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Vous avez raison Madame Louise Mailloux, mais...

D'entrée de jeu, vous affirmez: «Si ces femmes avaient été voilées, auraient-elles été agressées par ces hommes arabes? Je pense que non.» En fait, vous n'en savez rien [...]
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Les agressions sexuelles de masse à Cologne soulèvent une question essentielle, dites-vous, dans votre texte publié dans Le Devoir du 25 janvier et intitulé Cologne, et après? D'entrée de jeu, vous affirmez: «Si ces femmes avaient été voilées, auraient-elles été agressées par ces hommes arabes? Je pense que non.»

En fait, vous n'en savez rien puisque les reportages, sauf erreur, concernant cet événement ne nous ont pas montré lors de ce Nouvel An, au même endroit et au même moment que des femmes voilées étaient épargnées ou respectées par ces hordes de mâles en rut qui d'ailleurs n'étaient pas tous arabes.

Souvenez-vous que pendant les grandes manifestations en Égypte, lors du printemps arabe, et en plein jour, une telle horde avait arraché les vêtements islamiques, voile y compris ou presque, d'une femme pour la violer en pleine rue. Les télévisions nous avaient montré en boucle cette scène pendant des jours. De cela, convenons que le voile est dérisoire comme protection face à la bête sexuelle.

Pourtant, vous n'aviez pas besoin de cette présomption pour développer votre argumentaire parce que si le voile était une barrière efficace contre les agresseurs sexuels les soirs de partys, ce serait plutôt un argument en sa faveur à côté de tous les autres que vous développez en sa défaveur et je vous cite:

1) «Il participe d'une idéologie patriarcale.

2) Cacher ses cheveux, son cou, ses oreilles, ses bras et ses jambes, c'est reconnaître que la femme est un objet sexuel.

3) Cacher ainsi son corps, c'est accepter de n'être défini que par le regard des hommes. C'est se constituer en objet au lieu de se comporter en sujet libre et autonome.

4) Le voile islamique représente la triste et silencieuse liquidation de plusieurs décennies de luttes féministes qui ont permis aux femmes d'aujourd'hui d'avoir droit au sexe.

5) Contrairement à ce que prétendent les pro-voiles, celui-ci n'est pas un symbole d'émancipation, mais bien un prodigieux symbole d'aliénation, le voile islamique nous fait reculer de quelques siècles.

6) Porter et défendre le voile, c'est partager la même vision, la même idéologie que ces hommes arabes qui ont agressé des milliers de femmes non voilées. Le voile islamique n'est que l'autre face d'une même médaille.

7) On ne peut pas laisser des éducatrices musulmanes en garderie et des enseignantes musulmanes dans nos écoles publiques, porter un symbole sexiste.

8) On devrait également interdire le port du voile pour les filles fréquentant l'école publique. Protéger les mineures et envoyer un message clair sur l'égalité des sexes.»

Peut-être avez-vous raison pour ce qui est des femmes voilées en Arabie Saoudite, en Iran et dans plusieurs autres pays musulmans où le voile, comme vous le dites avec justesse, participe d'une idéologie patriarcale.

Mais au Québec, de mettre sur le même pied les femmes voilées d'ici, n'est-ce pas faire peu de cas de la culture québécoise affranchie depuis longtemps du patriarcat religieux, sinon de tout patriarcat, et de prétendre que nos femmes voilées, souvent des professionnelles, n'y sont pas sensibles et que malgré l'influence de notre culture, elles demeurent essentiellement aliénées?

Il est vrai, cependant, que la culture québécoise devrait se raffiner pour être claire et attrayante en ajoutant un dernier fleuron à notre révolution tranquille, soit un régime de laïcité. Mais pas une laïcité d'interdiction violente comme vous le préconisez, mais une laïcité d'invitation à la liberté de conscience et pourquoi pas à la liberté sexuelle qui s'arrête là où celle de l'autre commence?

Je vous remercie pour votre texte en espérant qu'il relancera le débat de la laïcité.

Aujourd'hui, sur ce blogue, j'ajouterai ceci à mes propos: Madame Mailloux, votre diabolisation du voile ne nuit-elle pas à la recherche de tout consensus autour d'une formule de laïcité qui conviendrait au Québec? Ne faites-vous pas, par votre attitude et vos propos, de la laïcité, essentiellement, un «anti-voilisme» que nos multiculturalistes ont eu toutes les raisons de combattre au nom de la liberté de religion protégée par les chartes?

Le litige juridique connu entre vous et la jeune voilée Dalila Awada ne serait-il pas l'occasion d'une entente à l'amiable non seulement personnelle, mais aussi sociétale? Toutes deux, vous avez été des actrices remarquées lors du débat sur la Charte des valeurs. Pourriez-vous devenir les vedettes d'une réconciliation en proposant ensemble une voie de sortie, gagnante-gagnante, concernant la laïcité au Québec, une laïcité compatible avec les Chartes des droits?

Pour y arriver, vous pourriez, ou non, vous inspirer de mes propositions déjà présentées sur ce blogue et, récemment, dans un billet intitulé: Parcours d'un laïque hétérodoxe.

Il me semble que le premier pas vous reviendrait Madame, puisque vous tenez une position très dure, bien qu'appuyée par plusieurs femmes, à l'encontre des signes religieux dans l'espace public institutionnel.

À ce moment-ci, pour sauver au moins le concept de laïcité, votre conscience autoriserait-elle une tolérance plus grande? Et si c'était le cas, et que la même ouverture était démontrée de la part de Madame Awada, tout le Québec serait à votre écoute, et peut-être même enchanté de connaitre de votre part une position commune à l'égard de la laïcité.

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