Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.
L'Égypte a longtemps été le phare et le moteur du monde arabe. Aujourd'hui, une certaine nébulosité règne cependant en regard de l'avenir du pays dirigé par le président Morsi, tant sur le plan de sa situation interne aue de son avenir économique.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

L'Égypte a longtemps été le phare et le moteur du monde arabe. L'avancée de la modernisation, le charisme du président Nasser tout comme la production cinématographique sophistiquée en avaient fait un parangon au cours des années 50. Après avoir vainement tenté d'affaiblir l'Arabie saoudite en s'attaquant au Yémen dans les années 60 et après deux conflagrations majeures avec Israël, l'Égypte d'Anwar Sadate a signé un traité de paix avec Israël. La révolution de la place Tahrir a évincé son successeur Moubarak et placé à la gouvernance du pays les Frères musulmans - mouvance longtemps interdite en Égypte - sous la houlette du président Morsi. Aujourd'hui, une certaine nébulosité règne cependant en regard de l'avenir de l'Égypte au plan de sa situation interne et de son avenir économique.

Avec une population de 85 millions d'âmes (près de 2,5 fois la population canadienne) et d'un PIB de près de 250 G$ (près d'un sixième du PIB canadien), l'Égypte a grandement reculé entre autres en raison de la baisse du tourisme, industrie qui représente près de 11 % du PIB et qui occupe un Égyptien sur sept. Le nombre de touristes a baissé de 14 à 10 millions et demi et la proportion des touristes occidentaux a grandement diminué. Le taux d'occupation des chambres d'hôtel est de 15 % au Caire et de 5 % à Louxor. La dette égyptienne est passée de 73 % du PIB en 2010 à 80 % en 2012 et le déficit de la balance commerciale est passé de 8,2 % à 11,7 % du PIB. Quant aux réserves égyptiennes, elles sont passées de 36 G$ avant la révolution à 12 G$ deux ans plus tard.

Trois quarts du budget sont consacrés aux salaires, aux subsides et aux payements d'intérêts. La masse salariale du secteur public a augmenté de 85 % pour atteindre 25 G$. 400 000 emplois gouvernementaux ont été ajoutés et on prévoit d'engager un autre 400 0000. La combinaison de réserves financières en décroissance et de dépenses gouvernementales en croissance se traduit entre autres par un manque de carburant et des arrêts fréquents d'électricité. Le gouvernement n'ose pas toucher aux impôts ou aux subsides qui toucheraient particulièrement les classes pauvres. En 2008, 15 % de la population vivait avec moins de 2 $ par jour. La diminution des subsides du pain avait déclenché des émeutes en 1977 et le projet d'augmentation d'impôts se heurta à une forte opposition en 2013.

Le manque d'assainissement économique rend difficile l'octroi du prêt de 4,8 G$ du Fonds monétaire international (qui ne représenterait que deux mois de financement du gouvernement égyptien) sans lequel d'autres prêts (environ le double) ne pourront être libérés. Nous sommes loin du prêt de 20 à 40 G$ envisagé en son temps par le président français Sarkozy. Les négociations relatives à ce prêt traînent depuis deux ans, car le gouvernement Morsi n'a pas voulu s'engager dans des mesures de réduction de déficit visant à encourager la croissance. L'économie survit grâce à des dons, des dépôts et des prêts* ainsi qu'à l'assistance américaine annuelle (essentiellement militaire) de 1,55 G$. À ce rythme, l'économie égyptienne est en situation instable à moyen terme, ce qui peut saper l'influence politique de l'Égypte au Moyen-Orient.

L'Égypte doit faire face aux infiltrations de groupes armés au Sinaï qui souhaitent déstabiliser la région, mais la paix avec Israël n'est pas remise en question malgré des positions critiques de certains détracteurs islamistes. Pays à majorité sunnite, l'Égypte vit avec la pression croissante de l'opinion publique qui ne supporte pas les massacres répétés de sunnites syriens. Enfin, l'Égypte est particulièrement inquiète devant la construction de barrages sur le Nil éthiopien de peur que le débit du Nil, vital pour l'existence même de l'Égypte, n'en soit affecté.

Au moment présent, la priorité du gouvernement est de placer un maximum d'islamistes dans la fonction publique. Ce faisant, il relègue sine die les décisions difficiles qui urgent au niveau de l'économie. Lorsque les injections de prêts et de dons cesseront, l'Égypte devra faire face à un mécontentement généralisé, car il ne sera plus possible de maintenir le niveau de vie actuel.

* Entre octobre 2011 et avril 2013: dépôts libyen et qatari de 2 G$ chacun; prêts de la Turquie de 2 G$, de l'Arabie saoudite de 1 G$; don de l'Arabie saoudite et du Qatar de 0,5 G$ chacun; achats de 3 G$ d'obligations par le Qatar. Selon le Financial Times du 18 juin, 60 % de l'aide publique au développement accordée par l'union européenne et étalée sur 7 ans n'ont pu être retracés.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Violences en Égypte pour le 2e anniversaire de la «révolution»

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.