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Un Grand prix de littérature policière qui montre les crocs!

Un doublé polar aujourd'hui : deux auteurs féminins, dont l'une est française, et l'autre suédoise. Sandrine Collette vient de mériter le Grand prix de littérature policière 2013 avec. Viveca Sten est présentée comme la concurrente directe de Camilla Läckberg, et nouvelle reine du polar.est son premier roman traduit en français
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Un doublé polar aujourd'hui : deux auteurs féminins, dont l'une est française, et l'autre suédoise. Sandrine Collette vient de mériter le Grand prix de littérature policière 2013 avec Des nœuds d'acier. Viveca Sten est présentée comme la concurrente directe de Camilla Läckberg, et nouvelle reine du polar. La Reine de la Baltique est son premier roman traduit en français.

Sandrine Collette, lauréate à la plume d'acier

Des nœuds d'acier présente une histoire toute simple. Théo sort de prison après avoir purgé une peine pour l'agression de son frère qui venait de coucher avec Lil, son épouse. Il a besoin du grand air, alors il part pour le sud de la France dans un gite. Il se promène, marche et réfléchit. La patronne de l'établissement dirige alors ses pas vers un lieu somptueux, désert, en pleine forêt où deux vieillards s'emparent de lui et le contraignent à devenir un esclave domestique. La promenade d'une journée se métamorphose en un enfer indescriptible. Son existence devient une vraie vie de chien.

En soi, ce quasi huis clos totalement horrifiant est particulièrement vraisemblable. Le suspense est maintenu avec beaucoup de doigté, toujours sur le fil sans jamais basculer vers la sempiternelle description de la violence, même si la pauvre victime se fait maltraiter autant physiquement que psychologiquement. L'auteure fait un usage diabolique des ellipses et des sous-entendus qui laissent au lecteur le soin d'imaginer les sévices. Cette tension extrême sera constante tout au long du récit, annihilant toute envie d'une promenade dans les bois!

Théo assiste impuissant à sa propre déchéance; il en fait la description jour après jour. La privation, la soif, la faim. Les chaînes aux pieds, le travail trop dur, la cave humide qui devient le simple lieu où, sous nos yeux un peu voyeurs, il se dématérialise. Les tentatives d'évasion qui vont se solder par encore plus de mauvais traitements, et toujours ces vieux qui l'appellent le chien, alors Théo va lentement glisser dans un univers de servilité, prêt à lécher la main qui le nourrit. Subtilement, le langage change et le poids des mots s'ajoute au poids de l'existence. Le lyrisme à connotation canine vient embrigader le malheureux Théo qui y perd son courage et sa détermination. Il n'y a plus rien d'autre devant lui que la dégénérescence du corps et de l'esprit.

Un polar aussi répugnant qu'il est fascinant sur l'asservissement d'un homme. Pour Des nœuds d'acier, Sandrine Collette a bien mérité le Grand prix de littérature policière 2013.

Viveca Sten, reine du polar nordique?

Dans La Reine de la Baltique, un corps flottant est découvert le long de la plage de Sandhamn dans l'archipel de Stockholm. L'inspecteur Thomas Andreasson, qui connait parfaitement les îles et doit justement y prendre ses vacances, est dépêché sur les lieux. Le cadavre est celui de Krister Berggren. Bientôt sa cousine Kicki sera aussi trouvée morte ainsi que l'homme avec qui elle a passé la nuit et sur qui pesaient les premiers soupçons. La police piétine. Les vacances sont commencées et le village le plus visité de la Suède est déserté; le danger rôde, tapi dans l'ombre. Nora, la meilleure amie de l'inspecteur, tente de faire avancer l'enquête au péril de sa vie.

L'affirmation que Viveca Sten est la nouvelle reine du polar nordique relève bien davantage de la mise en marché que d'une quelconque réalité, du moins pour ce titre. L'histoire est assez mal ficelée et le seul suspense auquel vous aurez droit sera un certain passage où la vie de Nora est en danger.

L'enquête piétine parce que les policiers font preuve d'une négligence lamentable avec le peu d'indices qu'ils trouvent, ce qui met à jour les invraisemblances du récit. Nora apparaît plus professionnelle et expérimentée que les enquêteurs, ce qui pourrait être comique, mais comme il n'y a aucune autre trace d'humour dans le polar, ses trouvailles nous semblent des artifices.

Sans Nora, l'enquête serait abandonnée faute de preuves. Trois crimes et un groupe de policiers qui pensent plus à leurs vacances gâchées qu'à résoudre l'énigme. Elle devient ainsi héroïne d'une mauvaise enquête et prend, avec sa famille, beaucoup (trop) de place. Nora et ses ennuis familiaux. Nora et ses ambitions professionnelles. Nora et ses activités avec les enfants. Nora à la plage. Nora et sa vieille voisine. Nora au cimetière. Et la grande majorité de ces Nora... n'ont strictement rien à faire avec les meurtres, allant parfois même jusqu'à les faire oublier, ce qui n'était pas le but. Bonjour le suspense!

Un polar somme toute assez banal, construit avec des bouts de ficelles qui dépassent en largeur.

Sandrine Collette, Des nœuds d'acier, Éditions Denoël « sueurs froides ». Février 2013. 265 pages. Disponible en version papier et numérique.

Viveca Sten, La Reine de la Baltique, Éditions Albin Michel « spécial suspense ». Traduit du suédois par Rémi Cassaigne (1 De Lugnaste Vatten, 2008). Octobre 2013. 386 pages. Disponible en version papier et numérique.

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Avril 2018

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