et que je ne devais pas hésiter à porter des tenues provocantes dès que j'en aurais l'occasion : d'abord chez moi, puis quand je sortirais. J'en ai pris l'habitude. Arrivée à la soixantaine, je me soucie moins de l'opinion des gens. Je veux me sentir bien, et le plus important, c'est l'image que l'on a de soi.

Une autre difficulté liée à l'ablation du sein, c'est la perte totale de sensation physique sur la zone concernée. Les caresses ne vous font plus rien, le mamelon et la zone avoisinante deviennent insensibles. Selon mon chirurgien esthétique, certaines femmes finissent par retrouver des sensations mais ça ne m'est jamais arrivé. J'ai appris à accepter ces changements, et à me réjouir d'être toujours en vie. J'ai également compris que le fait de vieillir implique de savoir s'adapter aux changements à la fois physiques et psychologiques.

Pour ne pas craquer pendant les jours qui ont suivi l'opération, je me suis concentrée sur ma guérison interne, et j'ai fait de la visualisation positive. Chaque soir, j'écoutais un programme thérapeutique audio. J'ai appris à laisser venir les choses, et à profiter du moment présent. La pensée positive et la méditation ont joué un rôle important. J'ai aussi tenu un journal, et publié un livre de développement personnel, Healing with Words: A Writer's Cancer Journey (non traduit en français).

Cinq ans après mon premier diagnostic, les médecins ont décelé un second cancer: un myélome multiple (cancer de la moelle). Ils m'ont assuré qu'il n'y avait aucun lien avec mon cancer du sein, mais comment pouvaient-ils en être certains ? Je me dis instinctivement que c'est un signal pour m'encourager à écrire davantage. Ce genre de cancer est malheureusement incurable, mais la recherche progresse et différents types de traitement sont à l'essai. Heureusement, huit ans après mon diagnostic, je n'ai pas encore eu besoin d'être soignée et il se peut que je n'en aie jamais besoin. En grande partie parce que je suis attentive à mes besoins physiques et psychologiques.

En tant qu'écrivain et psychologue transpersonnelle, je recommande de tenir un journal dans le cadre du processus thérapeutique parce que l'écriture nous oblige à être à l'écoute de notre corps et conduit vers le chemin de la guérison affective. J'ai commencé à tenir mon journal à l'âge de 10 ans. J'y partage mes opinions, mes passions, mes pensées, mes peurs et tout ce qui me passe par la tête.

Beaucoup de femmes ont tenu un journal pour raconter leur cancer du sein, pour le partager avec leur famille ou bien pour pouvoir y revenir par la suite. Parmi les journaux et les livres qui ont été publiés sur ce sujet figurent ceux d'Audre Lorde, May Sarton, Betty Rollin, Rose Kushner, Hilda Raz et Elizabeth Berg, pour n'en citer que quelques-unes.

Même si les incisions consécutives à mon cancer du sein sont moins visibles, et bien que j'aie repris ma vie de tous les jours, les blessures émotionnelles et physiques liées à ce cancer ne s'effaceront jamais. Quand vous remplissez un dossier médical, on vous demande si vous avez déjà eu un cancer, ce qui vous rappelle à nouveau les épreuves que vous avez traversé. Quand vous allez vous faire masser, il faut évoquer les cicatrices aux endroits inhabituels. Quand mes enfants me demandent s'ils ont des antécédents liés au cancer, je dois m'assurer qu'ils sont conscients des risques qu'ils encourent, et notamment de l'importance de faire eux-mêmes des enfants le moins tard possible. Quand une amie ou quelqu'un de la famille traverse une épreuve similaire, on me sollicite parfois, ce qui ravive les mauvais souvenirs.

J'ai appris, et je dis aux autres, que les cicatrices psychologiques mettent généralement plus de temps à guérir. Il est vital de s'entourer au maximum de personnes positives, avec qui vous vous sentez bien. On ne peut pas faire comme si le passé n'existait pas, où ignorer ce qui nous a amené là où on est, mais il n'est pas inutile de se souvenir qu'il est toujours possible de transcender tout ce qui nous arrive, même si cela nous semble insurmontable sur le moment.

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