Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Laïcité: pour rendre acceptable le projet de loi

Le projet de loi 62 sur la neutralité de l'État, déposé le 10 juin dernier, ne peut pas devenir une loi dans sa formulation actuelle.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Madame la ministre Stéphanie Vallée,

Votre projet de loi 62 sur la neutralité de l'État, déposé le 10 juin dernier, ne peut pas devenir une loi dans sa formulation actuelle. Car il est d'abord sans contenu autre que de rappeler la prépondérance des Chartes québécoise et canadienne, donc la primauté des droits individuels, en particulier la liberté de religion sur tout droit collectif, dont il ne fait aucunement mention et, encore moins, de la notion d'identité québécoise.

Non seulement ce projet de loi ne renforce que le statu quo mais encore il va jusqu'à légitimer, au-delà de toute mesure raisonnable, la présence des signes religieux ostentatoires dans les institutions de l'État neutre, principalement en autorisant le tchador, un vêtement ultra religieux, signe reconnu d'oppression et de soumission de la femme par le premier ministre lui-même en 2014 . Et quant à la burqa et au niqab, signes encore plus dégradants pour les femmes en cachant leur visage, leur port en est interdit seulement pour des raisons de communication, d'identité ou de sécurité, en occultant leur caractère hautement sexiste

C'est donc la totale à l'encontre de ce que voulaient les Québécois et surtout les Québécoises en appuyant majoritairement le projet de loi 60 de Bernard Drainville qui universalisait l'interdiction des signes religieux ostentatoires dans toutes les institutions publiques au nom de la laïcité, de la neutralité de l'État et des personnes qui le représentent.

Par cette lettre, je m'adresse à vous afin que vous ajoutiez à votre projet quelques dispositions qui le rendraient acceptable, entre autres par l'institution d' une forme de laïcité au moins minimale, en tout respect pour le débat qui a passionné les Québécois pendant près de deux ans.

Ce modèle de laïcité réduit pourrait s'inspirer des considérations suivantes:

1) La neutralité de l'État s'est affirmée progressivement tout au long de la révolution tranquille .C'est aujourd'hui un fait que les religions n'influencent plus son pouvoir décisionnel.

2) Tout au long de cette révolution ,dans un esprit de tolérance, mais aussi dans un esprit de laïcisation des institutions ,les signes et vêtements religieux se sont faits de plus en plus discrets et rares, et cela, sans qu'il soit nécessaire de règlementer ou d'interdire.

3) Mais depuis une vingtaine d'années, ils sont réapparus de façon ostentatoire comme un phénomène inattendu relié à une certaine immigration à la fois mal informée de notre culture et aussi trompée à répétition par le multiculturalisme canadien qui sous-tend toutes les interprétations, relevant des cours, de la Charte canadienne des droits imposée au Québec en 1982 et qui, à chaque fois, renforcent la liberté de religion individuelle sans égard à la culture majoritaire du Québec.

4) La seule façon de protéger et de susciter le respect et l'intégration à cette culture majoritaire consiste à l'affirmer en osant paramétrer son évolution par une triple décision de l'Assemblée nationale, laquelle serait:

a) Déclarer toutes les institutions publiques laïques, c'est-à-dire que la liberté de conscience y est première et distancée du religieux

b) Déclarer que dans ces espaces laïques les signes religieux présents ou portés par les agents de l'État perdent symboliquement leur caractère cultuel pour y représenter exclusivement trois valeurs québécoises depuis toujours rassembleuses: liberté, fidélité, partage.

c) Déclarer qu'à chaque année, une journée de la laïcité sera célébrée et toutes les personnes dans les institutions publiques seront invitées à aller au travail sans porter de signes religieux, dans le but de marquer le caractère primordial de la liberté de conscience, avant tout choix religieux, ce qui est de première importance pour tous les Québécois.

En conclusion, Madame la ministre, il serait séant et de bon ton politiquement si vous amélioriez votre projet en invitant non seulement la majorité québécoise à la tolérance, mais aussi les minorités religieuses à l'ouverture, au respect et à la compréhension de notre culture.

Ainsi, le Québec ferait un pas en avant concernant une identité commune souhaitée par tous les citoyens et citoyennes du Québec. Si vous refusez mes suggestions, ou d'autres qui visent à améliorer votre projet, si vous ne corrigez rien et allez de l'avant avec votre projet actuel, vous n'allez qu'accentuer les divisions entre les minorités et la majorité. Et je pense que ce n'est pas cela que vous souhaitez.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Le hijab

Hijab, burqa, niqab ou tchador?

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.