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À quoi sert la Ligue arabe?

Un dialogue entre Israël et la Ligue arabe servirait à libérer les populations arabes des tabous psychologiques que leurs dirigeants ont érigés et à entrer dans la mouvance démocratique véritable.
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Depuis sa fondation en 1945, la Ligue arabe a regroupé en son sein 7 États membres, auxquels se sont ajoutés 15 autres États qui ont accédé à l'indépendance. Ces pays comptent aujourd'hui 378 millions d'âmes.

Officiellement, la langue arabe est le dénominateur commun des États membres. Toutefois, la langue arabe n'est pas la langue officielle de deux de ses États membres: la Somalie et Djibouti. Par ailleurs, les populations des Berbères de l'Afrique du Nord et des Kurdes au Proche-Orient ne se reconnaissent pas comme Arabes. Après plusieurs décennies d'arabisation, la langue arabe connaît un certain recul: les sciences sont enseignées en langue française au Maroc, alors que les pays du Golfe s'orientent vers l'adoption de la langue anglaise.

Rivalités internes

La Ligue arabe se présente comme une organisation politique. Depuis sa création, son parcours est marqué par son opposition à Israël et par des dissensions internes, depuis l'époque où le nationalisme nassérien était en conflit avec les monarchies arabes, et jusqu'à ce jour, car la tension entre sunnites et chiites divise les membres de la Ligue arabe.

Durant les années 1950, les pays républicains et les monarchies ont vécu à couteaux tirés. L'Égypte a envahi le Yémen pour mieux encercler l'Arabie riche en pétrole. Le Maroc et l'Algérie ont un conflit frontalier larvé. La Syrie et l'Irak se sont fait la compétition d'influence au Liban. Une force de dissuasion de la Ligue arabe a été envoyée au Liban durant les années de guerre civile, mais sans effet notable. L'Irak de Saddam Hussein a envahi le Koweït en 1990. Quant à la Libye du colonel Kadhafi, elle a contracté de multiples alliances bombastiques suivies de désunions non moins fracassantes avec plusieurs pays arabes. En ces jours, la majorité des pays sunnites s'opposent militairement au régime syrien et aux Houtis du Yémen, tous deux affidés de l'Iran chiite. À noter que la Ligue arabe a refusé de mettre en application l'arrêt du président soudanais Omar El-Béchir, accusé de génocide et de crimes de guerre par la Cour pénale internationale.

La rivalité entre pays arabes déborde sur l'économie: les échanges économiques entre pays arabes ne dépassent pas 10 % des échanges économiques globaux; l'Algérie préfère importer des tomates d'Italie à prix fort plutôt que d'en acheter du Maroc. En outre, les produits israéliens sont écoulés d'une façon officieuse et sont appréciés dans de nombreux pays arabes. Mais l'opposition officielle à Israël a été une constante durant les dernières décennies.

L'opposition à Israël

L'antagonisme cultivé envers l'État d'Israël vient voiler une tout autre réalité: celle des désaccords profonds entre les États arabes.

Ce qui frappe l'observateur est l'ensemble des mesures négatives prises par la Ligue arabe: décision de déposséder les citoyens juifs en 1947, boycott économique et culturel d'Israël, opposition au détournement des eaux du Jourdain par Israël à des fins d'irrigation, refus systématique de considérer la paix.

Il ne peut y avoir de pensée libre et libérée tant et autant que l'on sera subjugué par des interdits.

Lorsque l'Égypte a signé un traité de paix avec Israël, elle a été exclue de la Ligue arabe et il a fallu tous les talents diplomatiques d'Hassan II, roi du Maroc, pour la réintégrer. Bien que la Ligue arabe ait saturé les instances internationales de résolutions sur les réfugiés palestiniens, aucune considération n'a jamais été donnée aux réfugiés juifs des pays arabes, pourtant plus nombreux, ou même à l'incitation à la haine dans les médias moyen-orientaux.

Après le 11 septembre 2001, l'Arabie a lancé une initiative de paix entérinée par la Ligue arabe, proposant de troquer une reconnaissance d'Israël contre un retrait complet aux frontières d'avant la guerre des Six Jours. Cette proposition a été refusée par Israël, qui est prêt à la considérer seulement comme élément de négociation non définitif.

La Ligue arabe aujourd'hui

Les deux moteurs principaux de la Ligue arabe sont l'Arabie et l'Égypte. L'Arabie a une influence hors proportion dans la Ligue arabe en raison de sa puissance financière, et renfloue l'économie égyptienne; l'Égypte est le centre de gravité du monde arabe de par sa population, son niveau technologique et son armée.

Récemment, le ministre de la Défense saoudien a annoncé la création d'une coalition de 34 pays pour combattre le terrorisme en Irak, en Syrie, en Libye, en Égypte et en Afghanistan (une coalition similaire avait été formée en 1962 par l'Arabie saoudite pour contrer l'influence égyptienne au Yémen). Cette force de 40 000 soldats proviendrait des pays membres de la coalition, qui sont tous sunnites. Il est évident qu'il s'agit de combattre l'influence iranienne. Par ailleurs, Israël et ces pays considèrent l'Iran comme une menace prioritaire. Des officiels des pays du Golfe et même de l'Arabie commencent à s'afficher publiquement avec des représentants israéliens.

Pourtant, un dialogue face à face entre Israël et la Ligue arabe n'est pas encore en vue à l'horizon; il servirait à libérer les populations arabes des tabous psychologiques que leurs dirigeants ont érigés et à entrer dans la mouvance démocratique véritable. Il ne peut y avoir de pensée libre et libérée tant et autant que l'on sera subjugué par des interdits qui se rapproprient les ostracismes d'un autre âge. Et qui sait? Le dégel des tabous pourrait rapprocher chiites et sunnites, dont les guerres ont fait plus d'un million et quart de morts durant le dernier demi-siècle.

Autrement, La Ligue arabe ne que formerait qu'un club inconséquent d'États qui ne feraient que répondre aux desiderata saoudiens et assurer un poste de président à un notable égyptien à la retraite.

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