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Commission scolaire de Montréal: Problème d’affichage ou manque de courage?

Les partis politiques, actuellement en pleine campagne électorale, doivent garder en tête que l’éducation est une science humaine et non une science comptable.
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Nous encourage-t-il à cacher la réalité des milieux aux futurs enseignants et à la population en général?
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Nous encourage-t-il à cacher la réalité des milieux aux futurs enseignants et à la population en général?

Comme il est consternant de lire la réaction de monsieur Égide Royer, prof émérite de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université Laval, au sujet de l'affichage de postes d'enseignants à pourvoir à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) et qui détaille la réalité des classes.

Il semble trouver cette stratégie d'affichage «étrange» dans un contexte de pénurie d'enseignants. Il est étonnant qu'un tel chercheur se contente de critiquer, au lieu de mettre en lumière les raisons pour lesquelles nous en sommes rendus là.

Nous encourage-t-il à cacher la réalité des milieux aux futurs enseignants et à la population en général? Est-ce que monsieur Royer est à ce point atteint de cécité qu'il ne voit pas la situation telle qu'elle est sur le territoire de la CSDM?

Oui, les classes et les tâches des enseignantes et des enseignants sont inégalitaires.

Oui, il y a encore des projets particuliers sélectifs sur la base des résultats scolaires.

Oui, 75% des écoles se trouvent en milieu défavorisé.

Oui, la moitié des élèves n'ont pas le français comme langue d'origine.

Oui, le quart des élèves du primaire sont des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (HDAA).

Oui, le tiers des élèves du secondaire sont HDAA.

Oui, les classes ordinaires sont composées de tous ces élèves à besoins très variés et souvent complexes ; la tâche des profs est trop lourde.

Oui, le parc immobilier est vétuste et tombe en ruine.

Oui, il y a un problème important de surpopulation, nos classes débordent...

Oui, ce sont les conditions difficiles dans lesquelles travaillent tous les profs, et pas seulement les nouveaux.

Alors, est-il préférable de recruter en présentant la réalité ou bien de fermer les yeux sur ces conditions d'exercice?

Faut-il par ailleurs rappeler que si on a pu combler en partie le déficit d'entretien des immeubles au cours des dernières années, c'est notamment grâce à la mobilisation des milieux, qui a entraîné la création de la Coalition pour des écoles saines? C'est cette dernière qui a porté les revendications communes, plus que nécessaires, auprès de la Commission scolaire de Montréal et du gouvernement.

On n'acceptera jamais de se bander les yeux. Nous avons une responsabilité collective de dénoncer l'intolérable et de crier notre indignation, surtout quand elle concerne le milieu de l'éducation.

À l'Alliance des professeurs de Montréal, au lieu de réagir à cet affichage, nous nous élevons au-dessus de cette mêlée et nous cherchons à comprendre entre autres pourquoi de trop nombreux profs nouvellement recrutés ou expérimentés se trouvent démotivés, épuisés et malades.

La réponse se situe en grande partie dans le manque de courage politique au cours des dernières années. L'école a beaucoup changé depuis la publication du rapport Parent, il y a 50 ans. Qu'a-t-on fait du principe fondamental que s'était donné notre société lors de la création du ministère de l'Éducation? Peut-on encore affirmer que l'État permet l'égalité des chances pour tous?

L'école a évolué en fonction d'une formule utilitariste qui mise sur l'approche marchande où l'on doit desservir une clientèle pour répondre à une gestion axée sur les résultats.

Malheureusement, non. L'école a évolué en fonction d'une formule utilitariste qui mise sur l'approche marchande où l'on doit desservir une clientèle pour répondre à une gestion axée sur les résultats. On a laissé l'école publique se désagréger. Tout cela sous l'idéologie néolibérale. L'éducation est devenue une marchandise et les profs, notamment, en paient le prix.

Qu'ils soient de gauche, de centre ou de droite, les partis politiques, actuellement en pleine campagne électorale, doivent garder en tête que l'éducation est une science humaine et non une science comptable.

Tout le monde s'entend pour dire que l'éducation, c'est la base de tout. Au Québec, où veut-on se situer en matière d'éducation? Ne devrions-nous pas nous distinguer, être plus progressistes et viser une école émancipatrice? C'est d'ailleurs sur ces enjeux qu'on devrait entendre les éminents chercheurs et les différents partis politiques.

Ne serait-ce pas le temps d'élever collectivement les débats?

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