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Le besoin de services et de soutien en santé mentale est grandissant: d’ici 2020, la dépression deviendra la principale cause d’incapacité au Canada.
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Il faut savoir naviguer entre les deux extrêmes de la surprotection ou du décrochage, et trouver le bon équilibre de présence et de soutien, tout en respectant l’autonomie de la personne aux prises avec un trouble mental.
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Il faut savoir naviguer entre les deux extrêmes de la surprotection ou du décrochage, et trouver le bon équilibre de présence et de soutien, tout en respectant l’autonomie de la personne aux prises avec un trouble mental.

Dans le cadre de la campagne de sensibilisation annuelle et de la Journée Bell Cause pour la cause, visant à faire reculer la stigmatisation, l'occasion est propice pour inviter la population et les proches à faire preuve d'empathie et de compassion à l'endroit des personnes éprouvant des problèmes de santé mentale. Et pour ce faire, il est important de «causer» de santé mentale. De différentes façons.

Les proches ou la personne elle-même ne doivent pas se gêner pour aller chercher le soutien nécessaire, ce qui n'est pas superflu face à pareil défi. L'entourage de la personne est souvent mal outillé pour recevoir la nouvelle d'une difficulté en matière de santé mentale. Il faut se donner les moyens pour pouvoir accueillir cette nouvelle dans le respect et l'ouverture.

Une clef importante s'avère être incontournable pour faire reculer les tabous et la discrimination, soit celle de l'information adéquate sur la réalité de la santé mentale.

D'entrée de jeu, il faut considérer deux profils distincts de problèmes de santé mentale et qui sont souvent confondus. Il y a le profil le plus sévère, celui des maladies mentales et il y a celui des troubles mentaux de légers à sévères, tels que la dépression ou les troubles anxieux, sans compter les troubles de la personnalité, parfois ces trois éléments en combiné.

La maladie mentale constitue un handicap mental et social majeur, dû à des problèmes physiologiques du fonctionnement du cerveau.

La médication antipsychotique permet en bonne partie le contrôle des symptômes de la schizophrénie ou du trouble bipolaire par exemple, et permet un meilleur fonctionnement de la personne. Mais le vécu de ces personnes n'est pas de tout repos. Personne ne choisit de naître avec une maladie, encore moins avec une maladie mentale. Une maladie invisible, mal comprise, qui suscite facilement le jugement, la dérision, la discrimination et la pauvreté. Et la médication comporte souvent son lot d'effets secondaires indésirables. Et quand ça va mieux, on pense ne plus avoir besoin de médication et la valse des symptômes délirants ou autres reprend.

Pas facile pour les proches. Pas facile de négocier avec une personne parfois irrationnelle ou agressive. Pas facile comme parent de voir apparaître chez son fils ou sa fille les premières crises psychotiques au tournant de la vingtaine. Ça demande une bonne dose de compassion et de discernement pour composer avec cette situation éprouvante et la perspective de voir son enfant s'enligner sur une vie de difficultés liées à la maladie mentale.

Il faut savoir naviguer entre les deux extrêmes de la surprotection ou du décrochage, et trouver le bon équilibre de présence et de soutien, tout en respectant l'autonomie de la personne aux prises avec un trouble mental.

Heureusement, des ressources existent pour venir en aide aux parents. Par exemple, l'Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) ou encore l'Association québécoise des parents et amis de la personne atteinte de maladie mentale (AQPPAMM). Des groupes d'échanges et de soutien sont disponibles pour aider les parents. Les proches aidants doivent ne pas oublier leurs propres besoins, savoir établir des limites claires pour éviter l'épuisement de compassion: il pourra être utile de consulter pour vous aider à y voir plus clair et comprendre les mécanismes intérieurs qui pourraient vous piéger. Et également pour prendre soin de vous et protéger votre équilibre mental dans ce défi.

Blessée par l'attitude de sa fille en psychose bipolaire, une mère monoparentale m'informait récemment de son soulagement de réaliser qu'elle avait mal interprété les intentions de celle-ci: elle a compris que sa fille était aux prises avec une difficulté à accepter sa situation, un désir d'être «normale» et qu'elle était malhabile à communiquer ses besoins et à négocier son autonomie vers l'âge adulte.

Parfois confondus avec la maladie mentale comme telle ou encore, banalisés comme étant futiles et relevant du caprice ou de la paresse, les troubles mentaux suscitent le jugement et le rejet.

Le deuxième profil de problèmes de santé mentale, soit celui des troubles mentaux légers à sévères, entraîne également son lot de souffrances. Parfois confondus avec la maladie mentale comme telle ou encore, banalisés comme étant futiles et relevant du caprice ou de la paresse, ils suscitent le jugement et le rejet. Pourtant ces troubles mentaux sont de plus en plus présents. Un sondage commandé par l'ACSM révélait en septembre 2018 que plus de la moitié des Canadiens (53%) considèrent l'anxiété et la dépression comme une «épidémie» au Canada. Un fléau qui affecte la qualité de vie et la présence au travail.

Encore une fois, les préjugés ont cours, devant l'incompréhension face à ces deux diagnostics majeurs que sont la dépression et les troubles anxieux. Consulter un psychologue permet d'apaiser la détresse, de comprendre la logique mentale derrière ces troubles et de désamorcer les schémas mentaux à l'origine de la souffrance ou de la panne existentielle. À titre d'exemple, nous avions, dans un précédent blogue, fait part de la prison invisible que représente l'anxiété sociale chez bon nombre d'adultes et abordé la dynamique sous-jacente. Et bon nombre d'adultes portent les séquelles de blessures psychiques majeures infligées durant leur enfance, lesquelles ont besoin de réparation.

Les ressources ne sont pas au rendez-vous

Le sondage de l'ACSM était accompagné d'un document titré «L'équité en santé mentale: mettre fin à la disparité en santé au Canada». Document qui rappelle une réalité de longue date et qui fait de la santé mentale le parent pauvre du secteur de la santé. On y exprime la demande visant à «mettre en place une nouvelle législation afin de répondre aux besoins de santé non satisfaits en matière de santé mentale et faire en sorte que les services en santé mentale et en santé physique soient sur un pied d'égalité.»

Le besoin de services et de soutien en santé mentale est grandissant: d'ici 2020, la dépression deviendra la principale cause d'incapacité au Canada.

On y déplore que notre système de santé universel soit plutôt un système médical universel qui ne garantit pas l'accès à certains des services les plus fondamentaux en santé mentale. Ces services sont sous-financés au Canada, ne représentant que 7,2% du budget en santé, comparativement à 23% partout dans le monde. Sans compter que le besoin de services et de soutien en santé mentale est grandissant: d'ici 2020, la dépression deviendra la principale cause d'incapacité au Canada.

Ce que les politiciens n'ont pas l'air de réaliser, c'est qu'en plus d'améliorer la qualité de vie et la santé, la promotion de la santé mentale et une intervention précoce peuvent réduire les problèmes de santé physique et réduire la pression sur le système de santé. «Une étude récente qui portait sur le traitement de la dépression a estimé que pour chaque dollar dépensé dans les services de psychothérapie financés par l'État, une économie de deux dollars serait réalisée pour le système de santé» (ACSM 2018).

Quand le soutien, l'information et les solutions sont disponibles, l'impuissance face à la maladie mentale diminue substantiellement. Et par ricochet, la stigmatisation et la discrimination des personnes qui sont aux prises avec des problèmes mentaux s'atténuent.

Il est important que les personnes nécessitant des services et du soutien puissent en bénéficier. Et également que leurs proches puissent recevoir les services de soutien, d'information sur la santé mentale et de coaching dont ils ont eux aussi besoin. Quand le soutien, l'information et les solutions sont disponibles, l'impuissance face à la maladie mentale diminue substantiellement. Et par ricochet, la stigmatisation et la discrimination des personnes qui sont aux prises avec des problèmes mentaux s'atténuent.

Bref, il faut remercier la campagne inaugurée par Bell de nous fournir une occasion de causer de santé mentale. «Le dialogue est une première étape importante vers un changement en profondeur».

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