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Les primaires, étape clé dans la course à la Maison-Blanche

Une élection présidentielle aux États-Unis se gagne au centre. Les candidats désignés sont rarement les plus fantasques ou les plus controversés.
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La course à la Maison-Blanche n'est pas une affaire de raison mais la rencontre entre un pays et son destin. La route vers la Maison-Blanche est longue, semée d'embuches et imprévisible car le système politique américain est impitoyable. «You have to be a bit crazy to run for president», il faut être «un peu fou pour se présenter à la présidentielle» disait Hillary Clinton lors d'une interview sur la chaîne PBS .

L'élection américaine ne comporte qu'un tour, il n'y a pas de deuxième chance. Les primaires ne sont pas l'équivalent d'un premier tour. Comparer les élections primaires à un premier tour d'élection présidentielle, c'est ignorer la composition électorale mais également la stratégie qui en découle.

Les primaires, première étape dans la course à la Maison-Blanche, voient les partis mener la danse en choisissant le calendrier, les modalités des primaires, celles des «caucus», et une partie du programme présidentiel. Cette étape est décisive en ce qu'elle conditionne le maintien ou le retrait des candidats dans la course. Le coût des campagnes et la complexité de l'organisation dissuadent les petits candidats à se présenter, la règle du bipartisme domine ainsi la vie politique, et les débats se jouent au sein des deux grands partis, seuls à pouvoir porter jusqu'au bout une candidature à la présidence.

En 2016, l'enjeu est fort pour le Parti républicain: qui affrontera Hillary Clinton, l'évidence du camp démocrate? Donald Trump, candidat quelque peu fantasque, attire l'attention médiatique. Pourtant, il est peu probable qu'il l'emporte.

Tant par la composition du collège électoral que par la stratégie électorale, les primaires sont d'abord une première étape vers la Maison-Blanche. Ce sont les délégués, dont le nombre varie en fonction de la population des États, qui votent lors de la convention des partis. Au fil des mois, les candidats qui accumulent le moins de délégués et qui deviennent donc les moins susceptibles de soulever des fonds disparaissent dans l'anonymat.

La composition du vote lors des primaires est spécifique puisqu'il s'agit, dans la majorité des États, de la base électorale du parti. Elle ne représente pas l'électorat national mais la base militante, plutôt située aux extrémités sur l'échiquier politique. Une primaire se gagne à l'extrémité de son parti politique, et l'enjeu de l'élection présidentielle est de revenir plus au centre.

La candidature de Bernie Sanders, qui s'est dit «socialiste», séduit l'électorat le plus à gauche des démocrates, mais il n'a aucune chance de devenir président. L'art subtil de l'élection présidentielle américaine est de garder sa base militante tout en séduisant le centre et les indépendants. Tel un équilibriste sur un fil, le candidat à la Maison-Blanche doit rassembler le plus grand nombre. À l'issue des votes, le candidat qui emporte le plus de délégués par État gagne l'ensemble des délégués de cet État. C'est le «winner takes all», le «gagnant prend tout». À partir de février et jusqu'au printemps, le but des candidats est d'arriver en tête des gros États et d'accumuler le plus de délégués possibles.

Pour l'élection présidentielle de 2016, l'enjeu est clairement la désignation du candidat républicain. Hillary Clinton est devenue l'évidence du camp démocrate depuis que le vice-président Joe Biden refusa de se lancer dans une troisième course à la présidence en octobre dernier.

En 2011, face à Barack Obama, les républicains désignèrent Mitt Romney, crédité pourtant de 22% des voix dans les sondages de décembre, tandis que Newt Gingrich caracolait en tête avec plus de 37%. La comparaison entre les candidats en tête des sondages et ceux désignés lors des conventions de chacun des partis au cours des élections présidentielles de 2008 et 2012 montre que rien n'était décidé en décembre et que les percées médiatiques ne se sont pas traduites par un vote pour le candidat dit favori.

Cela peut s'expliquer par la grande inconnue de chaque élection: qui va se déplacer pour voter? L'enjeu des primaires est de faire voter la base électorale pour désigner un candidat représentatif du parti qui devra ensuite séduire l'électorat plus au centre. Une élection présidentielle aux États-Unis se gagne au centre. Aussi, un candidat comme Donald Trump est un risque pour le Parti républicain. Les candidats désignés sont rarement les plus fantasques ou les plus controversés.

Déjà candidat aux primaires républicaines en 1999, Donald Trump semble avoir gagné en crédibilité au cours de l'année 2015. Cette évolution sera-t-elle suffisante pour qu'il soit désigné? Pour faire des prédictions et déceler une tendance électorale, il est intéressant de regarder les catégories de votants.

Un sondage publié en octobre dernier montre que Donald Trump séduit plutôt les hommes, les électeurs très conservateurs, ceux du sud et les moins diplômés. Il ne séduit que très peu de républicains dans les États du Midwest et de l'ouest. Marco Rubio et Jeb Bush séduisent les minorités (afro-américaines et hispaniques) tandis que Ted Cruz attire l'électorat du sud. Mike Huckabee séduit des électeurs conservateurs et modérés et l'ensemble des classes d'âges de plus de 30 ans.

Ce qui est frappant, c'est qu'aucun candidat ne séduit modérément l'ensemble des catégories. Tous attisent un refus chez une ou plusieurs catégories, et cela fait écho à l'absence de leadership dans les primaires. Donald Trump ne s'illustre que par sa capacité à choquer. Il n'y a pas d'éléments tangibles montrant le sérieux de sa candidature. Même dans son propre camp, il ne reçoit que 45% d'opinions favorables quant à la crédibilité de sa candidature.

On peut donc classer les candidats républicains en trois catégories:

• Ceux qui font la course en tête : Donald Trump et Ben Carson ;

• Ceux qui sont les plus crédibles : Marco Rubio, Ted Cruz et Jeb Bush ;

• Ceux qui «rêvent» : Carly Fiorina, Chris Christie, Mike Huckabee et John Kasich.

Une candidature à la présidence des États-Unis, c'est avant tout une histoire, un personnage que l'on façonne et que l'on décrit à travers le temps. Le storytelling à l'américaine est une grande partie de la vie politique. Il s'agit de raconter son histoire de telle sorte qu'un maximum de gens y adhère. Un homme, un destin.

Une campagne pour les primaires se conçoit aux États-Unis comme une «mini-campagne nationale» car, si un faible échantillon d'électeurs non représentatif de l'ensemble de l'électorat vote, il reste intéressé par les sujets nationaux. La priorité des sujets varie en fonction des partis. En 2016, la question raciale préoccupe plus les électeurs démocrates que les électeurs républicains ou indépendants. La politique étrangère, avec l'immigration et le terrorisme, préoccupe plus les républicains que les démocrates. La réforme de l'assurance maladie, qui a suscité, dans l'ensemble, une forte opposition parmi les républicains, apparaît maintenant comme un sujet majeur. Seule l'économie revêt une importance cruciale pour tous. «It's the economy stupid», avait déclaré en 1992 James Carville, qui avait axé la stratégie de campagne de Bill Clinton sur l'économie, préoccupation majeure des électeurs d'alors. La campagne présidentielle de 2016 sera-t-elle aussi centrée sur l'économie? Il est trop tôt pour le dire, mais les sondages montrent que les électeurs, eux, tous partis confondus, en font une priorité.

L'enjeu d'une primaire, c'est d'abord de rassembler son camp, convaincre qu'on est le meilleur candidat pour mener son parti à la victoire et se démarquer des autres candidats sans s'isoler idéologiquement de sa base militante.

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