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Souvenirs de Saint-Jean-Baptiste

En 1968, j'avais 20 ans presque 21, et toute une année de police derrière moi. Embauché avec 140 autres jeunes comme moi, tout juste avant l'Expo 67, nous avions profité de cette époque bénie entre toutes. Ma première Saint-Jean-Baptiste en tant que flic, fut un souvenir impérissable. Les gens en liesse applaudissant les fanfares et les chars allégoriques, les jeunes filles légèrement vêtues, peu farouches et séductrices, les officiers aux dorures étincelantes... Bref, une Saint-Jean comme on n'en verra plus pendant des années.
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Souvenirs de Saint-Jean Baptiste se veut une chronique sans prétention, en quatre épisodes : l'avant-parade; l'éclatement et la stupeur; la répression et les détentions; et, finalement, les conséquences à court et long termes.

Dans les années 60, la fête quasi religieuse de la Saint-Jean-Baptiste était l'occasion pour le peuple canadien-français de démontrer son attachement à l'église et sa fierté de ne pas avoir été assimilé. Les événements de 1964, le samedi de la matraque, l'avènement du premier F.L.Q., avec ses quelques bombes et la mort de deux hommes. Oui, la mort de deux hommes. Un artificier venu désamorcer une bombe et un employé d'un magasin d'armes, tués par erreur par un policier. Tout ça combiné avec une montée mondiale de radicalisation et d'éveil, fit qu'en 1968, la fête qui se voulait à la fois solennelle tout autant qu'agréable, dégénèrera en cauchemar.

Je vais tenter de vous décrire en quelques blogues la vision d'un jeune homme de 20 ans, fraîchement arrivé de sa ville de province et jeune recrue dans la police de Montréal.

En 1968, j'avais 20 ans presque 21, et toute une année de police derrière moi. Embauché avec 140 autres jeunes comme moi, tout juste avant l'Expo 67, nous avions profité de cette époque bénie entre toutes. Ma première Saint-Jean-Baptiste en tant que flic, fut un souvenir impérissable. Les gens en liesse applaudissant les fanfares et les chars allégoriques, les jeunes filles légèrement vêtues, peu farouches et séductrices, les officiers aux dorures étincelantes... Bref, une Saint-Jean comme on n'en verra plus pendant des années.

Notre belle insouciance nous faisait oublier que, ailleurs dans le monde, se tramaient des conflits qui embraseraient la planète. Mai 68 à Paris, les événements de Prague, la mort de Martin Luther King, les émeutes de Chicago. Le monde bougeait. Mais ici, tout semblait aller lentement, le Canadien gagnait la coupe, donc tout allait pour le mieux.

Mais voilà! Ici, dans cette province, les voix hystériques de nationalistes, de dangereux communistes, de syndicalistes activistes s'élevaient d'un élan renouvelé. N'oublions pas que nous étions en pleine guerre du Vietnam et de la théorie dite Des dominos. Bref, le social-communisme faisait peur.

Nous assistions à la montée des syndicats marxistes et des révoltes étudiantes, petites certes, mais l'odeur de poudre que nous ne sentions pas encore, commençait à laisser traîner des relents ici et là.

Des activistes comme Pierre Bourgault, le tribun albinos enflammé, Regis Chartrand et ses Chevaliers de l'indépendance, d'autres encore méconnus du grand public, tels, les frères Rose, Lortie et compagnie eurent tôt fait d'inquiéter la police dite secrète. Mais, pour les gars en uniforme, nous en étions à l'époque où il fallait porter littéralement des gants blancs et le képi de même couleur lors des parades, des processions et rassemblements publics.

La Saint-Jean-Baptiste était encore une fête, la fête du fait français en Amérique. Nous en étions à l'adolescence de la télévision. Les édiles et le gratin viendraient s'entasser plus ou moins dignement tout comme des sardines sur une estrade temporaire, pour voir et bien sur, être vus. Un homme surtout le ferait bien, Pierre Eliott Trudeau.

C'est dans ce cadre, que des forces de police mal préparées, mal équipées, mal informées, mal disposées, ont eu à composer devant une foule qui deviendra pour une première fois, hostile, bagarreuse et incontrôlable.

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