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Victoire de la CAQ: au Québec comme ailleurs

La difficulté de la CAQ sera de tenir des promesses dont la population ne veut pas.
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Certes, on veut du changement. Mais surtout en suivant de vieux sentiers tracés par la droite.
Canadian Press/Graham Hughes
Certes, on veut du changement. Mais surtout en suivant de vieux sentiers tracés par la droite.

Deux chiffres résultant des dernières élections québécoises semblent particulièrement révélateurs. D'abord, 106 députés (sur 125) appartiennent à des partis de droite ou de centre-droit. Et 84 proviennent de partis qui n'existaient pas il y a 15 ans. Ce résultat n'est cependant pas très original. Il se reproduit, avec d'importantes nuances, dans des pays semblables au nôtre.

Certes, on veut du changement. Mais surtout en suivant de vieux sentiers tracés par la droite.

Prenons en exemple les résultats électoraux de pays ayant un niveau de développement semblable au nôtre. Au Royaume-Uni, les électeurs ont voté en faveur du Brexit, malgré un attachement très fort des élites à l'Union européenne. Au deuxième tour des élections législatives en France, les grands partis traditionnels étaient absents, au profit de l'extrême-droite et du tout nouveau parti formé par Emmanuel Macron.

En Italie, le Mouvement 5 étoiles et la Ligue (d'extrême-droite) dirigent le pays, même s'il s'agit de partis néophytes. Aux États-Unis, Donald Trump a éclipsé tous les candidats de l'establishment, malgré son inexpérience et sa campagne électorale déconcertante.

Le ras-le-bol au Québec comme ailleurs

Derrière tout cela, au Québec comme ailleurs, il semble y avoir un ras-le-bol des vieilles machines politiques, de l'alternance entre le centre-droit et le centre-gauche dont ont résulté des politiques beaucoup trop identiques. Avec les mêmes résultats: précarité, diminution du pouvoir d'achat, délocalisations, fermeture d'usines, hausse des tarifs, compressions dans les services publics.

Afin de montrer leur mauvaise humeur, les populations ont tout simplement congédié les élus qui les ont menés là.

Dans chacun des pays mentionnés, une gauche plus radicale a profité de la situation. Au Royaume-Uni, Jeremy Corbyn a ramené le Parti travailliste à ses racines et remet clairement en cause les politiques d'austérité de ses prédécesseurs. La France insoumise, menée par Jean-Luc Mélenchon, a largement dépassé le Parti socialiste au premier tour des élections de 2017 en obtenant presque 20% du vote.

L'inclassable Mouvement 5 étoiles présente un salmigondis d'idées de toutes les tendances, dont certaines à gauche — mais en Italie, la gauche radicale demeure particulièrement affaiblie. Aux États-Unis, on aurait même pu imaginer l'invraisemblable: si les élites du Parti démocrate ne s'étaient pas à ce point mobilisées contre le candidat socialiste Bernie Sanders, ce dernier l'aurait peut-être emporté sur Trump, alors qu'il menait dans les intentions de vote.

Les populations semblent miser sur une droite qui s'en prend à l'immigration, donne des privilèges aux riches et ne s'attaquant pas aux problèmes environnementaux.

Cette gauche qu'on dit «extrême», malgré le pragmatisme de ses propositions, reste cependant très loin du pouvoir. Les populations semblent miser sur une droite dure qui s'en prend à l'immigration, qui donne de nouveaux privilèges aux riches, qui ne s'attaque pas aux problèmes environnementaux et qui y contribue bien souvent.

Est-ce le néolibéralisme qu'on refuse de remettre en question?

Derrière tout cela, c'est le néolibéralisme que l'on ne veut pas remettre en question. On change les gens au pouvoir, on met en échec les vieux partis, mais on n'ose pas s'en prendre à un système économique responsable d'un grand climat d'insécurité, celui-ci provoquant la colère qui a mis les politiciens usés à la porte. Et ces nouveaux partis mettent en place des politiques toujours aussi insatisfaisantes. Étrange cercle vicieux.

Au Québec, l'élection de la CAQ est très significative de cette tendance. Le changement s'est limité à voter pour un nouveau parti.

On a répété à plusieurs reprises à quel point les politiques économiques de la CAQ ressemblaient à celle du Parti libéral. Pour se distinguer, on y ajoute un discours anti-immigration pas trop virulent, un peu de nationalisme, et le bon vieux projet individualiste de mettre de l'argent dans les poches des gens.

La difficulté de la CAQ sera de tenir des promesses dont la population ne veut pas. Comment «dégraisser» l'État et baisser les taxes, alors que les libéraux ont été chassés en raison des effets désastreux des politiques d'austérité? Comment offrir de meilleurs services avec des baisses de revenus? Comment répondre aux préoccupations concernant l'environnement, alors que rien ne se trouve dans le programme à ce sujet?

En France, la présidence de Macron montre bien qu'un changement de personnel sans changements politiques signifiants mène à un cul-de-sac: le nouveau président atteint des sommets d'impopularité, comme François Hollande au même moment de son mandat.

Le soutien des électeurs et des électrices à une droite reformatée en surface, proposant des solutions qui n'ont pas fonctionné, ne fait que reporter à plus tard les véritables changements attendus. Les prochaines années, avec la CAQ au pouvoir, seront probablement du temps perdu à reprendre les mêmes batailles, épuisantes, mais indispensables, pour préserver l'environnement, protéger nos services publics, etc. En attendant des jours meilleurs...

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