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On perd tous dans le deal Uber

À la façon d'Hollywood, Uber et le gouvernement du Québec se sont entendus in extremis sur les conditions qui permettraient à la compagnie californienne d'opérer ici pour la prochaine année.
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À la façon d'Hollywood, Uber et le gouvernement du Québec se sont entendus in extremis sur les conditions qui permettraient à la compagnie californienne d'opérer ici pour la prochaine année. Certains s'en réjouissent, d'autres hurlent à la lune, mais au final le gouvernement a tranché. Il y aura du service de ride sharing au Québec.

Bien que certains éléments restent à clarifier, on sait déjà que la compagnie devra collecter et remettre les taxes à la consommation, qu'elle devra verser une contribution dans un fond de modernisation de l'industrie du taxi et qu'elle sera limitée à 50 000 heures de service par semaine pour la province en entier si elle ne veut pas dépasser le seuil minimal de contribution. Analysons ces trois items un à un.

Pour ce qui est des taxes à la consommation, il n'y a rien de vraiment surprenant à ce sujet. En effet, toute entreprise opérant sur le territoire de la province de Québec et ayant plus de 30 000$ de revenus annuels doit faire la même chose. Il y avait un argument intéressant disant que chacun des chauffeurs était travailleur autonome ayant moins que ce seuil de revenus et qu'ainsi, Uber devrait se voir exonérer du système. L'argument se défend, mais on a décidé de trancher autrement. Aucune mention des impôts corporatifs et de l'évasion fiscale toutefois, un sujet chaud qui fait mal à Uber et mérite d'être réellement discuté. Les chauffeurs de taxi aussi ont des devoirs à faire à ce sujet.

Uber a révolutionné l'industrie du taxi et pour la remercier, on lui demande de financer l'amélioration nécessaire de ses compétiteurs directs.

Les deux autres éléments sont nettement plus choquants. En premier lieu, chaque course Uber devra se traduire en une contribution progressive de 0,90$ à 1,26$ dans un fond de modernisation de l'industrie du taxi. Le seul besoin de créer ce fond est une absurdité sans nom et démontre que l'industrie du taxi québécoise avait besoin d'une bonne claque au visage. Sans Uber, nous devrions encore vivre dans un système archaïque, défendu par une association de chauffeurs corporatiste et complètement déconnectée des réalités d'un marché libre et sain.

Uber a révolutionné l'industrie du taxi et pour la remercier, on lui demande de financer l'amélioration nécessaire de ses compétiteurs directs. Les représentants des chauffeurs de taxi s'affairent déjà à déchirer leurs chemises collectives sur la supposée iniquité de ce deal, mais à moins de s'appeler Alexandre Taillefer, jamais une industrie ne se ferait financer gratuitement pour entrer au 21e siècle. Cette contribution est absurde et les utilisateurs québécois en paieront les frais. Dans les années passées, l'industrie du taxi a engrangé confortablement les profits sans se soucier de réinvestir dans ses infrastructures. Maintenant, les utilisateurs doivent payer plus cher pour rattraper l'avarice protégée par le système oligopolistique du passé.

Le dernier élément de cet accord est tout aussi surprenant. Uber ne pourra pas fournir de service au-delà des 50 000 heures hebdomadaires sans verser plus de contribution. En équivalence de quarts de travail de 8h, la somme de ces heures ne donne qu'à peine 892 chauffeurs Uber en moyenne par jour pour la province en entier. Sachant qu'en ce moment, 8 300 permis de taxis sans restriction ne suffisent pas à la demande en période de pointe, l'ajout semble bien mince.

Cette limite d'heure est toutefois ridicule puisqu'on sait que la période de fin de semaine est la plus sensible aux besoins en transport payant. La clientèle de la sortie des bars, de la fin des spectacles d'un festival ou simplement le retour à la maison de travailleurs de soir souffre déjà des ratées de l'industrie actuelle. Pas besoin d'être un oracle pour déduire qu'en période de pointe, Uber atteindra rapidement son quota et on se retrouvera au même point qu'avant. Évidemment, dans la réalité Uber ne limitera pas ses heures totales et les chauffeurs de taxi auront un cadeau encore plus juteux, toujours aux frais des usagers.

L'industrie du taxi devrait dire merci au ministre Lessard, à tous les jours pour la prochaine année, pour cette entente largement en leur faveur. Gageons que ces bébés gâtés n'en feront rien, comme d'habitude.

Hier soir tard, nous avons eu droit à toute l'étendue de l'attitude autodestructrice des chauffeurs de taxi. À la sortie du match préparatoire de la Coupe du monde de hockey au Centre Vidéotron, à Québec, aucun taxi n'était présent pour reconduire les milliers de spectateurs festifs qui devaient revenir chez eux, un soir de pluie. Pas seulement cinq ou dix taxis, z-é-r-o.

Puisque ce blogue est public, je dois modérer mon langage, mais je dirais simplement ceci : si les chauffeurs de taxi étaient de vrais hommes d'affaires stratégiques, plutôt que des enfants rois en pleine crise du bacon, ils auraient donné un rabais à la clientèle hier soir pour les fidéliser, en plus de s'assurer de fournir plus de taxis que nécessaires à ceux-ci pour un retour rapide et efficace à la maison. Au lieu de cela, des milliers de clients sont déçus, désabusés et haineux envers eux. Je suis sans mot devant cette démonstration de stupidité stratégique. Qui conseille ces gens?

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