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Réforme Barrette: l'arbre qui cache la forêt

En mettant ainsi l'accent sur les ratés potentiels de la réforme administrative du ministre Barrette, on a négligé de parler de l'objectif de long terme de cette réforme: la privatisation.
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La proposition de réforme majeure du système de santé du ministre Gaétan Barrette s'est attiré des critiques de toute part par ses déficiences administratives, mais aussi parce qu'elle ne répondrait pas à la priorité qu'est que le problème de l'accès aux soins. On a accusé aussi le ministre, en abolissant notamment les Centres de santé et de services sociaux (CSSS), de vouloir concentrer tous les pouvoirs dans ses mains et dé-démocratiser le réseau, allant à l'encontre de la réforme décentralisatrice de 2003 proposée par Philippe Couillard, alors ministre de la Santé, réforme qui créait les CSSS.

En mettant ainsi l'accent sur les ratés potentiels de la réforme administrative du ministre Barrette, on a négligé de parler de l'objectif de long terme de cette réforme: la privatisation.

Nous avons donc un projet de réforme majeure qui vise la concentration des pouvoirs autour du ministre. À la lumière de cette réforme, comment comprendre les objectifs plus généraux et de long terme du gouvernement libéral de Philippe Couillard ? Cette réforme centralisatrice ne servirait qu'à aplanir le terrain, en supprimant tous les contrepouvoirs du réseau, pour une réforme plus en profondeur encore qui viserait, à terme, à y introduire de façon significative le privé.

À moins bien sûr de penser que le gouvernement navigue à vue et qu'il vogue de tactique en tactique sans avoir de stratégie pour leur donner une cohérence, la question à poser aux libéraux concerne l'étape qui suivra cette centralisation du réseau de la santé. On ne doit pas être aveuglé par la forêt (soir la réforme centralisatrice) qui cache l'arbre (soit la stratégie libérale d'ouvrir le réseau à une privatisation importante).

D'ailleurs, une armée de lobbyistes campe nuit et jour devant la tente du gouvernement pour le convaincre de partir à l'assaut du caractère public du secteur de la santé. Par exemple, Jean Coutu, par du lobbying, travaille déjà fort pour s'assurer la gestion des futures supercliniques promises par Philippe Couillard.

Les perspectives commerciales de l'ouverture de la santé sont trop importantes et trop alléchantes pour que les entreprises privées laissent toute cette manne dormir dans le secteur public. Dans plusieurs rapports, l'OCDE parle d'ailleurs de l'importance de la modernisation (quel beau mot vertueux !) des systèmes de santé, une autre façon de dire que la modernité doit être privée ! Ce que Philippe Couillard et ses ministres libéraux ont compris.

Philippe Couillard, plus fin renard que Jean Charest, va donc avancer en deux temps (centralisation puis privatisation progressive), plutôt que de proposer d'emblée une réingénierie de l'État (lire une privatisation massive et rapide du secteur public), qui signifierait une levée de boucliers automatique. Il nous propose donc une réingénierie de l'État progressive (et non pas progressiste). En bon stratège, Philippe Couillard sait très bien qu'une réforme administrative n'est pas de nature à enflammer les esprits jusqu'à les amener à protester dans la rue. Mais voilà, peut-être faudrait-il déjà commencer à s'enflammer avant de s'éviter un réveil brutal d'ici quelques années?

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