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Maria de Hervé Gagnon : celle par qui le scandale arrive

Le dernier polar d'Hervé Gagnon, historien de son état, et écrivain pour notre plus grand bonheur, est une virée somptueuse dans les vieilles rues de la ville de Montréal, une promenade en calèche qui nous emmène entre la rue Sherbrooke et la rue Sainte-Catherine, d'est en ouest.
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La Maria d'Hervé Gagnon, c'est Maria Monk, une présumée auteure qui, en 1836, dénonçait dans un livre scandaleux les rapports sexuels entre les frères sulpiciens et les sœurs hospitalières de l'Hôtel-Dieu, ainsi que les meurtres des enfants nés de leur fornication. Le clergé de Monseigneur Lartigue aura tôt fait d'étouffer l'affaire, mais les écrits restent!

En 1892, lorsqu'une canalisation s'effondre dans la rue Royer, à l'ombre de l'église Notre-Dame, on découvre un charnier d'une dizaine de corps, tous des bébés dont l'autopsie démontre que leurs décès sont récents. L'inspecteur Marcel Arcand se lance sur la piste avec son grand ami, le journaliste Joseph Laflamme. Bientôt, deux autres corps sont trouvés, flottants dans le fleuve Saint-Laurent, puis un homme d'affaires est tué. L'affaire se corse encore quand la famille de l'inspecteur Arcand est enlevée. Était-il si proche de la vérité? Le livre de Maria Monk disait-il vrai? Laflamme va poursuivre l'enquête en catimini et se confronter à la toute-puissance du clergé montréalais.

Le dernier polar d'Hervé Gagnon, historien de son état, et écrivain pour notre plus grand bonheur, est une virée somptueuse dans les vieilles rues de la ville de Montréal, une promenade en calèche qui nous emmène entre la rue Sherbrooke et la rue Sainte-Catherine, d'est en ouest. Par-dessus tout, l'auteur nous emporte dans un Montréal d'un autre temps, d'une autre époque. Dans un siècle où le clergé contrôlait presque toutes les institutions vitales de la société. Dans un régime de terreur proche parent des dictatures modernes où la seule mention d'excommunication faisait frémir et obéir les gens.

Si Joseph Laflamme, en esprit libre, sinon libéral (ce qui n'a pas le même sens aujourd'hui!), est en constante friction avec la théocratie ambiante (une thématique assez récurrente dans la littérature québécoise), Hervé Gagnon jette une lumière historique sur une certaine bourgeoisie montréalaise. Maria met en scène, dans ce Montréal très anglophone, un regroupement de notables francophones érigé en loge maçonnique. Cette bande d'individus, dont l'apparente réussite cache surtout des actes de corruption et de pédophilie, a tout du gang de criminels organisé dont les ramifications s'étendent à toutes les couches de la société. Hier comme aujourd'hui, la corruption organisée donne le vertige!

La narration de ce polar historique est dynamique, l'écriture est fluide et les nombreux dialogues empreints d'une bonne dose d'ironie et de sarcasme viennent dédramatiser des scènes assez crues.

Après ses deux premiers romans, Jack, sur l'éventreur trop bien connu, et Jeremiah, Maria vient positionner Hervé Gagnon comme l'un des auteurs les plus prolifiques et intéressants sur l'échiquier québécois. En définitive, le Québec n'a plus rien à envier à quelque pays que ce soit. En matière de polars, nous sommes une terre fertile.

À noter : la récente parution de Crimes à la bibliothèque, un recueil de nouvelles policières sous la direction de Richard Migneault. Dix-sept auteurs d'ici nous font découvrir leurs univers déjantés, dont Hervé Gagnon et sa variation sur le thème du pacte satanique.

Hervé Gagnon, Maria, Éditions Libre Expression │noire. Septembre 2015. 356 pages.

Crimes à la bibliothèque, Éditions Druide, Octobre 2015. 371 pages.

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