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Il faudra un jour analyser sérieusement la représentation symbolique de cette «troisième patte» dans l’inconscient du peuple québécois.
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Et que dire de ce bon Jack (Layton), ancien chef du NPD qui, après un passage remarqué à TLMEP, la grand-messe du dimanche soir, où on le vit arriver avec sa canne et, le lendemain, debout sur une voiture, l’objet brandit bien haut, à la une du quotidien «La Presse»?
Ben Nelms / Reuters
Et que dire de ce bon Jack (Layton), ancien chef du NPD qui, après un passage remarqué à TLMEP, la grand-messe du dimanche soir, où on le vit arriver avec sa canne et, le lendemain, debout sur une voiture, l’objet brandit bien haut, à la une du quotidien «La Presse»?

La canne de Lucien en 1995, la canne de Jack en 2011 et la canne de Manon en 2018... Il faudra un jour analyser sérieusement la représentation symbolique de cette «troisième patte» dans l'inconscient du peuple québécois.

En attendant, amusons-nous un peu.

Figure salvatrice de la représentation de Moïse pour une nation dont l'imaginaire demeure fortement imprégné de judéo-christianisme? Représentation du bâton de pèlerin trouvant la rédemption dans la solitude des modestes? La canne semble incarner un puissant objet de rassemblement, qui confère une aura quasi mythique à certains personnages politiques.

Qui ne se souvient pas à quel point Lucien Bouchard, sorti sanctifié de son combat contre la bactérie mangeuse de chair qui lui a couté une jambe, évoquait un «Moïse québécois» guidant le peuple vers sa Terre promise après que le premier ministre Jacques Parizeau (Parti québécois) l'eut invité à prendre la présidence du camp du «Oui» lors du référendum de 1995?

À cette époque, des centaines de personnes s'agglutinaient à son passage avec l'espoir de le toucher, tel un frère André revenu de l'au-delà qui aurait redonné la vue aux aveugles et guéri les malades par le seul pouvoir magique de son émanation.

Dans les faits, Lucien Bouchard n'a-t-il pas été celui qui, en brandissant sa canne vers l'avenir, a conduit la nation québécoise très près de la «Terre promise»?

Dans les faits, Lucien Bouchard n'a-t-il pas été celui qui, en brandissant sa canne vers l'avenir, a conduit la nation québécoise très près de la Terre promise, comme il l'a d'ailleurs suggéré un jour à la télé, n'eut été du vol du fédéral? «Est-ce qu'il y a quelqu'un qui a amené la souveraineté plus près de la Terre promise?», avait-il dit.

On se souviendra que Moïse, le père des trois grands monothéismes du Pentateuque, et donc du judaïsme au premier chef, se sert de cet objet pendant la fuite d'Égypte des Israélites. Face à la mer Rouge, «Moise étendit le bras au-dessus de la mer. [...] Les eaux se séparèrent et les Israélites traversèrent la mer à pied sec: de chaque cote d'eux, l'eau formait comme une muraille.» Exode 14:21-31.

Le bon Jack

Et que dire de ce bon Jack (Layton), ancien chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) qui, après un passage remarqué le 3 avril 2011 à TLMEP, la grand-messe du dimanche soir, où on le vit arriver avec sa canne et, le lendemain, debout sur une voiture, l'objet brandit bien haut, à la une du quotidien
La Presse
? «Sur l'air du
Bon gars
, de Richard Desjardins, Jack Layton a traversé le fameux studio avec sa canne et son sourire», rapportait alors Yves Boisvert du même journal, dans un article titré
.

Bien sûr, cela n'est pas imputable à la seule canne de feu Jack Layton, mais davantage à la nouvelle configuration droite/gauche d'alors. N'empêche que le NPD a connu sa première vague orange au Québec avec 43% des votes quelque temps après ces représentations symboliques à la télé et dans les journaux.

Manon

Puis, ces derniers jours, c'est Manon Massé qui, après un accident de ski en avril dernier suivi d'un passage médiatisé en réadaptation dans un CHSLD – quoi de mieux pour incarner le «vrai monde» –, représentait presque la figure de nos ancêtres autochtones en marchant avec sa canne/symbole telle une figure matriarcale remplie de bienveillance et de... promesses quasi mystiques. «Alors Moïse avança en tenant à la main le bâton avec lequel il avait frappé le Nil. Il frappa sur un rocher du mont Horeb, et l'eau en sortit, le peuple put enfin se désaltérer.»

De Moïse à la Grèce antique, le bâton était l'apanage des juges et des généraux, mais aussi l'évocation de la connaissance et de la dignité. Pour les maréchaux de France, le bâton représentait le pouvoir délégué par le roi, qu'il l'avait lui-même soi-disant reçu de Dieu. Celui du bâtonnier représente l'ordre des avocats, sans oublier la baguette du chef d'orchestre, qui bat la cadence partout dans le monde, ni celle des magiciens. Ce bâton de bois a décidément bien des mystères à nous révéler.

En attendant, parions que nous le reverrons plus tôt que tard dans une prochaine campagne électorale.

Parce qu'au fond, peut-être ne s'agit-il que de la canne du berger dont nous serions tous les moutons. Bêêêêêêê...

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