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Pourparlers au sujet de la Corée du Nord à Vancouver

Que recherche la Corée du Nord ? Avant tout, préserver son régime.
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Seul un accord généralisé entre les États-Unis et la Chine pourrait faire avancer les choses.
KCNA KCNA / Reuters
Seul un accord généralisé entre les États-Unis et la Chine pourrait faire avancer les choses.

Une ultime tentative de résolution diplomatique de la crise en Corée se tiendra à Vancouver le 16 janvier 2018.

La Corée du Nord s'est lancée dans un programme balistique et nucléaire qui a de quoi inquiéter, d'autant plus que le dictateur nord-coréen est vénéré comme un dieu par une population miséreuse. Ses missiles peuvent atteindre les États-Unis et le dernier essai de bombe atomique du 6 septembre est 17 fois plus puissant que la bombe qui fut larguée sur Hiroshima vers la fin de la Seconde Guerre mondiale. Durant l'année 2017, une série d'envois de missiles nord-coréens dont la portée augmente dangereusement a été démontrée.*

L'escalade de la tension

Cette réunion à Vancouver est la suite d'une joute verbale qui n'est pas faite pour calmer les esprits entre le président américain Trump et le leader nord-coréen Kim Jong-un : le président Trump a qualifié le leader coréen Kim de petit Rocket man, avançant que la Corée du Nord pourrait ne plus exister et que les réponses militaires étaient en place. Kim Jong-un a souhaité ses vœux de bonne année en précisant que le bouton de commande d'envoi d'arme nucléaire se trouve sur son bureau et que les missiles nord-coréens peuvent atteindre les États-Unis. Par ailleurs, le secrétaire d'État Tillerson a déclaré vouloir garder ouverte la communication avec la Corée du Nord.

Par le passé, le régime nord-coréen a cherché à donner l'impression que s'il était acculé au pied du mur par les sanctions onusiennes, il pourrait réagir de façon irrationnelle.

Par le passé, le régime nord-coréen a cherché à donner l'impression que s'il était acculé au pied du mur par les sanctions onusiennes, il pourrait réagir de façon irrationnelle. C'est ainsi qu'il a obtenu des avantages économiques en échange de promesses qu'il n'a jamais respectées : les essais atomiques et balistiques se sont poursuivis. En déclarant que son bouton d'activation d'armes nucléaires est plus gros, Trump a fait savoir qu'il ne se laisserait pas impressionner par les menaces nord-coréennes ni prêter foi à des promesses de dénucléarisation creuses de la Corée du Nord.

Mais ce jeu de good cop bad cop ne s'arrête pas là. Des bombardiers et des navires de guerre américains se sont rapprochés de la Corée; la Corée du Sud a installé un système de protection antibalistique THAAD. Le Japon et la Corée du Sud qui bénéficient de la protection américaine planifient des manœuvres conjointes.

Les initiatives nord-coréennes qui s'inscrivent dans la logique de chaud et froid se poursuivent. Le pouvoir nord-coréen a décidé de rétablir un « téléphone rouge » avec la Corée du Sud. Ce moyen de communication d'urgence avait été mis en place entre 1972 et 2016.** Dans son message du Nouvel An, Kim a annoncé son intention de participer aux Jeux olympiques d'hiver au mois de février à Pyeongchang en Corée du Sud et proposé des pourparlers entre les deux Corées le 9 janvier au village frontalier de Panmunjom. Les États-Unis et la Corée du Sud ont accepté conjointement de suspendre leurs exercices militaires conjoints durant la tenue de ces Jeux.

Les grandes puissances

Mao Tse Toung avait coutume de dire que la Chine et la Corée sont telles les dents et les lèvres pour souligner que leurs destinées étaient indissociables. Cette position remonte à la guerre de Corée dans les années 50, lorsque la Chine intervint massivement pour sauver le régime anti américain de la Corée du Nord. Toutefois, cette position est aujourd'hui dépassée et la Chine émet de plus en plus de réserves envers la Corée du Nord : le président chinois Xi Jinping n'a jamais rendu visite au président nord-coréen. Il a déclaré que le pacte de défense qui lie la Corée du Nord à la Chine ne s'appliquerait pas si la Corée du Nord déclenchait les hostilités. En outre, la Chine d'aujourd'hui est une grande puissance qui n'a pas besoin d'un état tampon entre elle et les États-Unis.

La politique de faits établis en mer de Chine et en mer du Japon effraie ses voisins qui bénéficient de la protection américaine depuis la Seconde Guerre mondiale. Or, pour le président Trump, le statut de superpuissance des États-Unis est secondaire s'il ne se traduit pas par des avantages nets pour l'Amérique. Les pays voisins de la Chine ont pris note du changement de ton par rapport aux présidents américains qui l'ont précédé.

Les pays voisins de la Chine ont pris note du changement de ton par rapport aux présidents américains qui l'ont précédé.

La Russie partage une frontière avec la Corée du Nord. Le quartier général des forces russes d'Extrême-Orient à of Khabarovsk est en état d'alerte à chaque essai balistique nord-coréen, ce qui témoigne de la nervosité de la Russie face à l'armement atomique et balistique de la Corée du Nord.

La Corée du Sud et le Japon

La protection américaine rassure la Corée du Sud et le Japon dont les économies sont florissantes. Ces pays ne souhaitent pas un départ des États-Unis de la région, car cela les rendrait vulnérables face à la Chine. Toutefois, ils sont conscients que la protection américaine devra dorénavant être monnayée.

Comment la situation pourrait-elle évoluer ?

Une solution militaire improbable

Si un conflit venait à se déclencher, la Chine pourrait souffrir des retombées nucléaires et se retrouver avec des millions de réfugiés nord-coréens sur les bras. La capitale sud-coréenne qui se trouve à 50 kilomètres de la zone démilitarisée qui sépare la Corée du Nord de la Corée du Sud pourrait subir des pertes humaines et matérielles considérables. Même si le conflit faisait intervenir des armes conventionnelles, le conflit causerait une destruction effroyable, y compris au sein des forces américaines stationnées en Corée du Sud. Aussi, aucun des adversaires directement impliqués : les deux Corées, le Japon ou même la Chine ou les États-Unis ne gagneraient à ce qu'un conflit éclate ou que leurs armées se retrouvent face à face. Tous ces pays pourraient gagner d'une Corée pacifiée. Il faudrait pour cela mettre au rancart les vieux réflexes de la guerre froide.

Advenant le cas peu probable d'un conflit armé, et si les États-Unis et la Chine se mettaient d'accord, la Chine serait à même d'occuper les sites nucléaires nord-coréens avant qu'ils ne fassent des dégâts.

Advenant le cas peu probable d'un conflit armé, et si les États-Unis et la Chine se mettaient d'accord, la Chine serait à même d'occuper les sites nucléaires nord-coréens avant qu'ils ne fassent des dégâts. Pourtant, les armées américaine et chinoise ne voudraient pas se retrouver face à face. Aussi une telle solution exigerait une entente préalable. Celle-ci ne pourrait ignorer la politique des faits accomplis de la Chine dans les îlots du pacifique du Sud-ouest et dans la mer du Japon.

Une levée des sanctions improbable

Une levée des sanctions contre la Corée du Nord est improbable. Cette dernière est isolée sur la scène internationale hormis en Iran où le président du Parlement nord-coréen Kim Yong-nam a été reçu en grande pompe *** en août 2017. Le Conseil de sécurité de l'ONU, la Chine comprise, a voté des sanctions contre la Corée du Nord.

Les portes des négociations s'entrouvrent

Que recherche la Corée du Nord ? Avant tout, préserver son régime. Ensuite, obtenir un traité de paix avec la Corée du Sud conditionnel au départ des troupes américaines. Or, cette alternative exposerait la Corée du Sud à une invasion nord-coréenne. Le mieux que l'on peut espérer de la rencontre de Vancouver est une entente sur des mesures susceptibles de rétablir une certaine confiance et une désescalade de la tension militaire. Des actions concrètes vidant la dénucléarisation de la Corée du Nord pourraient être compensées par une aide économique appropriée.

Pour le reste, seul un accord généralisé entre les États-Unis et la Chine pourrait faire avancer les choses. La Chine qui répond aux besoins en énergie de la Corée du Nord est en mesure d'exercer une pression bien plus efficace que les sanctions internationales avec lesquelles le régime nord-coréen a appris à vivre. Cet accord devrait également tenir compte de l'expansion chinoise dans le Pacifique et des griefs américains envers certaines pratiques chinoises qui portent préjudice à sa balance commerciale américaine.

L'absence de la Chine et de la Russie de la conférence de Vancouver montre qu'un tel accord généralisé n'est pas prêt de se concrétiser.

* Le missile balistique intercontinental Hwasong 15 lancé le 29 novembre 2017, le Pukguksong (Polaris)-2 dont la portée est de 450 km lancé le 12 février, le Hwasong14 atteignant une altitude de 2800 km qui est retombé dans la mer du Japon et le Hwasong-12 dont la portée est de 3 800km. Par ailleurs, la Corée du Nord se prépare à lancer le satellite Kwangmyongsong-5 dans l'espace.

** Par le passé, des usines sud-coréennes employant des Nord-coréens dans la région frontalière de Kaesong ont été une source de devises cruciale pour le régime de Pyongyang. Ces usines ouvertes en 2002 ont été fermées en février 2016 par la Corée du Sud en protestation contre les essais nord-coréens de bombe à hydrogène un mois plus tôt.

*** Les experts ont pu noter la similitude entre les designs des missiles nord-coréens et iraniens.

Avril 2018

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