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«La dame de Zagreb» de Philip Kerr

Philip Kerr n'a de cesse d'explorer le quotidien de la Seconde Guerre mondiale.est le dixième roman d'une série totalement irrésistible.
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Depuis la publication de La trilogie berlinoise (1989-1991), Philip Kerr n'a de cesse d'explorer le quotidien de la Seconde Guerre mondiale. Son personnage, l'impertinent policier Bernie Gunther, incorporé de force chez les SS, demeure opposé au régime hitlérien. La dame de Zagreb est le dixième roman d'une série totalement irrésistible.

Tout juste revenu de l'effroyable forêt de Katyn, Bernie Gunther est convoqué au bureau du ministre de la propagande Joseph Goebbels. Il en ressort avec le mandat de retrouver le père de Dalia Dresner quelque part en Croatie. Le maître nazi s'est entiché de l'actrice, qui refuse de jouer dans son nouveau film avant d'avoir des nouvelles de son papa.

Gunther se lance dans l'aventure qui ne sera pas de tout repos. Zagreb est devenue une jungle qui effraie même les plus impitoyables SS.

La dame de Zagreb est le polar le plus différent de la série jusqu'ici. Philip Kerr nous laisse entrevoir l'avenir de son personnage fétiche, puisque Bernie entame le roman sur la Côte d'Azur en 1956. Le récit qui suivra devient alors un souvenir de 1943.

Mais les disparités ne se limitent pas qu'à cela. Pour la première fois, il n'y a pas d'enquête approfondie. Gunther retrouve bien le sanguinaire papa de Dalia ; il résout aussi, presque du revers de la main, le meurtre d'une femme trouvée attachée à un bateau au fond d'un lac, mais c'est à peu près tout. Le roman s'attarde plutôt à la survie en temps de guerre, ce qui ne nous épargne pas des scènes d'une grande cruauté.

D'un chapitre à l'autre, la vie de Gunther est menacée, que ce soit par ses maîtres nazis, par la Gestapo ou par le service secret américain. On sent bien que la victoire finale ne sera pas allemande et que Gunther, entrevoyant la fin de la guerre, n'a d'autre but que de se rendre au poteau d'arrivée plutôt qu'à la potence.

Au passage, Philip Kerr jette quelques lumières sur des faits moins connus, tel Mercedes Daimler, qui participe à l'effort de guerre, employant des prisonniers pour construire des moteurs. Il écorche au passage l'apparente neutralité suisse, coupable, entre autres, d'avoir fermé les yeux sur la construction de baraquements en bois pour des camps d'extermination.

La dame de Zagreb met en scène un Bernie Gunther obnubilé par les femmes, ici une actrice éblouissante, mais l'éclatante démonstration de ce nouveau roman sur l'Allemagne nazie et l'état du monde est de mettre en contraste face aux horreurs de la guerre l'amour, la sexualité, les bonnes manières, une certaine dignité qui s'organise malgré la déshumanisation ambiante. Tout ce qui devrait survivre s'incarne à travers la voix et les gestes du policier berlinois. Il apparaît alors, c'est flagrant dans La dame de Zagreb, comme l'ultime issue vers l'humanité pour désincarner le monstre sommeillant en nous (quel que soit le visage grimaçant qu'il arbore).

Si les romans précédents avaient montré le visage romantique de Gunther, celui-ci pousse un peu plus loin cette facette, alors que le policier berlinois bafoue un interdit absolu, et succombe aux avances de l'actrice tant désirée par Goebbels, le faisant cocu, quitte à se faire prendre et périr.

La dame de Zagreb, selon toute apparence, constitue une forme de fin de série. J'en ressors déjà nostalgique tant l'aventure aura représenté l'un des événements les plus forts de la littérature contemporaine.

Philip Kerr, La dame de Zagreb, Éditions Du Masque. Traduit de l'anglais par Philippe Bonnet (The Lady of Zagreb, 2015). Février 2016. 439 pages.

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