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La dépendance du Canada

Le gouvernement conservateur avait basé son budget sur la perspective d'un baril de pétrole qui se vendrait près de 81$ US, ce qui laisse un écart abyssal de 36$ US entre les prévisions et la réalité.
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Le ministre fédéral des Finances, Joe Oliver, a décidé de repousser le budget au mois d'avril, pour attendre de voir ce qui va se passer avec le pétrole. Pour les néophytes, le baril de pétrole, qui se vendait sur les marchés mondiaux aux alentours de 107$ US en juin 2014, est tombé à un maigre 45$ US depuis le début de 2015.

Or, le gouvernement de Stephen Harper avait basé son budget sur la perspective d'un baril de pétrole qui se vendrait près de 81$ US, ce qui laisse un écart abyssal de 36$ US entre les prévisions et la réalité, l'obligeant ainsi à puiser dans ses réserves pour le retour à l'équilibre budgétaire. On se rappelle que l'équilibre budgétaire et l'économie sont les vaches à lait des promesses conservatrices en prévision de l'élection de cette année. Selon l'article cité plus haut, il serait possible que malgré l'utilisation des surplus, il y ait quand même un déficit, et de bonne taille selon les estimations les plus pessimistes! Ce n'est pas pour rien que le ministre Oliver attend le plus tard possible pour dévoiler son budget à saveur électorale...

Évidemment, ce n'est pas la faute du Canada si les pays membres de l'OPEP (l'Organisation des pays producteurs de pétrole), qui compte une douzaine de membres au Proche-Orient, en Afrique et en Asie, ont décidé de faire la vie dure aux producteurs américains et canadiens en ne réduisant pas leur production! Pour faire simple : l'économie est régie selon la loi de l'offre et de la demande. Présentement, avec la production américaine et les sables bitumineux canadiens (jumelés à l'offre de pétrole des pays membres de l'OPEP, sans oublier la Russie et la Norvège), l'offre de pétrole est surabondante alors que la demande est assez stable ou en légère hausse. Ce faisant, cela entraîne une diminution de la valeur du produit, puisque les acheteurs de brut ont l'embarras du choix pour leur approvisionnement. Les pays producteurs de pétrole sont tous en train de subir des baisses de revenus, ce qui amène le report aux calendes grecques de projets qui ne sont plus rentables avec un baril de pétrole à un prix si abordable (par exemple, les nouveaux projets de plateformes de forage en eaux profondes.)

L'objectif des pays membres de l'OPEP est évident : Mettre un terme à l'émergence de nouveaux projets (exploration offshore, sables bitumineux, pétrole de schiste, etc.) pour garder la mainmise sur la production mondiale. La plupart des pays membres de l'OPEP étant des pétro-monarchies (Émirats Arabes Unis, Qatar, Arabie Saoudite, Koweït), des pays aux prises avec des troubles sociopolitiques énormes (Libye, Nigéria, Irak) ou des pays qui politiquement ne font pas l'unanimité (Venezuela, Iran), ces derniers peuvent se permettre de perdre des revenus dans l'immédiat pour conserver plus tard une incroyable suprématie. La simple idée de faire fermer des raffineries et de contrecarrer des projets d'envergure dans le Nord pourrait être suffisante pour les convaincre de conserver une production égale malgré la baisse des cours du pétrole.

Ce n'est donc pas la faute du gouvernement canadien si l'offre de pétrole est surabondante sur les marchés, ni si l'OPEP a décidé de couler les entreprises nord-américaines du secteur pétrolier. Par contre, par son statut de producteur de matières premières d'abord et avant tout, le Canada s'est placé dans une situation de dépendance intolérable vis-à-vis du pétrole des sables bitumineux. Les prix du baril s'envolent, comme ce fut le cas au début de 2014? Le Canada affiche des surplus scandaleux et peut se permettre d'investir quelques millions pour le Social et l'Emploi. Les prix coulent en flèche? On ne sait plus si on pourra atteindre le déficit Zéro, et les murs de l'édifice gouvernemental se fissurent comme les remparts de Jéricho. Le Canada est devenu hyper dépendant du pétrole albertain...

Or, comme il est facile de le concevoir, le Canada n'est pas le seul pays à être dépendant de la vente de ses matières premières, c'est un problème mondial récurrent. Et cela ne serait même pas si grave, si ce n'était des deux problématiques suivantes :

  • Le pétrole du Canada, extrait des sables bitumineux, est quoi qu'en disent certaines études biaisées payées par des compagnies qui forent elles-mêmes les sols, est un pétrole plus nuisible pour l'environnement, et surtout, beaucoup plus cher à exploiter! Il en ressort que les coûts d'exploitation rendent le pétrole canadien plus cher, et donc, plus sensible aux soubresauts d'un marché mondial qui est extrêmement volatile. Sans compter les problématiques environnementales que l'extraction par fracturation engendre...
  • Les prévisions des experts internationaux, à une certaine époque pas si lointaine, évaluaient que les réserves mondiales de pétrole avaient une durée de vie d'encore 50 ans, et plus vite encore si l'augmentation du niveau de vie en Chine amenaient des centaines de milliers de Chinois à se doter d'une ou deux automobiles. Depuis, le pétrole des sables bitumineux et de schiste a fait son apparition, ce qui a changé la donne internationale. Il n'en reste pas moins que le pétrole est une ressource non renouvelable, et qui viendra inéluctablement à manquer un jour ou l'autre. Tout miser dans le secteur pétrolier est une erreur fatale que le gouvernement conservateur au pouvoir à Ottawa est en train de faire, et qu'éventuellement, en remplaçant Harper par Couillard et le pétrole par les gisements miniers, le gouvernement du PLQ fera...

La clé d'une économie en santé reste et sera toujours, comme le conseillerait n'importe quel gestionnaire de portefeuille, la diversité des actions. Tout miser sur une ressource non renouvelable est un suicide économique à moyen-long terme. Les conservateurs, qui se vantent depuis leur premier mandat d'être les champions de l'économie, devraient l'avoir compris, non? Ou peut-être ne se préoccupent-ils pas du tout de l'avenir, comme c'est trop souvent le cas en politique autant fédérale que provinciale?

Au moins, tout n'est pas noir dans ce dossier : le pétrole en bas d'un dollar le litre profite beaucoup aux consommateurs du Québec et de l'Ontario. Pour une fois que quelque chose en lien avec les marchés mondiaux nous est profitable!!

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